Lancinantes retrouvailles

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Par Maxime Huard
mardi 22 février 2011
Lancinantes retrouvailles

Portrait décapant d’une soirée de retrouvailles… Après un passage au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême en France, Pascal Girard lançait le 11 février dernier son plus récent titre, Conventum. L’auteur sague- néen y affronte avec humour le cruel regard d’autrui.

Honteux de ce qu’il est (ou n’est pas) devenu au fil des dix dernières années, Pascal entame une quête aux limites du masochisme afin de restaurer une image de lui-même enfouie dans le passé. Tout juste paru chez l’éditeur Delcourt, Conventum relate les angoisses autobiographiques de l’auteur à l’approche d’une soirée de retrouvailles.

Pas évident de renverser les résultats d’une décennie de laisser-aller. Sitôt reçue l’invitation au conventum, le dessinateur de 27 ans, qui menait jusqu’alors une vie sans questionnement, ne perçoit plus que ses défauts. S’il désire épater ses anciens camarades de classe, Pascal devra projeter au jour fatidique une saine apparence de « gagnant ». Au programme : discipline alimentaire, épuisantes séances d’entraînement, traitements pour le corps et métamorphose vestimentaire.

Maladroit, socialement inadapté, pitoyable, mais complaisant dans son « malheur », le personnage de Pascal n’éveille que très peu de sympathie malgré ses déboires. En fait, le kitsch des soirées de retrouvailles fournit à Girard le prétexte rêvé pour explorer, avec une bonne dose d’autodérision, la profonde banalité du quotidien. L’exigence de paraître devient à la fois torture physique et psychologique et c’est avec un plaisir palpable que le bédéiste s’inflige mille petites persécutions.

Du coup, Girard renoue avec l’autofiction, un genre qu’il avait délaissé. Ce procédé l’avait pourtant bien servi par le passé alors que ses deux premiers récits, Dans un cruchon et Nicolas (qui relate la mort de son frère), lui avaient valu le prix Réal-Fillion au Festival de la bande des- sinée francophone de Québec en 2006.

Avec Conventum, album résolument moins juvénile que ses prédécesseurs, Pascal Girard s’impose désormais comme un incontournable, une plume incisive au dessin de plus en plus assuré.