Pour créer, il faut des idées (et un compte épargne). Il faut aussi être culturellement ou artistiquement passionné (et ne pas escompter rentabiliser sa créativité). Quartier Libre s’est interrogé sur l’attitude financière à adopter lors de la mise en marché d’un petit périodique culturel. Rencontre avec Louis Gobeille, directeur artistique du Somnambule, revue littéraire nouveau-née.
Le Somnambule, avec son graphisme et son esthétique léchée, coûte cher. « La simple facture de l’imprimeur peut facilement nous coûter 1 000 $ avant les taxes. Mais avant ça, je dois payer les correctrices et la compagnie de design graphique avec qui nous faisons affaires. À part l’imprimeur et les designers, nous ne pouvons pas nous payer des professionnels », explique M. Gobeille. C’est souvent le rédacteur en chef qui puise dans son budget personnel pour couvrir le reste des dépenses. «L’équipe y met aussi de son argent de temps en temps, sans toujours demander à être remboursée», raconte le directeur artistique.
N’y a-t-il pas moyen de créer sans débourser?
Pour l’instant, pas question de passer du papier au Web pour sauver des sous. Comme l’exprime Louis Gobeille, « c’est une revue littéraire, mais aussi une revue de design. Il y a une structure, une esthétique qui ne peut exister que dans un livre imprimé. On veut que ce soit un objet d’art, qui soit disponible en nombre limité et qui sera peut-être un objet de collection pour les gens qui aiment la littérature underground. En cela, le média écrit imprimé est unique. »
La publicité ne semble pas non plus être une solution pour faciliter le financement du magazine. Pour M. Gobeille, la publicité implique concessions, perte d’espace et travestissement du format, ce que Le Somnambule n’est pas prêt à faire. «C’est hors de question. Si un jour je m’ouvre à la pub, ce sera de la promotion pour des centres artistiques, des galeries. Mais esthétiquement, ça ne marche pas : les textes sont construits dans une suite logique, on ne peut pas insérer de la pub en plein milieu », souligne le directeur artistique.
Le Somnambule profite présentement d’une aide provenant des associations modulaires de l’UQAM. Comme l’équipe est composée d’étudiants uqamiens, la revue peut bénéficier de ce genre de subvention. Et ça monte à combien ? «Disons simplement que les subventions qu’on a reçues pour les deux premiers numéros ont suffi à payer l’imprimeur », répond discrètement le directeur artistique. Entre couper dans la qualité du produit ou créer librement dans la précarité, les collaborateurs du Somnambule ont fait le second choix.
Le Somnambule est une revue de littérature underground biannuelle d’une soixantaine de pages. Sa première publication est parue l’an dernier, la deuxième est en impression, alors que la troisième se trouve toujours en production. Avec un tirage de 250 copies, Le Somnambule n’est pas étranger à la réalité de nombreuses revues culturelles : il faut payer pour s’exprimer. Le lancement officiel du deuxième numéro du Somnambule aura lieu le 24 novembre à l’Île Noire. Il est prévu qu’entre 70 et 100 exemplaires soient vendus ce soir-là, au coût de 8 $. Le reste des exemplaires est vendu à la librairie Le Chercheur de Trésors ou en fonction d’opportunités de vente (connaissances, professeurs, soirées de lectures, etc.). L’équipe du Somnambule sera aussi à Expozi n e, l e s 1 3 et 14 novembre prochains.