Examens en ligne: la triche s’est propagée à l’UdeM

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Par Romeo Mocafico
jeudi 17 septembre 2020
Examens en ligne: la triche s’est propagée à l’UdeM
Crédit photo: unsplash.com
Crédit photo: unsplash.com
Avec la tenue des examens en ligne, des étudiants se sont laissé tenter par la triche au cours de la dernière session. Contactés par Quartier Libre, trois d’entre eux témoignent de ce qu’ils ont vu dans leurs cours.
«Il y avait zéro risque: impossible de prouver qu’on était plusieurs, impossible de prouver qu’on avait le cours à côté, souligne-t-il. J’ai signé une charte sur l’honneur, mais je n’ai aucun remords.»

«La session en ligne, c’était tellement flou pour tout le monde qu’on s’est mis à tricher pour presque toutes les matières », avoue Bastien*. L’étudiant au baccalauréat en relations internationales dévoile avoir profité des conditions du trimestre à distance pour se faire aider lors de ses examens. «Je partageais automatiquement chaque examen par capture d’écran à des amis universitaires, qui ne sont même pas à l’UdeM, pour qu’ils rédigent une partie de mon devoir. Tout le monde le faisait dans mes cours

C’est également le cas de Marie-Ève*, qui reconnaît avoir triché à plusieurs reprises lors de la dernière session. «On s’appelait avec plusieurs amis du cours et on répondait aux questions ensemble, explique-t-elle. On checkait aussi nos notes de coursD’après elle, la grande majorité des étudiants qui suivaient les mêmes cours au baccalauréat de psychosociologie ont fait de même.

Madeleine*, quant à elle, s’est illustrée lors d’un examen oral de chinois. «J’ai triché lors d’un examen oral en ligne, en collant des feuilles de vocabulaire sur mon mur, derrière mon ordinateur, confesse l’étudiante. Pour l’écrit, j’avais des tests sur Studium, et je ne me suis pas privée de regarder mes notes de cours

 

Trop à perdre

Pour les trois étudiants, la tenue des cours et des examens en ligne a favorisé la triche au cours de la session. «La fin du trimestre a été catastrophique pour moi, poursuit Madeleine. Personne ne comprenait rien. On n’avait plus réellement de cours.» L’étudiante dit s’être laissé tenter par la triche principalement par peur de l’échec. «Je n’ai pas payé cette session aussi cher pour tout foirer à cause du confinement!», clame-t-elle.

Même son de cloche pour Bastien, qui, dès l’annonce du confinement, s’attendait à passer les examens depuis son domicile. «Avec le confinement, je ne me déplaçais plus, et il y a des cours que j’ai commencé à délaisser. On se disait, de toute façon, qu’on allait avoir le cours avec soi pour les examens. Tant que j’arrive à valider, ça ne me gêne pas trop, même si c’est en trichant

Marie-Ève s’est aussi détournée du règlement de l’Université lors de devoirs, principalement pour des questionnaires à choix multiple, pour s’assurer de bonnes notes. «Moi, apprendre par cœur et oublier deux semaines plus tard, ça me n’intéresse pas. J’ai préféré m’éviter du travail inutile. Je trouverais ça stupide, en revanche, de tricher dans mes cours de socio, que je trouve vraiment enrichissants», précise-t-elle.

 
 

Facile et sans risque

 

Pour se prémunir de tels agissements, l’Université fait parvenir en début de session un code d’honneur aux étudiants, qui rappelle les comportements interdits lors d’examens. Les étudiants sont invités à le signer à nouveau avant chaque examen à distance. «Je m’engage à: faire les tests et examens moi-même, sans l’aide d’autres personnes ?…?, ne pas participer à des activités malhonnêtes visant à améliorer mes résultats ?…?, ne pas divulguer publiquement ni les questions ni les réponses aux questions posées dans les tests», peut-on lire dans cette attestation.

«Tout le monde signe le code sur l’honneur, mais personne ne le respecte, soutient Marie-Ève. L’Université a beau mettre ça en place, il y a des trucs qui sont inévitables: si on a envie de s’appeler, rien ne va nous en empêcher

Bastien partage un point de vue similaire. «Il y avait zéro risque: impossible de prouver qu’on était plusieurs, impossible de prouver qu’on avait le cours à côté, souligne-t-il. J’ai signé une charte sur l’honneur, mais je n’ai aucun remords

 

L’avenir sans triche ?

L’étudiant assure qu’il trichera à nouveau si les prochains examens se déroulent dans les mêmes conditions. «Si ça se passe de la même façon, je tricherai à nouveau sans hésiter une seule seconde. C’est trop facile», conclut-il.

Madeleine, quant à elle, estime qu’assez de progrès ont été réalisés par rapport au printemps dernier pour se permettre de passer des examens sans aide. «Honnêtement, les cours en ligne ont eu le temps de s’améliorer. Ce n’est plus aussi catastrophique qu’à la session dernière, admet-elle. Donc je ne pense pas que je vais tricher, surtout si je reçois un enseignement correct. Ce n’est vraiment pas le but de mes études

Récemment interrogé sur le déroulement du prochain trimestre, le recteur de l’UdeM, Daniel Jutras, dit attendre la fin du mois d’octobre pour se prononcer sur les conditions de sa tenue et de celle de ses examens.

 
 
* Les prénoms des trois étudiants de l’UdeM ont été modifiés pour préserver leur anonymat.