Essentiels : montrer les visages de l’immigration temporaire au Québec

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Par Philippe Morin-Aubut
mardi 24 janvier 2023
Essentiels : montrer les visages de l’immigration temporaire au Québec
Sonia Djelidi et Sarah R. Champagne. Crédit : Picbois Production
Sonia Djelidi et Sarah R. Champagne. Crédit : Picbois Production
Télé-Québec proposera ce mercredi 25 janvier, à 20 h, le documentaire Essentiels : servir pour rester. Le projet, porté par Sonia Djelidi, Sarah R. Champagne et Ky Vy Le Duc, offre un aperçu de la réalité des travailleur·euse·s temporaires au Québec, cette catégorie oubliée du débat sur l’immigration.

Dès l’introduction d’Essentiels : servir pour rester, la militante pour les droits de la personne Sonia Djelidi pose la question : «Sommes-nous conscients que notre mode de vie, au Québec, repose sur le travail de personnes à qui on ne donne pas le droit de s’installer ici?»  

Comme cette dernière le rappelle, la pandémie a permis à de nombreuses personnes de réaliser l’importance des travailleur·euse·s temporaires, ces «anges gardiens» essentiels que François Legault saluait dans ses points de presse pandémiques. Or, encore aujourd’hui, le système de santé du Québec, sa production agricole, ses manufactures, ses entrepôts d’élevage et bien d’autres domaines du quotidien ne fonctionneraient pas correctement sans leur travail, rappellent les intervenant·e·s présent·e·s dans Essentiels.

Le documentaire s’intéresse notamment aux travailleur·euse·s qui embarquent dans des camionnettes d’agences privées, sans savoir leur destination ni le type de travail qui sera demandé. Crédit : Picbois Productions.

L’autre face de l’immigration

Pendant que le débat sur l’immigration se concentre sur le nombre d’immigrant·e·s que le Québec pourrait accueillir, Essentiels révèle que le nombre de personnes installées dans la province sans garantie de pouvoir y rester continue d’augmenter. Aussi, contrairement à ce que pouvait affirmer l’ancien ministre de l’Immigration, Jean Boulet, selon qui 80 % des immigrant·e·s choisissent de vivre à Montréal, ne travaillent pas et ne parlent pas français, le documentaire démontre que ces personnes occupent plutôt les emplois dont personne ne veut et que leurs semaines de travail dépassent largement les 35 heures.

Edyn, un travailleur agricole originaire du Guatemala, révèle dans Essentiels qu’il travaille ainsi au Québec depuis 10 ans. Pendant ce laps de temps, il n’a vu sa famille, restée au Guatemala, que l’équivalent de trois mois.

Il contribue au succès de l’entreprise locale Savoura, paye des impôts et souhaite faire sa vie au Québec. «Pourquoi lui empêcher alors de vivre une vie normale ici, avec sa famille?» s’interrogent Sonia Djelidi et la journaliste Sarah R. Champagne.

Le parcours du combattant de la résidence permanente

Le problème est que la voie de la résidence permanente est difficile d’accès pour des personnes comme Edyn. Dans la mesure où il ne possède pas de qualifications spécifiques et parce qu’il n’a pas le niveau de français qu’exige le gouvernement québécois (la majorité de ses interventions dans le documentaire sont en français), il est seulement accepté au Québec en tant que travailleur.

Pour d’autres immigrant·e·s qui font, comme Edyn, du travail «saisonnier», ou pour des demandeur·euse·s d’asile, la résidence permanente représente, entre autres, l’espoir de retrouver leur famille, la stabilité et la possibilité de changer d’employeur en cas de mauvais traitements patronaux (les permis de travail temporaires dans le domaine agricole sont en effet rattachés à un seul employeur).

Le documentaire soulève donc la question de savoir pourquoi des personnes essentielles comme Edyn n’auraient pas le droit de s’installer ici de manière permanente.

Essentiels : Servir pour rester sera diffusé à 20 h le mercredi 25 janvier sur les ondes de Télé-Québec. Le documentaire sera ensuite offert en ligne sur le site Internet de la chaîne.