Laurence Deschamps-Laporte a travaillé au cabinet de l’ancien ministre canadien des Affaires étrangères, François Philippe-Champagne. Elle est aussi responsable d’un des piliers du réseau de recherche pancanadien qui porte sur le programme de l’ONU Femmes, paix et sécurité1. Depuis plus d’un an, elle est professeure invitée à l’UdeM. Elle a récemment été nommée parmi les 50 personnes les plus influentes du Canada dans le domaine de la politique étrangère.
Quartier Libre (Q. L.) : Laurence Deschamps-Laporte, vous avez récemment été nommée parmi les 50 personnes les plus influentes du Canada en matière de politique étrangère2 par le journal politique The Hill Times. Qu’est-ce que cette distinction représente pour vous ?
Laurence Deschamps-Laporte (L. D.-L.) : Je crois que je me suis réjouie, surtout, de la reconnaissance des chercheurs francophones. Il y avait deux autres personnes qui étaient aussi nommées, Frédéric Mérand, directeur du CÉRIUM, et Thomas Juneau de l’Université d’Ottawa. Je pense que c’est important de reconnaître que les chercheurs ont un rôle à jouer dans l’univers des politiques publiques et des affaires étrangères. Ça représente une belle reconnaissance de voir des chercheurs mis de l’avant, de communiquer leur travail à l’extérieur des murs de l’université.
Q. L. : Vous avez travaillé pendant plusieurs années au sein du cabinet de plusieurs ministres canadiens des Affaires étrangères. Comment en êtes-vous arrivée à l’enseignement ?
(L. D.-L.) : Quand j’ai fait mon doctorat, j’ai dû réfléchir à ce que je voulais faire de ma vie. Je me suis toujours sentie à ma place dans le monde universitaire. L’université est un lieu précieux qui permet de réfléchir et de penser en communauté. C’est l’un des rares endroits où on peut le faire en liberté. En sciences sociales et en sciences humaines, le travail peut parfois être un peu isolant, même sur le terrain. J’ai fait beaucoup d’ethnographie, et ça peut être difficile. L’enseignement permet, à l’intérieur de cette carrière d’universitaire, de bâtir une communauté. Mais pour moi qui suis une personne plutôt extravertie, je retire beaucoup de bonheur de l’enseignement et du contact avec les étudiants. Et j’apprends beaucoup d’eux et d’elles aussi. C’est très complémentaire au travail de chercheuse.
(Q. L.) : Vous avez étudié à l’Université d’Oxford, en Angleterre, à l’Université de Caroline du Nord, à Chapel Hill, et vous avez fréquenté l’Université de Columbia, à New York. En quoi l’UdeM se distingue-t-elle des autres universités ?
(L. D.-L.) : J’ai grandi comme chercheuse à la fois dans le monde universitaire américain et anglais. Je pense que notre modèle au Québec est le modèle de tous les possibles. On est capable d’aller chercher le meilleur des deux traditions, et aussi de le faire en français. C’est comme un modèle universitaire hybride à mon sens, qui fait le pont entre le modèle nord-américain et le modèle européen.
Nous avons les meilleurs chercheurs au monde et nous faisons de la recherche en français. C’est aussi une université publique. Pour moi, ce sont ces éléments qui sont plutôt uniques.
(Q. L.) : Vous êtes aussi chercheuse invitée au CÉRIUM. Quel est son rôle et en quoi son existence est-elle importante ?
(L. D.-L.) : Le CÉRIUM joue un rôle significatif et unique au Canada, parce que c’est une communauté qui réunit des chercheurs spécialisés dans l’étude des questions internationales. Il y a un pont qui se fait au CÉRIUM entre les chercheurs, les autres entités de l’UdeM, les étudiants et la communauté à l’extérieur de l’Université. Par exemple, les écoles d’été sont aussi accessibles aux praticiens. Il y a une ouverture vers le monde. C’est une plateforme pour justement mettre de l’avant les connaissances de la recherche universitaire. On le voit en ce moment avec la crise en Ukraine. C’est flagrant comme l’expertise des chercheurs du CÉRIUM est en grande demande. Grâce à lui, nous retrouvons nos chercheurs dans les médias, dans les consultations gouvernementales, dans des colloques… C’est plus qu’un centre de recherche universitaire. Ça vient justement cristalliser l’importance du CÉRIUM, surtout dans un pays où la tradition des think tanks (groupes de réflexion) est moins importante.
(Q. L.) : Au mois de juin prochain, vous offrirez une école d’été sur l’un de vos sujets de prédilection, les politiques du Moyen-Orient. Qu’est-ce qu’une école d’été a à offrir ?
(L. D.-L.) : Plusieurs choses. C’est un peu une école en intensif sur un sujet de spécialisation. L’école d’été que j’ai offerte l’année passée et que je repropose cette année porte sur la politique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, par exemple. On parle d’une semaine pendant laquelle nous consacrons toute la journée, du matin au soir, à ce sujet relatif au thème de l’école. C’est le même nombre d’heures qu’un cours normal, mais en condensé. Et il y a beaucoup de conférenciers, nous faisons appel à des spécialistes. Chaque session, il y a aussi des collaborations avec d’autres chercheurs, des experts de l’externe. Enfin, cela permet aussi aux personnes qui travaillent de suivre un cours, de pouvoir s’immerger dans un sujet, en seulement une semaine l’été. On peut venir y parfaire une connaissance, c’est plus accessible.
1. Programme Femmes, paix et sécurité
2. Ukraine has the spotlight, but U.S. still dominates for the top 50 influencing Canada’s foreign policy — The Hill Times
École d’été Moyen-Orient en mouvance : du 20 au 25 juin 2022
Moyen-Orient en mouvance — Centre d’études et de recherches internationales — Université de Montréal