Volume 26

julien Deschênes. Crédit photo : Benjamin Parinaud.

De l’apprentissage à l’engagement citoyen

«L’UPop a des valeurs très fortes : l’anticapitalisme, le féminisme, l’écologie, raconte l’une de ses organisatrices, Sophie Del Fa. Nous sommes ancrés à gauche, et c’est clairement assumé. » L’université populaire constitue un acte militant, qui, selon elle, se confirme également dans la programmation.

« Nous avons une série de cours comme « Pourquoi suis-je anticapitaliste ? », « Pourquoi suis-je anti-impérialiste ? », explique-t-elle. Donc oui, c’est un acte militant, parce que nous axons le propos des cours vers l’esprit critique et l’engagement citoyen. » Les organisateurs de l’UPop veulent inciter les participants à développer une façon différente de voir le monde, et à utiliser celle-ci dans leur vie quotidienne.

Un certain engagement de la part des personnes présentes dans les cours est perceptible, selon le professeur à l’UPop Julien Deschênes. « Il y a une façon de faire à l’UPop qui est très engagée, je donne dans mes séances des pistes d’action pour agir sur le territoire et sur l’urbanisme », illustre-t-il.

D’après lui, nombreux sont ceux qui veulent passer concrètement à l’action dans leur quotidien. « C’est vraiment donner des outils à la société civile pour qu’elle puisse s’exprimer et être un autre pilier de pouvoir politique », explique-t-il. Selon lui, il s’agit de contrebalancer les pouvoirs politiques en place en apportant des savoirs vulgarisés aux citoyens.

« L’objectif est vraiment de sortir l’éducation des murs de l’Université, d’avoir un esprit critique, et bien évidemment que ce soit gratuit », témoigne Mme Del Fa. Le modèle de l’UPop, créé en 2010, est basé sur celui des universités populaires européennes.

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 Choisir l’Université populaire

«Je suis dans une autre époque de ma vie. J’ai apprécié les cours à l’université, mais là, à la retraite, j’aime cette formule-là, ce n’est pas engageant », témoigne la retraitée Andrée Bérubé, qui participe aux cours de l’organisme depuis plusieurs années.

La structure des ateliers permet, selon elle, le débat, la critique et la discussion. Celle qui a travaillé en révision linguistique cherche aujourd’hui à continuer à s’informer sur divers sujets comme l’économie, la décroissance, la science ou encore la politique. « Je suis retraitée, je veux m’informer, je veux apprendre », affirme-t-elle.

L’architecte et urbaniste française Camille Rivy participe aux cours d’urbanisme de l’UPop pour comprendre le système québécois. « Je suis déjà urbaniste en France et j’ai envie de savoir comment ça marche ici, raconte-t-elle. Je compte vraiment m’intéresser au fonctionnement québécois ». Camille n’a pas accès à l’université au Québec avec son visa actuel. « Je suis donc les cours ici, en attendant de pouvoir aller à l’université », témoigne-t-elle.

Le défi de la diversité

« Ça touche du monde, les gens sont passionnés et intéressés, estime l’organisatrice de l’UPop. C’est quelque chose qui prend de l’ampleur, donc, en ce sens, oui, l’Upop remplit ses objectifs. » Malgré le succès de l’Upop, Mme Del Fa met en avant une éventuelle limite de l’organisme : Celle d’aller toucher les minorités qui n’ont pas forcément accès au savoir. « On reste quand même dans un milieu montréalais de gauche, urbain, éduqué, note-t-elle. Nous [les membres de l’UPop] agissons sur notre propre milieu social et évidemment, nous sommes tous des personnes qui habitons dans le centre de Montréal, qui avons une éducation universitaire. »

Être professeur à l’UPop

« J’ai proposé un cours pour vulgariser les enjeux de l’urbanisme, mais aussi sortir de ce qu’on dit habituellement, raconte Julien Deschênes. Je voulais aller explorer des sujets un peu moins connus et faire ressortir le travail de mes collègues. » Bachelier en science politique à l’UQAM, Julien termine actuellement une maîtrise en urbanisme à l’UdeM.

D’après lui, les cours à l’UPop se veulent accessibles à tous, des novices aux experts. « Il y a quand même une partie théorique, mais on essaye de vulgariser le plus possible pour qu’une personne qui ne connaît rien à l’urbanisme puisse comprendre, et que ça intéresse aussi celles qui ont un savoir plus pointu », explique-t-il.

Le modèle de l’UPop s’articule autour d’ateliers, de discussions ou de toute autre forme d’enseignement s’éloignant des cours magistraux. « Les cours de l’UPop sont parfois un peu plus expérimentaux, comme observer des artistes faire leur répétition d’une pièce de théâtre, par exemple, dit Julien. Il y a tellement de manières d’apprendre et de véhiculer du savoir ! » Pour lui, cette façon d’enseigner est complémentaire à celle du système classique.

Investir l’espace public

Le choix des lieux où se déroulent les cours a également son importance. Pour Julien, le cadre informel du bar ou du café met les gens plus à l’aise et favorise la discussion. « Il y a beaucoup d’espace pour que les gens puissent participer, alors que dans une salle de classe, ça a tendance à être un peu plus magistral : on écoute le professeur qui donne sa leçon », témoigne-t-il.

Sophie Del Fa insiste sur la volonté de nouer des partenariats avec des lieux qui leur tiennent à cœur. « C’est le cas du Bâtiment 7, de la librairie Zone Libre, de la coop MaBrasserie ; finalement, de tous des lieux qui partagent nos valeurs », conclut-elle. D’après elle, accueillir l’UPop est une manière pour ce type d’établissement de montrer sa volonté d’engagement citoyen et d’engagement politique.

 

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