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L’agrile du frêne (Agrilus planipennis) est un coléoptère originaire d’Asie et une espèce envahissante en Amérique du nord. Crédit: Guillaume Villeneuve

Entre l’arbre et l’écorce

«L’UdeM répond aux exigences de la réglementation de la Ville de Montréal qui exige d’abattre ou de traiter les frênes selon leur degré d’infestation », explique le porte-parole de l’UdeM, Mathieu Filion. Il précise que 206 arbres seront coupés, tandis que 221 autres seront traités à divers endroits sur le campus. Au moment de la parution, près de 150 frênes ont déjà été abattus sur le campus.

Selon le règlement pour lutter contre l’agrile de la Ville de Montréal, tout frêne mort ou comportant plus de 30 % de branches mortes en cime doit être abattu. « Affaiblis, ils risquent de tomber », commente l’étudiant à la maîtrise en urbanisme Jean-Philippe Plourde. Les larves de l’agrile du frêne se nourrissent du phloème, tissu conducteur de la sève situé sous l’écorce, et créent des réseaux de galeries qui entravent la circulation de la sève dans l’arbre, selon le site Web de la Ville de Montréal. Ainsi, les arbres gravement infestés représentent un danger pour les passants.

Un déboisement nécessaire

L’abattage des frênes est réalisé par l’entreprise Arbo-Design, qui a obtenu le contrat de l’UdeM pour un montant de 115 298,92 $*. Les travaux de coupe, entamés en janvier, s’échelonneront jusqu’au mois de mars. « L’agrile est inactif durant l’hiver et ne se propage pas une fois les arbres coupés », explique M. Filion.

Le président d’Arbo-Design, Sylvain Légaré, explique que les troncs d’arbres sont coupés par section et descendus au sol à l’aide de treuils. « Les souches d’arbres situées dans des secteurs aménagés seront déchiquetées en copeaux de bois au printemps, ajoute-t-il. Les racines laissées dans le sol se décomposent graduellement avec le temps. » Selon le diamètre des morceaux coupés, certains sont envoyés dans des scieries, qui l’utilisent pour des produits d’ébénisterie et d’autres déchiquetés sur place, en copeaux, pour être transformés en bois de chauffage.

Un traitement choc

Les 221 arbres infestés, mais non coupés seront traités à l’été. « Cette phase a lieu entre la mi-juin et la fin août, pour coïncider avec la croissance des larves d’agrile », révèle le président d’Antidote Arboriculture Inc., Bruno Chicoine. Son entreprise a obtenu le contrat avec l’UdeM pour un montant de 21 901,40 $*.

Selon M. Chicoine, le coût de l’insecticide utilisé, TreeAzin, varie entre 100 et 140 $ par arbre. Le traitement, renouvelable tous les deux ans, est injecté directement dans l’arbre à l’aide de capsules déversées dans des trous percés à la base du tronc. « Le produit se propage dans l’arbre grâce à la circulation de la sève, explique M. Chicoine. Les larves d’agriles qui ingèrent l’insecticide ne peuvent plus se métamorphoser et atteindre le stade adulte ».

Minimiser les impacts environnementaux

« L’abattage aura probablement un impact sur l’esthétisme du territoire », pense Jean-Philippe. Bien que l’UdeM se soit engagée, dans un communiqué émis le 22 janvier, à replanter des arbres appartenant à une vingtaine d’espèces indigènes, Jean-Philippe croit qu’il faudra des années pour compenser la perte des frênes abattus.

Il serait possible d’atténuer les effets de la coupe par une plus grande valorisation des matières végétales résiduelles sur le campus, selon l’étudiant en biologie à l’UdeM et président du Groupe de recherche et d’intérêt en développement durable et agriculture urbaine (GRIDDAU), François-Xavier Dessureault. « Le bois sain des frênes coupés pourrait être valorisé dans les projets de Polytechnique, de la Faculté de l’aménagement ou du DESS en design de jeux », suggère l’étudiant. Il propose aussi que certaines souches soient laissées en place dans le sol pour la culture de champignons comestibles.

Le professeur titulaire au département de sciences biologiques, Jacques Brodeur, collabore aux travaux de recherche sur l’agrile du frêne réalisés par le Service de l’environnement de la Ville de Montréal. À l’été 2015, des spécimens de la guêpe parasitoïde de l’espèce Tetrastichus planipennisi, prédatrice naturelle de l’agrile, ont été introduits comme moyen de lutte biologique. « Ces guêpes ont déjà réussi à ralentir l’épidémie de l’agrile dans des forêts américaines », rapporte M. Brodeur. Il considère toutefois qu’il faudra au moins trois ou quatre ans pour connaître l’efficacité de cette guêpe en milieu urbain et son adaptation au climat québécois.

Détecté pour la première fois à Montréal en 2011, l’agrile du frêne s’est rapidement propagé dans tous les arrondissements de l’île, menaçant la survie de plus de 200 000 arbres, selon le site Web de la Ville de Montréal.

*Selon le système électronique d’appel d’offres du gouvernement du Québec

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