Sébastien
Étudiant au baccalauréat en interprétation classique de saxophone
« On m’a inculqué que les études c’était important, alors c’est ma priorité », insiste Sébastien. Il s’est promis que le cannabis ne nuirait pas à ce qu’il fait dans la vie. Sa consommation, il la contrôle strictement : il ne fume jamais en semaine et rarement en dehors des relâches. Avant de se lancer, il a mené des recherches pour être sûr de ne pas compromettre sa santé, car il est hors de question pour ce saxophoniste d’abîmer ses poumons.
Son premier joint, il l’a partagé avec sa mère, ancienne adepte du flower power qui souhaitait ainsi éloigner son fils des autres drogues. Pari tenu jusqu’à présent, car le jeune homme est sélectif. « J’aime le pot qui vient chercher ton esprit, qui te met dans des états aptes à l’introspection et à la réflexion, raconte-t-il. On fume ça, puis tout le monde parle de trucs super profonds. » Pour Sébastien, l’herbe est un plaisir résolument social, qui se partage. Mais ses amis ne l’entraînent pas, insiste-t-il. Rester maître à son bord est essentiel pour lui.
Julia (prénom fictif)
Étudiante en droit
Julia fume tous les jours. Consommatrice occasionnelle durant ses études au cégep, elle a commencé à acheter régulièrement du cannabis à son entrée à l’université. « Le pot, c’est sûr que ce n’est pas un moteur, reconnaît-elle. Je ne voulais pas commencer à fumer sans avoir de plan de carrière, sans avoir trouvé ma voie. » L’étudiante souhaite devenir avocate. Fumer améliore sa concentration et l’aide à parcourir les lectures nécessitant davantage de compréhension que de mémorisation.
Au-delà de ce coup de pouce, le cannabis est surtout un moyen de décompression dans un domaine d’étude ultra compétitif. Entre la performance académique et la course au stage, la pression d’excellence est forte et Julia ressent le besoin de décrocher. Mais, si fumer du cannabis est devenu une habitude, elle ne s’en sent pas dépendante et traverse sans encombre un mois d’arrêt pendant les examens. Son mot d’ordre : jamais léthargique, toujours dans l’action.
Maxime (prénom fictif)
Étudiant à Polytechnique
« Mon péché mignon ». C’est ainsi que Maxime parle des joints qu’il fume presque quotidiennement. Quand il passe son tour, c’est qu’il manque de temps, les travaux scolaires l’empêchant parfois de retourner chez lui pour « s’en rouler un ». Qu’il s’y prenne seul ou entre amis, Maxime consomme pour se détendre et laisser derrière lui le stress de l’école. « Quand je sais qu’à la fin de la journée je vais pouvoir fumer, ça me motive à travailler, c’est une récompense », décrit le futur ingénieur industriel, qui a découvert le cannabis à 14 ans.
Fan de hip-hop, il a imité des artistes comme Wiz Khalifa ou Lil Wayne, qui affichaient publiquement leur goût pour la marijuana. Aujourd’hui, Maxime écrit sa musique. Le joint l’aide à libérer sa créativité. « Des fois, quand on est à jeun, ça peut être difficile de se mettre à penser de manière métaphorique ou d’aller dans des pensées plus complexes », relate-t-il. À 21 ans, l’étudiant est déjà un vétéran du cannabis et pense continuer ainsi toute sa vie.
Projet de loi déposé
Suite à sa promesse électorale, le gouvernement de Justin Trudeau a officiellement déposé le 13 avril dernier son projet de loi fixant la légalisation du cannabis au 1er juillet 2018, ce qui fera du Canada le premier pays du G7 à rendre légale la marijuana. En voici les principales composantes.
• Le gouvernement canadien offre un cadre réglementaire pour la production, la consommation et la vente de cannabis. Les provinces seront chargés de la distribution et de la vente au détail de la marijuana.
• Âge minimum de 18 ans pour achat et consommation, qui peut être revu à la hausse selon les provinces.
• Possession permise de 30 grammes de cannabis légal par canadien.
• Autorisation de cultiver soi-même un maximum de quatre plants de cannabis par logement, ne pouvant excéder un mètre en hauteur.
• Possibilité de fabriquer des produits maison avec le cannabis, comme des muffins ou gâteaux, sans solvant organique dangereux.
• Une province peut interdire la vente de cannabis sur son territoire, mais les citoyens pourront alors s’en procurer par la poste d’un producteur autorisé via Ottawa.
Prévention
En déposant le projet de loi, les ministres canadiens de la Justice et de la Sécurité publique ont déclaré vouloir utiliser celui-ci pour restreindre l’accès au cannabis et écarter les trafiquants du marché.
• Cadre plus rigoureux autour de la consommation de cannabis au volant. Les sanctions varieront selon le taux de THC, un suspect pourra être soumis à donner un échantillon de salive aux policiers en bordure de route.
• Donner ou vendre du cannabis à un mineur sera désormais une infraction criminelle distincte passible de 14 ans de prison.
• Interdiction de rendre les emballages de cannabis attrayants pour les mineurs, de faire de la publicité pour le cannabis à laquelle des mineurs pourraient être exposés ou de vendre du cannabis dans des machines distributrices.
• Illégal de transporter ou vendre du cannabis au-delà des frontières.
• Toute production ou consommation de cannabis demeure illégal jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle législation.