À mesure que le combat contre la hausse des frais de scolarité imposée par le gouvernement Charest s’intensifie, des voix s’élèvent contre les méthodes et la stratégie de la Fédération des associations étudiantes du campus de l’UdeM (FAÉCUM). Pour Stéfanie Tougas, secrétaire générale de la FAÉCUM, l’heure n’est pas à la division.
« Nous vous écrivons, car, étant toujours membres de la FAÉCUM, nous trouvons déplorable la façon dont vous nous représentez et parlez en notre nom », peut- on lire dans la lettre adressée au bureau exécutif de la FAÉCUM le 26 février et dont Quartier Libre a obtenu copie. Signée par huit associations de l’UdeM1, et distribuée à toutes les associations étudiantes, elle fait état des contestations qui s’élèvent contre la Fédération. Avec 85 associations membres, la FAÉCUM représente 37 500 étudiants de l’UdeM.
Pour les signataires de la lettre, le bureau exécutif (BE) de la FAÉCUM retarderait le mouvement de grève, selon ce qu’ils qualifient de « plan caché ». « [Le BE] semblait systématiquement inciter à un déclenchement de la grève à partir du 1er mars afin de la poursuivre jusqu’au 22 mars, font valoir les signataires de la lettre. Si nous voulons frapper fort, il faut que le mouvement prenne de l’ampleur rapidement. Toute tentative visant à retarder l’entrée en grève ne peut qu’affaiblir le mouvement et lui faire perdre confiance, tout en laissant quelques associations assumer une plus grande part du sacrifice de leur éducation. »
Blocage stratégique?
« Je trouve ça assez cocasse », ironise la secrétaire générale de la FAÉCUM, Stéfanie Tougas. Elle rétorque qu’avec plus de 20 000 étudiants en grève et 57 associations ayant un mandat de grève, l’UdeM se place parmi les universités les plus mobilisées. « Personne n’a pour objectif de nuire au mouvement. Nous nous tirerions une balle dans le pied. Ce serait complètement absurde », assure-t-elle.
La manifestation nationale du 22 mars est bien sûr un objectif, poursuit Stéfanie Tougas. Elle précise que ce point a été adopté au conseil central et dans les différents comités de mobilisation étudiante de l’UdeM. C’est donc le rôle de la FAÉCUM de travailler dans ce sens, souligne-t-elle. « Cette réprimande est un peu incohérente, puisqu’ils [les signataires de la lettre] étaient présents lorsque les différents plans d’action ont été adoptés », ajoute Stéfanie Tougas.
Selon les contestataires, la manifestation nationale est pourtant « un moyen de pression qui s’est révélé insuffisant le 10 novembre dernier ».
La légitimité de la FAÉCUM remise en cause
Les signataires reprochent également à Stéfanie Tougas d’avoir utilisé le « nous » lors d’une déclaration au journal Le Devoir. « Lundi [20 février], nous serons 20 000 en grève », avait-elle alors annoncé. « Assistons-nous déjà à une première forme de “récupération” du mouvement par des gens qui ont tenté de le limiter plutôt que de le construire ? », questionne la lettre en faisant allusion au mouvement de grève de 2005.
À l’époque, alors que le mouvement de grève est lancé par la Coalition de l’Association pour une solidarité syndicale étudiante élargie (CASSÉÉ), cette dernière est exclue de la table des négociations. L’accord conclu entre le gouvernement et les Fédérations étudiantes universitaires et collégiales du Québec (FEUQ et FECQ) laisse beaucoup d’étudiants mécontents [voir article « Entente pas si cordiale »].
Au contraire, pour Stéfanie Tougas, l’utilisation d’un « pronom solidaire » est un message positif. « Je pense qu’il faut commencer à abaisser notre niveau de susceptibilité et à hausser notre niveau de solidarité. C’est un drôle de reproche de dire que le “nous”, qu’on utilise parce qu’on se sent concerné et solidaire, est une preuve de récupération », juge Stéfanie Tougas, qui se dit prête à en discuter si les associations étudiantes le souhaitent.
Le RUSH s’élève contre la FAÉCUM
Il n’y a pas que dans les associations que la grogne se fait entendre. Réunis au sein du Réseau des universitaires en science et humanité (RUSH), des étudiants mécontents dénoncent « le vide d’information et d’activités politiques à l’UdeM ». Selon ce groupe, la FAÉCUM n’assure pas adéquatement la défense de la communauté étudiante. Ils se proposent donc comme mouvement de ralliement. Rencontrés lors de l’une de leurs réunions, ils affirment pourtant ne pas s’opposer à la FAÉCUM, mais vouloir apporter une critique.
Ce n’est pas la quantité, mais la qualité des actions que le RUSH remet en cause. « Il y a un manque de visibilité de leurs actions au sein de l’Université, expliquent les membres du RUSH. Il n’y a pas de matériel pour s’informer sur la grève, on parle seulement de la manifestation du 22 mars ». En place depuis 2008, le RUSH regroupe aujourd’hui 90 membres « sur les listes de courriels ».
« Nous faisons au moins une à deux actions par semaine », objecte Stéfanie Tougas. Selon elle, s’il est nécessaire de distribuer des tracts et d’effectuer des actions sur le campus, le dialogue en assemblée générale est primordial. « Ce qui est important, c’est d’aller voir notre base et d’être le plus démocratique possible en tentant d’informer les associations étudiantes et les étudiants des impacts et des raisons de la grève », estime-t-elle.
Stéfanie Tougas rappelle l’importance de rester unis. « Nous avons tous le même objectif : faire reculer le gouvernement. Si nous voulons faire ça, il faut être unis, il faut être solidaires, il faut être un bloc et il faut que nous travaillions ensemble. »
1 L’Association des étudiants en philosophie de l’UdeM (ADÉPUM), l’Association étudiante de Musique de l’UdeM (AÉMUM), l’Association étudiante d’anthropologie de l’UdeM (AÉAUM), l’Association des étudiants aux cycles supérieurs d’anthropologie de l’UdeM (AÉCSAUM), l’Asso?CÉTASE des étudiants en études est?asiatiques, l’Association des étudiants en géographie de l’UdeM (AÉGUM), l’Association étudiante de littérature comparée de l’UdeM (AELCUM) et l’Association des étudiants diplômés du Département d’histoire de l’UdeM (AEDDHUM).