La philosophie des Loose Pistons

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Par Xuan Ducandas
mardi 27 novembre 2012
La philosophie des Loose Pistons
Les Loose Pistons ont la philosophie « d'essayer d'en faire beaucoup avec peu de notes ». De gauche à droite : Jonathan Legault, Hugo Chartrand, Pierre-Luc Boily et Alexandre Maheu (Crédit photo : Pascal Dumont)
Les Loose Pistons ont la philosophie « d'essayer d'en faire beaucoup avec peu de notes ». De gauche à droite : Jonathan Legault, Hugo Chartrand, Pierre-Luc Boily et Alexandre Maheu (Crédit photo : Pascal Dumont)

Avec un seul maxi de quatre chansons, le groupe de rock garage Loose Pistons cumule les spectacles à Montréal et à Toronto. Entre bruits de percolateur et courants d’air, dans un café de la rue Rachel, ils livrent leurs réflexions sur le rock, leurs inspirations, leur cheminement, leurs études à l’UdeM et leur concert au Divan Orange du 30 novembre prochain.

Les Loose Pistons, c’est avant tout une histoire entre quatre Montréalais de 24 à 31 ans, amis d’enfance et autodidactes pour la plupart : Hugo Chartrand au chant et à la guitare, Alexandre Maheu à la guitare, Jonathan Legault à la basse et, plus récemment, Pierre-Luc Boily à la batterie.

Leur style se définit comme un rock’n’roll garage survolté aux influences multiples : rock psychédélique des années 1960 et plus classique des années 1970, un soupçon de country, de blues, de shoegaze et de rockabilly. Leur répertoire inclut même quelques ballades.

«On essaie de toujours se mettre en danger, proposer de nouvelles choses, pas forcément retourner vers des chemins connus », explique Hugo.

C’est dans la tête de ce dernier qu’a germé, en 2009, l’idée du groupe, alors qu’il vendait des sapins de Noël à New York en s’imprégnant de musique americana. Jonathan et Alexandre ont aussitôt embarqué dans l’aventure. « On a toujours eu des groupes, mais c’était beaucoup moins sérieux», raconte Hugo.

Les débuts pas si lointains de la formation ont été rudimentaires, avec, à la batterie, un voisin qui ne savait pas en jouer. «On lui disait juste, par exemple, de frapper à tous les temps, puis il se contentait de faire ça pendant cinq minutes. C’est comme quand tu mets une fleur dans un pot. Au début, c’est important qu’il soit le plus petit possible pour que la plante puisse grandir», relate le chanteur.

Ce minimalisme, inspiré par le groupe emblématique de rock underground américain Velvet Underground, rejoint leur «philosophie d’essayer d’en faire beaucoup avec peu de notes», ajoute Alexandre. Cet esprit brut est rehaussé par des arrangements de plus en plus sophistiqués.

«On a peaufiné, raffiné les choses, mais ça reste quand même instinctif, poursuit-il. Le but est plus d’essayer de créer un son, une tension, que de se concentrer sur la technique et de mettre une note après l’autre.»

« Au début, improviser en anglais est venu naturellement. Évidemment, il y a une question de tradition, c’est quasiment un conditionnement. » - Hugo Chartrand des Loose Pistons (avec la guitare) (Crédit photo : Pascal Dumont)

Une approche philosophique du groove

Le groupe a fait paraître, en février 2012, son premier maxi homonyme de quatre titres, Loose Pistons EP, grâce à l’intérêt du musicien et producteur montréalais Roy Vucino. «On a été chanceux. On était vraiment désespérés puis, finalement, enregistrer cet album-là, ça nous a tellement relancés, ça nous a donné un regain d’énergie.»

Depuis, les propositions se sont enchaînées pour le groupe, entre festivals montréalais, spectacles à Toronto et une première partie new-yorkaise en décembre prochain. «On a travaillé fort et ça commence à payer», se réjouit Alexandre.

La démarche des Loose Pistons puise ses racines dans les intérêts communs des membres, notamment la philosophie qu’Alexandre et Hugo ont étudiée à l’UdeM. Les études ont temporairement été mises de côté depuis que le groupe commence à prendre son essor, mais les discussions politico-métaphysiques font partie intégrante de la vie des Loose Pistons. «On travaille fort à créer une ambiance, construire un filtre de nos influences. La philosophie aide à le faire», affirme Hugo.

«Ce qui est important, c’est que le groove soit tout le temps roi, ajoute Alexandre. Ce n’est pas une question de notes, mais d’attitude et de philosophie. On ne va pas chercher des groupes ou un style musical en particulier, c’est plus un son, une atmosphère, une énergie.» Le processus de création est une entreprise collective. « On compose la chanson ensemble, chacun travaille son instrument. Et pour arriver à ce qu’on puisse se faire 100 % confiance les uns les autres, c’est vraiment important d’échanger.»

Les paroles sont exclusivement écrites par Hugo. Avec une prédilection pour les sujets intimes et les questions sociales, il aspire à se rapprocher d’une écriture plus profonde et poétique à la Lou Reed. Aux filles et aux voitures rapides, les Loose Pistons préfèrent l’évocation du chaos et de l’aliénation, créant délibérément une collision détonante avec le rythme dansant de leurs morceaux.

Toutes les chansons sont écrites en anglais. « Ce n’est pas vraiment un choix, avoue Hugo. Au début, improviser en anglais est venu naturellement. Évidemment, il y a une question de tradition, c’est quasiment un conditionnement. On est tellement habitués d’entendre cette musique-là en anglais que c’est venu par la force des choses.» Tous les membres se disent cependant attachés à la question de la langue, et la possibilité d’un album francophone dans le futur reste ouverte.

Nouveaux projets

Avec une trentaine de nouvelles pièces à son actif, le groupe s’est vu proposer, par leur ami et technicien de son Alexandre Larin, d’enregistrer un nouvel opus d’ici les prochaines semaines. «On va probablement faire ça à son chalet. Rien qui coûte quoi que ce soit, mais ça va sonner plus pro, plus hi-fiIls espèrent aussi, cette fois, être signés par une maison de disques indépendante.

À long terme, Hugo nourrit également, pour lui et ses comparses, un autre projet, celui de créer à Montréal un espace collectif où des artistes issus de différentes sphères pourraient pratiquer, organiser des évènements, s’inspirer mutuellement – un peu sur le modèle de la Factory d’Andy Warhol.

C’est d’ailleurs dans cette optique de collaboration multidisciplinaire que se déroulera leur spectacle du 30 novembre prochain au Divan Orange. Le groupe prévoit la participation de danseurs contemporains et d’éventuels effets de projecteurs, afin d’offrir un spectacle complet. Une perspective qui enthousiasme Hugo et Alexandre. «On est encore en train de travailler ça, disent-ils. Ce n’est pas la priorité au départ, mais on aime vraiment l’art du spectacle. C’est important qu’il y ait des attraits visuels.»

Loose Pistons avec Filthy Haanz, Invasions et The People

30 novembre 2012

Divan Orange

loosepistons.bandcamp.com