L’offre de Local Local, l’entreprise qui gère les services alimentaires sur le campus, est de moins en moins abordable pour les étudiant·e·s que Quartier Libre a rencontré·e·s. Selon certain·e·s, payer 16 dollars (toutes taxes comprises) pour un repas complet (plat, dessert et boisson) n’est plus une option envisageable pour dîner.
La plupart des étudiant·e·s client·e·s de la cafétéria se disent en réalité étonné·e·s que les prix soient si élevés. « C’est rendu presque aussi cher qu’un plat payé dans un restaurant (sans pourboire) », constate l’un d’eux.
Plusieurs étudiant·e·s se doutent que l’inflation joue un rôle sur la fixation des prix. « Vu que les prix sont chers partout ailleurs, c’est peut-être normal qu’ils le soient aussi ici, estime un étudiant français en échange. En tout cas, cela change du repas complet à 3,80 euros des restaurants universitaires en France. »
Outre l’incompréhension, c’est aussi un sentiment de frustration qui se fait entendre. « Je ne comprends pas pourquoi, en plus de payer déjà cher le plat du jour, l’option végétarienne n’est pas moins chère que celle comprenant de la viande, s’offusque une étudiante. Ce n’est pas normal de payer aussi cher un service étudiant, alors qu’il est déjà difficile pour nous de joindre les deux bouts financièrement. »
Face à cette hausse des prix, les témoignages des étudiant·e·s semblent montrer un seul souhait : celui de réduire la facture. Ainsi, lorsque certain·e·s confient « grignoter » un muffin accompagné d’un plat fait maison, d’autres avouent cibler les articles en promotion. D’autres encore choisissent d’aller manger dans des chaînes de restauration rapide situées à l’extérieur du campus, puisque les prix y sont souvent moins élevés et les plats plus copieux.
Des prix fondés
Selon le directeur des résidences et de la restauration de l’UdeM, Pascal Prouteau, la hausse des prix s’explique en majeure partie par les coûts de la main-d’œuvre de l’Université, qui sont plus élevés que ceux du secteur privé. Si le salaire minimum s’élève à 15,25 dollars de l’heure, celui pour un employé de l’Université s’élève en effet à environ 22 dollars de l’heure. « J’ai des cuisiniers qui montent jusqu’à 30 dollars de l’heure, et avec les avantages sociaux, ils me coûtent 40 dollars de l’heure », justifie M. Prouteau.
Un second coût important pour la cafétéria s’explique par l’achat des matières premières telles que le poisson ou certaines protéines végétales, achetées fraîches et locales. « On est la seule institution à servir de l’omble chevalier de Montréal [25 dollars le kilo pour le plat du jour] ou du sébaste de Gaspésie », poursuit le directeur.
En cuisinant ces produits coûteux et sujets à l’inflation, M. Prouteau révèle ne faire aucun bénéfice et parfois même vendre à perte. Il précise que cette approche écoresponsable est assez dispendieuse dans la mesure où elle privilégie, par exemple, l’utilisation de tasses à café réutilisables plutôt que celles en plastique ou en carton, nécessitant alors l’emploi d’un plongeur.
Une pente à remonter
Selon M. Prouteau, la cafétéria peine à se remettre de la pandémie et affiche même, depuis cette période, un déficit annuel s’élevant à plusieurs centaines de milliers de dollars. « 60% de mes revenus servent à payer ma masse salariale, tandis que 40% sont dédiés à mes coûts internes. Tout le reste, ma location de camion, les frais d’énergie, ce sont les 500 000 dollars que je perds », détaille-t-il.
Pour combler ces pertes, le directeur des résidences et de la restauration est contraint de diversifier ses sources de revenus en proposant de nouveaux services de traiteur ou d’épicerie de nuit dotés de frigos intelligents. Ces investissements sont pour lui une « bouée de sauvetage » et lui permettent de récupérer certaines pertes accumulées par la cafétéria ainsi que d’éviter tant que possible d’augmenter le prix des articles.
En cas de profit, les recettes sont alors redistribuées dans d’autres services à destination des étudiant·e·s. « Tout l’argent qu’on fait, on le réinvestit dans des travaux liés à la rénovation des résidences étudiantes, souligne M. Prouteau. Dernièrement, nous avons pu installer le wifi, acheter des décorations de Noël ou offrir des activités de massage en période d’examens ».