Culture

La troupe de Plus (+) que toi est composée de 10 étudiants. Crédit Photo : Sarah Bouchaïb

Je souffre plus que toi

 «La pièce est rythmée par cette émission, mais elle se construit également par l’intimité des candidats ainsi que par leurs drames personnels quand ils ne sont pas face à une caméra », rapporte le comédien et étudiant au baccalauréat en études cinématographiques, Pierre Chablin.

Chaque candidat doit prouver aux téléspectateurs et au public que son drame est le plus terrible de tous les drames. L’une a vu son amoureux mourir sous ses yeux, l’autre ressasse les nombreuses tentatives de suicide de son père en espérant être convaincant, mais tous espèrent avoir vécu l’événement le plus horrible pour gagner la reconnaissance et l’amour du public. « On s’attache plus à ceux qui ont connu des souffrances qu’à ceux qui mènent une vie banale, explique le metteur en scène, Cédric Patterson. En se comparant, on se dit qu’on n’est pas si pire. C’est terrible. Mes comédiens incarnent ce phénomène de société présent partout autour de nous. »

L’animatrice du concours est à la recherche de la pire tragédie humaine qui existe pour en faire un spectacle et ainsi captiver l’auditoire. Malgré l’atmosphère peu joyeuse qui se crée sur le plateau de télévision, tout est tourné en humour par les candidats. « Le sujet est évidemment sérieux, voire tragique, mais il est abordé de manière drôle, grinçante, souligne la comédienne de la troupe TUM et étudiante à la maîtrise en biologie moléculaire, Fanny Giguère. La pièce va parfois tellement loin dans le drame que ça en devient drôle. C’est très assumé. On s’attend à susciter des rires de malaise, des rires jaunes dans la salle. »

Chacun des personnages est unique par sa façon de parler, souvent chaotique. « Les moments forts de la pièce résident dans de courtes phrases ponctuées qui sont simples et directes, mais tellement belles », soutient Fanny. Ève, le personnage qu’elle incarne, doit justifier à son copain pourquoi elle exagère autant quand elle raconte son drame à la caméra. « C’est pour que les gens voient ma cicatrice », dit-elle dans la pièce. Et son amoureux rétorque : « Je l’ai vue, moi, ta cicatrice, mais j’ai préféré m’attarder à toute la peau autour. »

Outre les thèmes de la mort, du deuil et de la souffrance, plusieurs facettes de l’humain dans son rapport aux autres sont abordées. « Plus (+) que toi traite du malheur, du besoin de validation et de la recherche d’empathie, des thèmes qui rejoignent tout le monde et qui soulèvent des questions très intéressantes sur notre façon de les appréhender, affirme Fanny. Ces thèmes sont abordés de manière ludique, le spectateur n’aura pas l’impression de se faire faire la leçon. »

Plus (+) que toi est une tragicomédie. Pour les comédiens, le défi d’interprétation avec un tel genre de théâtre est de trouver le juste milieu entre rire et larmes. « Au bout du compte, c’est un amalgame de mots, d’émotions et de jeu physique qui donne corps au style tragicomique », pense la comédienne de la troupe TUM et étudiante au baccalauréat en anthropologie, Laurance Desjardins-Bernatchez.

La pièce de l’auteure Rébecca Déraspe critique non seulement les téléréalités, mais aussi le côté voyeur de l’humain envers le malheur d’autrui. Si la critique sociale forme le cœur de l’histoire, la vraisemblance de tous les personnages ajoute une dimension fort intéressante à l’œuvre.

Plus (+) que toi

8 avril à 20 h | 9 avril à 14 h et 20 h Centre d’essai de l’UdeM | Pavillon J.-A.-DeSève | 7 $

Partager cet article