Culture

Les évènements principaux de l’exposition ont été traduits sur place par des interprètes de la Galerie. (Courtoisie de la Galerie de l'UQAM)

Des signes et des mots

«Il y a plusieurs facteurs qui nous ont amenés à faire ça », déclare le responsable de la médiation et des communications de la Galerie de l’UQAM, Philippe Dumaine. Outre le thème de l’exposition sur la représentation des émotions collectives lors de révoltes et de manifestations, il ajoute que l’arrivée de Véronique Leduc*, première professeure sourde au Québec, a été déterminante dans l’élaboration de ces dispositifs.

L’accessibilité est un enjeu majeur de l’exposition pour les organisateurs. « Il y a la possibilité pour des groupes qui voudraient faire des visites avec des personnes sourdes de nous contacter, et nous trouverons un interprète qui pourra traduire en simultané », précise M. Dumaine.

Transposition

Souhaitant être la plus accessible possible, la Galerie a fait appel à François Veilleux, interprète au Cégep du Vieux-Montréal, pour traduire les textes de l’exposition. Ensemble, ils ont tourné des capsules en langue des signes, diffusées sur le Web et sur des tablettes mises à disposition du public en salle. Commandés par le philosophe français et historien de l’art Georges Didi-Huberman, les textes d’introduction et de présentation de l’exposition demandent une certaine attention, en raison du langage utilisé, indique M. Veilleux. « Il faut dire que ce n’est pas écrit dans un langage de tous les jours », précise-t-il.

Pour lui, la langue des signes fonctionne par concepts. « Il y a moins de synonymes, mais tout se traduit, poursuit-il. De façon générale, dans toutes traductions, on modifie toujours un peu les mots. » D’une part, car le langage reste subjectif à chacun, mais aussi parce qu’il faut tenir compte de son auditoire et de ses références culturelles, conclut-il. « Par exemple, dans le texte, on parle de la marche des grands-mères en Argentine**, détaille-t-il. On ne peut pas simplement dire : “la marche des grands-mères” Je dois forcément paraphraser pour expliquer le contexte. »

Développer des réseaux

Depuis l’ouverture de l’exposition en septembre, la participation des sourds et malentendants s’avère timide, avoue Philippe Dumaine. « Jusqu’à maintenant, nous n’avons reçu aucun groupe pour des visites, dévoile-t-il. Il faut dire que ce genre d’initiative prend généralement du temps. Il faut que les groupes prennent connaissance de la Galerie, etc. »

Pour Mme Leduc, le manque de fréquentation de la galerie par ces groupes peut être liée a l’histoire de la communauté sourde et malentendante. « Il y a encore beaucoup de travail à faire pour sensibiliser les personnes sourdes elles-mêmes et leur dire : “Ok, je sais que depuis 100 ans, on a été dans un contexte majoritairement d’oppression, mais sachez que maintenant, il y a quand même des gens qui se sont sensibilisés”», note la professeure en action culturelle. Elle précise qu’il ne suffit pas de rendre un contenu accessible. « Il faut aussi faire passer l’information par des relayeurs à travers les médias sociaux, par exemple », indique-t-elle, en invitant à rejoindre le groupe Évènements accessibles en LSQ et/ou ASL, qui sert de relais auprès de la communauté sur Facebook.

* Véronique Leduc a fait l’objet d’un article de QL : « Une pionnière engagée », 14 décembre 2017. ** Le 30 avril 1977, quatorze femmes se sont réunies devant le palais présidentiel en pleine dictature militaire, pour demander la vérité sur le sort de leurs enfants disparus.

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