Pour la musicothérapeute de l’Association des musicothérapeutes du Canada Martine Létourneau, les effets de la musique chez les gens endeuillés ou anxieux sont notables. Elle affirme que ses patients sont passés plus facilement au travers de grandes souffrances avec l’aide de la musicothérapie. « Ça permet aux gens de s’accrocher à des choses qu’ils connaissent et qu’ils apprécient », dit-elle.
Une étudiante au baccalauréat en droit à l’UdeM ayant souffert de troubles anxieux, mais qui souhaite garder l’anonymat, abonde dans le même sens. « Lorsque je me sentais loin et déconnectée, la musique avait une sorte de rôle de bouée pour moi, explique-t-elle. J’écoutais une chanson pop que je connaissais bien, aux paroles et à la mélodie simples, et cela m’aidait à m’ancrer dans le réel. »
Les effets ressentis viennent du fait que les zones cérébrales les plus actives chez les sujets écoutant de la musique font partie du circuit de la récompense et de l’éveil, appelé le système mésolimbique, selon la neuropsychologue et professeure adjointe au Département de psychologie de l’UdeM et chercheure au Laboratoire international de recherche sur le cerveau, la musique et le son (BRAMS), Nathalie Gosselin. Ce circuit est d’après elle une structure du système nerveux connue pour être active lors d’autres stimuli : sexe, drogue et nourriture.
Mme Gosselin reste toutefois prudente par rapport aux recherches sur la musicothérapie. « Beaucoup d’entre nous avons déjà utilisé la musique pour se relaxer ou se stimuler, explique-t-elle. Cela dit, plus de recherches sont nécessaires pour mieux comprendre les effets de la musique. Actuellement, les données probantes sont insuffisantes pour remplacer des traitements médicamenteux par la musique, bien que son utilisation complémentaire puisse être éventuellement envisagée. »
Un type de trouble, un genre de musique ?
Des traitements de musicothérapie existent pourtant et des cours dans ce domaine se donnent à la Faculté de musique de l’UQAM et au Département de thérapies par les arts de Concordia notamment. Au Québec seulement, il y a une cinquantaine de musicothérapeutes accrédités par l’Association québécoise de musicothérapie. « Les résultats sont là, croit pour sa part Mme Létourneau. Cela aide les gens et leur fait du bien de manière totalement naturelle sans aucun produit chimique. »
Lors d’une séance de musicothérapie, le thérapeute sélectionne avec le patient des titres qu’il apprécie particulièrement en fonction de l’aspect à travailler lors de la séance. Le type de musique utilisé peut varier du classique à la pop, en passant par le folklorique. « Cela dépendra des goûts et des besoins du patient », explique Mme Létourneau. Cela dit, elle affirme que plusieurs morceaux sont fréquemment utilisés, tels que l’Ave Maria de Jean-Sébastien Bach et du mélodiste Charles Gounod, Gymnopédie du compositeur français Erik Satie, Halleluiah de Leonard Cohen, Scarborough Fair de Simon & Garfunkel et le Canon en ré de l’Allemand Johann Pachelbel.
« Ces morceaux ont en commun un tempo lent et des accords simples, poursuit Mme Létourneau. De plus, ils sont consonants et possèdent des répétitions qui incitent à l’introspection. Ils sont donc idéaux pour l’exercice de la musicothérapie. »
Ce type de conclusions pourrait intéresser les chercheurs, selon Mme Gosselin. « Au point où nous en sommes, c’est précisément le genre de conclusions que l’on cherche, dit-elle. Nous voulons comprendre si la musique a des effets différents sur les individus, en fonction du rythme ou de son genre ». Elle avance également qu’il est difficile de déterminer si les effets ressentis sont du ressort de la musique ou du placébo.
* Effectiveness of music therapy : a summary
of systematic reviews based on randomized
controlled trials of music interventions, Kamioka, Tsutani, Yamada, Park, Okuizumi, Tsuruoka, Honda, Okada, Park, Kitayuguchi, Abe, Handa, Oshio, Mutoh.
Study of stress, self-esteem and depression in
medical students and effect of music
on perceived stress, Baste, Gadkari.