La victime est si belle et la crime est si gai

icone Culture
Par Charlotte Biron
mercredi 20 avril 2011
La victime est si belle et la crime est si gai

Chère Gina,

Je n’en peux plus. Voici maintenant près de neuf mois que je collabore au Quartier Libre et je ne peux plus aujourd’hui contenir mon excitation textuelle. Celle-là même qui rend mes mains moites et qui finit par les noircir après lecture du journal.

Après seize numéros et presque autant de réunions de production, j’éprouve une profonde frustration. Combien de fois ai-je dû rester dans le bureau jusqu’à ce que tout le monde soit parti pour ne pas trahir mes pulsions, mal cachées par mon visage rougi et suintant ? Je ne les compte plus.

Les collaboratrices du QL m’attirent. Je les veux toutes. Toutes à moi.

J’aimerais passer le restant de mes jours avec une bonne demi-douzaine d’entre elles, mais je n’ai jamais osé en aborder une seule. Je suis une personne de lettres, une personne timide. À l’inverse, ces journalistes semblent assurées, touchées par une espèce de grâce divine. Je ne sais pas comment m’y prendre.

S’il te plaît, Gina, aide-moi. Maintenant que la saison du journal est terminée, comment puis-je les cruiser ? Comment devrais-je les aborder ? Devrais-je les ajouter sur Facebook et leur envoyer régulièrement des chansons d’amour ? Devrais-je leur dédier des poèmes ? Je m’y perds. Viens-moi en aide.

Cœur de lou ?

 

Cœur de lou.

Tu es littéraire ? Comment peux-tu oublier que lou, ça finit avec un « p » ? Je suis contente, tu n’as pas l’air trop bon : tu es récupérable. Fais attention aux poèmes, c’est très XIXe siècle et ça peut effrayer. Mais les chansons d’amour, que de potentiel. Les années 1980, 1990.

Juste pour toi, mon cœur louveteau, j’ai fait un vox pop. J’ai eu un flash incroyable, ça tombe bien parce que c’est le dernier numéro de l’année.

Mon vox pop était une question qui ne tuait pas. J’ai trouvé diverses manières de faire flancher toutes les dames de ton cœur. Les faire tomber dans tes bras avec leur jupe et leur peau qui se dénude au printemps. Le mois d’avril, c’est le mois des bourgeons. Le côté rat de bibliothèque, tu le refoules au fond de toi, et demain, oui DEMAIN, tu passes la tondeuse dans ton toupet, tu laves tes shorts, tu fais briller tes souliers : tu te précipites au Bar Populaire pour le party du dernier numéro du Quartier Libre. Toutes les pigistes seront rassemblées, et franchement au lieu de spéculer sur leur position géographique pendant l’été, saisis la chance d’impressionner d’un coup toutes les beautés du journal. En sortant ton cœur de rocker, bien sûr.

J’ai récolté une série de chansons qui vont ravir les différents partis féminins du journal. À la question quelle est la chanson qui te fait chavirer ? Elles ont dit : « Cœur de rocker (interprétée par Julien Clerc), Ce soir l’amour est dans tes yeux (interprétée par Martine St-Clair), Pour que tu m’aimes encore (interprétée par Céline Dion), Cheek to cheek (interprétée par Louis Armstrong et Ella Fitzgerald), La javanaise (interprétée par Serge Gainsbourg) et L’engeôlière (écrite et interprétée par Richard Desjardins). » Les quatre premières sont assez groovy pour que tu puisses en faire des demandes spéciales au soir du dit party. Et coup sur coup : la chanson démarre, tu te retournes (il te faut une certaine distance du groupe féminin), tu les pointes indistinctement (ne sachant pas à quelle fille la chanson est destinée) et tu cries : « c’est pour toi ». C’est quatre de gagnées.

Par ailleurs, tu m’as parlé d’une demi-douzaine de filles, as-tu des origines omanaises, koweïtiennes, gabonaises ou d’un des autres pays qui permettent la polygamie (qui exclut généralement la polyandrie, polygynie étant le terme plus spécifique pour parler d’une union entre un homme et plusieurs femmes) ? Sache simplement que tu ne peux légalement avoir un harem.

N’oublie pas de les faire danser.