Es-tu Russe ?

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Par Pascaline David
mardi 22 février 2011
Es-tu Russe ?

Moi pas.

Lorsque je sors au bar, si je commande des shooters, il s’agit inévitablement de tequila, je ne sais pas pourquoi.

Au Café Campus, où plus personne ne sort passé le début de la vingtaine, parfois les shooters de vodka se vendent à coups de cinq pour dix dollars. Un collègue s’est étrangement retrouvé là, il y a quelques semaines de cela. Entre la Bud à quatre dollars et la fabuleuse aubaine sur la vodka, il a fait le second choix. Je ne vous raconte pas la suite, parce qu’il n’a pas vraiment su me la relater.

Chaque fois que j’entends des histoires impliquant de la vodka, je pense à la Russie, à ses steppes et à sa spacieuse toundra. Je ne suis pas Russe et je généralise outrageusement. Il est si facile de définir un peuple par ses traditions éthyliques et quelques stéréotypes. Russie : Vodka, Troïka, Pazhaluista (je vous en prie, en russe). Il me gêne d’étaler toute mon insuffisance en ce qui concerne la culture russe. Je m’en suis rendu compte l’autre jour, lorsque j’ai rencontré Nastia. Elle ne portait pas de manteau de poil et ne buvait de la vodka que parce que je lui en avais offert (je n’avais rien d’autre sous la main et dehors, le froid était sibérien). Nastia s’est révélée être une fervente de lutte et de survêtements de lycra. « Es-tu Mexicaine?», ai-je demandé. «Je suis née à Saint-Pétersbourg», a-t-elle dit. «Oh!», ai-je tenté, avant de me la fermer. Puis, j’ai eu envie d’en savoir plus sur la Russie. Par un heureux concours de circonstances, une enquête concernant certains aspects de la diaspora russe se retrouve en ces pages (p. 14 et 15).

Le saviez-vous ? À Montréal, il existe un «Quartier russe», une «Petite-Russie». Non, vous ne le saviez pas. Vous allez manger de la pizza au Napoletana dans la Petite-Italie, vous vous gavez de soupe tonkinoise dans le Quartier chinois, vous vous laissez tenter par le poulet braisé du Portugais de l’avenue Duluth, parfois vous allez même rencontrer Mado dans le Village gai, l’été. Mais vraiment, que faites-vous à ne pas aller rôder autour du métro Snowdon, quelque part à l’intersection de Queen-Mary et Décarie, le coeur même de la «Petite-Russie»? Savez-vous ce que vous pouvez y trouver ? Entre autres choses, des agrumes confits et de la liqueur à base de pain noir, à peine alcoolisée : des incontournables.

Puisque le thème de l’alcool est abordé, force m’est de mentionner que j’ai bu une bière sur une terrasse pour la première fois de l’année, le 18 février dernier, à une température de 7 °C. La bière s’appelait La Tabarnak et le bar était le St-Bock, petit miracle de micro-brasserie, situé sur le rue Saint-Denis.

Quelque part au nord-ouest de ce bar, sur le boulevard Saint-Laurent, se situe le Cinéma L’Amour, véritable institution montréalaise de la pornographie. Une journaliste l’a visité récemment (p. 20). Elle a craint d’y laisser ses doigts collés. Elle est restée quinze minutes à observer quelques ébats sur grand écran, puis elle a déguerpi sans même prendre le temps de saluer la pulpeuse Asiatique à l’entrée, réceptionniste de métier.

Cette anecdote me rappelle le jour où un ami, pour fêter ses vingt-quatre ans, a décidé d’inviter quelques connaissances masculines et féminines à la maison et de se payer la visite d’une escorte full contact. Personne n’était vraiment avisé ; lorsque la travailleuse du sexe est arrivée, un malaise général s’est installé. Certaines filles, estomaquées, se sont tues, puis se sont retirées, éberluées. Les autres filles, révoltées, ont entrepris d’isoler l’exotique danseuse afin de la dévisager. Les mecs, eux, se sont bien marrés. Voilà une attitude plus appropriée.

Oh, je n’incite personne à s’encombrer l’esprit de pornographie, ni à verser dans l’industrie du sexe. Je plaide plutôt en faveur de l’ouverture d’esprit, qui donne appétit en la vie. À mon avis, qui est très humble, il faut savoir lire entre les lignes et rire un peu de ce qui est trop sérieux. Le personnage J.-A. de Sève, présenté en p. 9, illustre bien cette philosophie, un peu malgré lui.