Nommé le 1er juin, le recteur Guy Breton fait déjà parler de lui. Tout comme son prédécesseur, Luc Vinet, M. Breton plaide pour une hausse et une modulation des droits de scolarité.
«Malgré la religion de l’intégrisme des frais de scolarités identiques, je pense qu’il faut les moduler. Mais si un bon étudiant, qui vient d’un milieu qui n’a pas les moyens de supporter ses études, a les cotes et les caractéristiques pour entrer en médecine vétérinaire ou en médecine, il faut des bourses proportionnelles», affirme le radiologue de profession. Les associations étudiantes réagissent à la sortie de M. Breton. «Ce n’est pas lorsqu’ils étudient que les futurs ingénieurs, médecins et gestionnaires ont de l’argent. C’est quand ils travailleront! À ce moment, à travers leurs impôts, ils pourront rembourser l’investissement que la société a fait dans leur formation», ont déclaré par voie de communiqué de presse Quoc Dinh Nguyen, président de la Fédération médicale étudiante du Québec (FMEQ) et Félix- Antoine Daigle, président de l’Association étudiante de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (AéESG). Marc-André Ross, secrétaire général de la FAÉCUM affirme que «le critère pour l’admission en médecine ou en droit ne devrait pas être le poids du portefeuille, mais les aptitudes et connaissances de l’étudiant».
Selon une étude publiée dans la revue spécialisée Medical Education en 2010, les facultés de médecine du Québec comptent plus d’étudiants provenant de familles au revenu modestes que celles du reste du Canada. L’étude conclut que cette réalité est causée par le faible coût des études au Québec. Marc-André Ross souligne l’influence que le coût des études peut avoir sur l’accessibilité aux études supérieures. Pour Guy Breton, il en irait tout autrement: «Moi, j’ai gagné mes études de musique en faisant de la photographie et en jouant de la musique le soir. Je réfute que ce soit un facteur limitant. Trouvons les moyens pour compenser l’augmentation».
Guy Breton soutient que l’augmentation des droits de scolarité est absolument nécessaire pour éviter que le Québec se ghettoïse. Selon lui, sans augmentation, la province devra diminuer ses standards de qualité en éducation par manque de moyens. Un manque de moyen qui découle de la limitation de la capacité de payer des pouvoirs publics, de la nonparticipation des entreprises dans le réseau universitaire et du refus de certains d’envisager le dégel des droits de scolarité.
Une troisième voie ?
Guy Breton n’hésite pas à se désolidariser de ses collègues recteurs. « Le débat est stérile. Il y a d’un côté les purs et durs de l’intégrisme du gel des frais de scolarité, et de l’autre, des gens à la limite du contrôle de leur colère qui veulent absolument que les étudiants paient tout de suite la moyenne du Canada, dit le recteur. Cela ne suscitera pas l’enthousiasme de mes collègues, mais j’ai une position différente. On ne peut pas laisser une dette aux générations futures, pas plus que les générations qui nous suivent ne peuvent nous laisser un déficit d’opération.» Ainsi, le Dr Breton propose «de revenir au Québec d’il y a 40 ou 50 ans» en affirmant que les étudiants devraient payer, en dollars constants, la somme que leurs aînés payaient en 1970, soit environ 700 $ de droits de scolarité par année. L’équivalent, aujourd’hui, serait de 3900 $. La moyenne canadienne des frais de scolarité des étudiants du premier cycle inscrits à temps plein s’élève à 4 917 $ en 2009-2010. La moyenne québécoise, pour la même année, totalise 2272 $.
Il n’y a pas que les étudiants qui vont devoir payer plus, ajoute le recteur. «Je ne veux pas vendre l’UdeM aux entreprises, souligne Guy Breton. Je veux qu’ils me donnent des sous, et nous ferons les choix. Les entreprises sont les premiers bénéficiaires de l’université. Ce qu’elles veulent, ce sont des cerveaux bien formés. Mais elles agissent comme si ce n’était pas leur problème.» De son côté, Marc- André Ross est ouvert à l’idée de discuter de la participation du privé dans les universités : «Cela soulève beaucoup de questions, mais c’est une bonne chose que le recteur lance de nouvelles pistes de réflexion.» Le débat sur la hausse des frais de scolarité ne fait que commencer. Prochain rendez-vous : le forum sur le financement du réseau universitaire, cet automne.