La santé n’est pas en vente à la quincaillerie

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Par Etienne Galarneau
jeudi 15 mars 2018
La santé n’est pas en vente à la quincaillerie
(Photo: Pixabay.com | stokpic)
(Photo: Pixabay.com | stokpic)
Étant jeune, j’avais une peur bleue du psychologue. J’ai eu des blocages, des problèmes, des angoisses. Les ressources étaient sous ma main, mais l’idée d’aller consulter me terrifiait. Ma crainte, c’était la stigmatisation. Qu’on dise de moi que je suis anormal.

À l’âge adulte, je comprends bien mieux qu’il n’y a rien d’anormal à avoir des problèmes liés à la santé psychologique. Ces problèmes peuvent arriver à tous et se soignent comme des maladies qui s’attaquent à mon corps. La consultation d’un professionnel est une pratique, certes, désagréable pour certains, mais acceptée et normale.

Ma peur du psychologue m’a longtemps fait dire que je pouvais tout régler moi-même. Sans être parfaites, les ressources disponibles sont d’une bonne aide pour les personnes qui en ont besoin. De fait, les sites d’autodiagnostic en ligne sont un peu devenus une source de blague pour les internautes. Vous avez une quinte de toux, mal à l’orteil, une perte d’appétit temporaire? Le cancer guette.

On peut isoler quelques symptômes et trouver une solution à son problème, mais règle générale, l’avis d’un expert sera souvent plus précieux. La consultation psychologique devrait être vue sur un pied d’égalité avec l’examen médical.

Si vous ressentez de la détresse, il est nécessaire d’en parler à des personnes externes, qui ont une expertise en la matière et qui peuvent vous aider à comprendre quelle ressource et quel comportement peuvent vous aider. Ce ne sont pas toujours des médicaments. Parfois, ce sont des exercices d’aide ou de l’accompagnement.

À chaque pot son onguent

« Si ça existait, on l’aurait! », annonce l’ancien slogan d’une chaîne québécoise de quincailleries. Cette formulation est probablement plus valide pour parler de formule universelle pour le bien-être que de tournevis et de clés à molette.

Du moins, c’est ce qu’explique le professeur à la Faculté des sciences de l’enseignement Emmanuel Poirel. « C’est toujours complexe, l’intervention sur la santé psychologique, admet-il. Une critique qu’on voit apparaître de plus en plus, c’est que la mesure des difficultés vécues est dissociée des interventions mises en place. » Celui-ci ajoute qu’il y a plusieurs facteurs, parfois systémiques lorsqu’on parle d’un contexte scolaire ou professionnel, empêchant la mise en place d’une solution miracle fonctionnelle pour tout le monde.

Sans expertise, la santé est peut-être un domaine particulièrement complexe à comprendre seul. La lecture de symptômes et de solution miracle en ligne amplifie souvent le pire et donne à des cas spécifiques des solutions générales. Au-delà du côté alarmiste de certains diagnostics, ces fournisseurs de réponses rapides ne connaissent pas le corps du patient, son passé et le milieu dans lequel il vit.

L’un des aspects importants de la prescription est l’avis professionnel. Mon diagnostic émis seul chez moi me dit que je dois prendre ce médicament-ci, mais si j’ignore l’existence de mon allergie à l’une de ses composantes, mon problème ne sera pas réglé. Pareillement, si l’on évite d’exprimer son ressenti, il est plus difficile de comprendre quelle est la source du nos problèmes personnels.

J’avais peur du psychologue. Aujourd’hui, je suis terrorisé à l’idée que le sujet de la santé mentale soit encore tabou.