La Carrie Bradshaw du Mile end

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Par Leslie Doumerc
mercredi 8 décembre 2010
La Carrie Bradshaw du Mile end

«Oh, mais ne vous en faites pas mes petites cailles, être nulle en amour est parfaitement normal! Demandez de l’aide est la meilleure chose que vous puissiez faire ! », lit-on sur le site au style rétro de la love coach Léa Stréliski. Ni psychologue, ni gourou, la jeune femme de 28 ans vous offre ses services de meilleure amie de substitution.

Léa Stréliski l’avoue d’emblée: «Love coach, ça sonne un peu cucul». Mais « conseillère en vie sentimentale », cela faisait un peu trop long sur ses cartes professionnelles. Si la Montréalaise n’a pas encore autant de paires de chaussures dans sa garde robe que Carrie Bradshaw, elle ne s’offusque pas quand on la compare à l’héroïne de Sex and the City. «Quand j’étais plus jeune et plus arrogante, je trouvais ça nul que l’on me compare à elle. J’aimais m’associer à quelque chose de plus profond. En même temps, “Who am I?”. Maintenant je trouve cela flatteur. Si les filles aiment lire ce que j’écris, si ça les fait rigoler et en même temps réfléchir sur leur vie, c’est parfait.» Parler de choses sérieuses en les ficelant dans un emballage léger, telle est la marque de fabrique de Léa Stréliski. «On se fait prendre au piège parce qu’on lit mes billets en rigolant et, tiens, on a une petite larme à l’oeil… »

Pour panser les coeurs brisés, la love coach propose trois options. On peut lui écrire directement et elle publiera gratuitement et anonymement sa réponse sur son site sous forme de chronique (« Tu me poses une question, j’ai un sujet de chronique, tout le monde est content»). Votre détresse affective ne peut attendre ? Léa propose des « Quick fix»: 30 minutes de conseils express via Skype pour 45 $. Votre cas sentimental est pratiquement désespéré ? Optez pour le développement durable avec la séance particulière d’une heure à 60 $ (« Du travail de plus longue haleine, mais qui offre le plus de résultats à long-terme »).

Comment devient-on love coach ?

N’allez pas fouiller dans les programmes de l’UdeM : le certificat en gestion de vie sentimentale n’existe pas (encore). Léa Stréliski a grandi avec une cuillère publicitaire dans la bouche. Paraîtrait-il même que sa mère la berçait à coup de jingles pour l’endormir le soir. Son père, Jean-Jacques, est un des gourous de la publicité et de la stratégie d’images au Québec. Après dix années de rédaction de slogans commerciaux, et un passage au journal La Presse en tant que chroniqueuse, Léa profite de son congé maternité pour mener à bien un projet qui la titille depuis quelque temps.          « Dans mon cercle de filles, j’étais celle qui inspirait les autres. Une de mes amies, qui tient un atelier de bijoux, voyait passer des filles à problèmes tous les jours. Elle m’a dit qu’elle était sûre que je pourrais les aider. Une fois, je me suis mise à parler avec une de ces filles et j’ai vu que j’avais un effet sur elle. Je me suis lancée.» Parallèlement, Léa suit une thérapie et procède à une longue introspection avec un psychologue spécialiste en éducation affective. Mise en abime oblige, son mentor commence à la coacher dans son coaching.

Le site web « Léa la Love Coach», lancé en août dernier, commence à attirer des clientes. Quelques clients aussi, qui cherchent désespérément à mieux comprendre les rouages de la gente féminine. Sans dresser de portraits type de ses clients, Léa pense que tous ont en commun un manque de confiance en eux, et surtout, l’envie de tomber amoureux.

Enfin quelqu’un qui m’écoutera déblatérer sur le thème «Mais pourquoi Raoul ne me rappelle pas?» sans regarder son iPhone toutes les cinq minutes, pensez-vous ? Mais n’y a-t-il pas un danger à se fier mordicus aux conseils de cette nouvelle amie impromptue ? «Il y a effectivement le risque pour la personne de toujours suivre l’avis de l’autre et d’arrêter de prendre des décisions. Si je vois que ça s’enligne comme ça, alors je déconstruis la relation de proximité pour être sûre qu’il y ait une autonomie chez la personne. Sinon, je ne l’aide pas vraiment, je suis juste un gourou qui fait en sorte que les gens aient besoin de moi.»

Pourquoi pas vous?

Vous vous dites peut-être qu’à 60 $ de l’heure, vous aussi pourriez vous improviser gourou et concurrencer Léa ? Sauf que la demoiselle possède une arme imparable : elle pratique ce qu’elle prêche. « L’autre jour, quand j’ai dit à ma coiffeuse que j’étais love coach, elle m’a demandé “estce que tu as un bon couple ?” J’ai trouvé que c’était une très bonne question. On ne prendrait pas de conseils financiers de quelqu’un qui a fait faillite quatre fois ! ». Sur son site, la love coach a un onglet «Mon mec à moi », relié au blogue intimiste qu’elle tient avec son mari depuis quelques temps. Naviguant dans les sections mielleuses (vie de couple, vie de gars, vie de fille, vie de parents), on constate une écriture joviale, parfois mordante et décalée, mais ce que l’on retient surtout, c’est que ces deux-là s’aiment telllllllement, et chérissent telllllllement leur fils. Sur l’échelle de l’apothéose, ils sont à 123 % de bonheur brut.

Voilà pourquoi on ne concurrence pas Léa.