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Par Katy Larouche
vendredi 25 avril 2014
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(ILLUSTRATION: NAVID MOGHADDAM)
(ILLUSTRATION: NAVID MOGHADDAM)

L’entrée sur le marché du travail est un moment attendu par beaucoup d’étudiants. Toutefois, quand CV et lettres de présentation restent sans réponse, certains diplômés choisissent de reprendre les cours dans l’espoir d’augmenter leurs chances de décrocher un emploi.

 «Je n’avais pas les compétences ou je manquais d’expérience selon les recruteurs, raconte la diplômée en études cinématographiques Valérie Comtois. On ne m’offrait que des stages à temps plein non rémunérés. » Après trois mois de recherches infructueuses dans le domaine des festivals de cinéma, elle a décidé de réviser sa stratégie en s’inscrivant au certificat en gestion philanthropique. « En regardant les offres d’emploi, j’ai réalisé qu’on demandait souvent de l’expérience en gestion dans le domaine des organismes à but non lucratif », souligne-t-elle. C’est ce qui l’a poussée à s’inscrire au certificat, malgré sa volonté de quitter l’université pour occuper un emploi.

Définir un plan, comme l’a fait Valérie, est essentiel pour qu’un retour aux études soit efficace, convient la conseillère en orientation au Centre étudiant de soutien à la réussite (CÉSAR) Karine Donnelly. «Il faut bien définir son projet d’étude en connaissant les qualifications requises par les employeurs et le type d’entreprises dans lequel on souhaiterait travailler», illustre-telle. Dans un tel cas, il peut être judicieux de reprendre des cours si cela semble nécessaire pour atteindre l’objectif fixé.

La nature de la formation entreprise peut aussi appeler la poursuite de nouveaux diplômes. «Avec une formation plus théorique, comme la sociologie ou l’anthropologie, c’est souvent pertinent d’aller chercher une spécialisation supplémentaire », juge le conseiller au service emploi du CÉSAR Yan Galarneau.

Diplômée à la maîtrise en politique internationale, Marie-Hélène Caron-Melançon a vécu cette situation. «Comme le domaine des sciences politiques ne mène pas à l’obtention d’un titre professionnel, la spécialisation me semblait inévitable pour me démarquer», estimet- elle. Malgré le certificat en coopération internationale qu’elle a complété à temps partiel, ses démarches n’ont toutefois pas été tellement plus simples. «Les coupes de budget dans les Organisations non gouvernementales (ONG) compliquent la recherche d’emploi dans le domaine, explique-t-elle. Je n’ai jamais été rappelée en trois ans.»

Quand s’arrêter ?

Sur le terrain, il n’est effectivement pas toujours facile de savoir à quel moment reconsidérer ses options. « Quand la motivation n’y est plus, que ce soit après cinq refus ou 50, il faut aller chercher l’aide d’un professionnel », conseille Mme Donnelly. À l’UdeM, plusieurs spécialistes sont disponibles pour aider les étudiants et les diplômés, tant à évaluer les programmes d’études qui pourraient les aider qu’à trouver de nouvelles façons d’appréhender la recherche d’emploi.

C’est plutôt en étudiant les exigences des employeurs que Marie-Hélène a finalement choisi d’entamer une nouvelle maîtrise à l’UQAM, en gestion de projet cette fois. «La réalité du marché du travail évolue constamment, croit M. Galarneau. Au bout de trois ans, les exigences ne seront peut-être pas les mêmes, et il faut s’y adapter, entre autres en faisant une nouvelle formation.»

La professeure titulaire en gestion des ressources humaines à HEC Anne Bourhis admet que la situation a changé au cours des dernières décennies. «Le plus grand pourcentage de gens qui possède un baccalauréat fait que les diplômés se distinguent moins», concède-t-elle.

Selon M. Galarneau, cumuler les diplômes peut à la fois donner du sérieux à une candidature tout autant que lui nuire. «Une personne qui a plusieurs formations sans lien entre elles peut donner l’image qu’il n’a pas terminé son exploration ou qu’il a de la difficulté à se fixer», soulève-t-il.

De son côté, Mme Bourhis soutient que tout est dans la façon de le présenter. «Si le candidat explique son changement de parcours de façon cohérente, l’employeur ne devrait pas avoir une perception négative », pense-t-elle.

Faire le grand saut

«Il faut bien penser aux motivations qui amènent le diplômé à entreprendre une formation, sinon le fait de retourner aux études ne fera que repousser le problème», soutient M. Galarneau. La peur du marché du travail, souvent inconsciente, est aussi une des raisons qui poussent beaucoup de diplômés qu’il rencontre à vouloir entamer une nouvelle formation.

«Certains ont l’impression qu’ils n’auront plus le droit à l’erreur une fois sur le marché du travail, et cela les effraie beaucoup », souligne Mme Donnelly. Selon elle, il s’agit d’une des pires raisons pour entamer une formation. Il vaut mieux désamorcer cette crainte en rencontrant des gens du milieu ou en faisant un stage pour mieux apprivoiser ce nouvel environnement. Elle rappelle que les études doivent être considérées comme le point de départ d’une carrière et non comme sa finalité.