Culture

Ensemble contre la peur de l’autre

Une charrette est un atelier où les designers imaginent des concepts qui tentent de répondre à une problématique, le tout en un temps restreint. Une quinzaine d’étudiants de cycles supérieurs en anthropologie et en design effectueront une enquête de terrain au sein de l’Université afin de comprendre comment la peur est exprimée sur le campus. Ils devront ensuite proposer, dès le deuxième jour, des concepts qui répondront à ce problème. « Il y a une dimension de l’inconnu dans cette charrette, car on veut vraiment que les étudiants sortent de leurs idées préconçues pour favoriser l’échange entre les deux domaines », souligne la coorganisatrice de l’événement, anthropologue et postdoctorante en groupe de design et culture matérielle, Solen Roth.

À la fin de la seconde journée, chaque groupe présentera son concept au jury, composé d’un professeur en anthropologie, d’un designer et d’un représentant du Centre de recherche – action sur les relations raciales. Même si la réalisation du projet est incertaine, notamment en raison du financement, l’équipe gagnante remportera toutefois une bourse de 500 $.

Les trois organisatrices de l’événement, étudiantes à l’UdeM, souhaitent favoriser les échanges interdisciplinaires au sein de l’Université. « On essaie de faire en sorte que deux disciplines qui ne se parlent pas forcément travaillent ensemble, précise Solen. Surtout qu’entre anthropologues et designers, je pense qu’il y a un gros potentiel interdisciplinaire. »

Le design et les causes sociales

Pour l’étudiante à la maîtrise en aménagement Liliane Salamé Pichette, cette façon de procéder représente une belle occasion d’enrichir sa vision sur les problématiques sociales. « On a l’habitude d’emprunter des méthodes de terrain à l’anthropologie et à la sociologie, notamment pour faire des entrevues, exprime-t-elle. Mais là, ce sera la première fois que l’on travaillera réellement avec des étudiants en anthropologie ». Selon elle, cette expérience permettra aux designers de profiter de l’expertise des anthropologues pour mieux comprendre leur cible.

Afin de répondre à des problématiques sociales, le professeur agrégé à la Faculté de l’aménagement de l’UdeM et directeur du groupe Design et société, Philippe Gauthier, explique que le design commence d’abord par donner forme au problème. Mais cette démarche ne peut se faire sans une certaine compréhension du monde. Il y a donc une complémentarité entre l’anthropologie et le design. « On apprend des sociologues sur comment faire la critique de la société, et les sociologues apprennent de nous, de notre façon de transformer le monde », explique-t-il.

Selon la directrice du programme en études autochtones à l’UdeM, Marie-Pierre Bousquet, cet échange permet également de respecter les droits de la propriété intellectuelle de certains peuples. « Quand parfois on récupère le design d’autres personnes, car on le trouve beau, on ne se rend pas compte qu’il y a un sens derrière, qu’il soit sacré, spirituel ou autre, précise-t-elle. Donc il y a tout un aspect qu’il faut connaître pour le respecter, et dans ce sens-là, cette interdisciplinarité est excellente ».

Bien que cet événement reste modeste, Solen Roth espère toutefois qu’il favorisera le début d’une discussion entre ces deux disciplines, mais également entre d’autres domaines afin d’inciter les étudiants à ouvrir leurs horizons.

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