Volume 27

D’abord le bien-être, ensuite l’action

Lors de la première rencontre du collectif LPSUdeM de l’année, le 5 septembre dernier, un espace qualifié « d’amour et d’eau fraîche » par ses membres a été introduit au début de la réunion. Les personnes présentes ont été invitées à partager brièvement leur état d’esprit du moment.

« Ça part de la volonté des militants de prendre soin d’eux, et je pense que ça va être de plus en plus présent », affirme l’étudiant au baccalauréat en études internationales à l’UdeM Louis Couillard. Aux côtés de trois étudiants des universités de Sherbrooke, de Concordia et de l’UdeM*, Louis vient d’être élu porte-parole d’une nouvelle coalition qui regroupe désormais trois associations étudiantes pour l’environnement. « Ce n’est pas vrai qu’on va gagner cette lutte-là si on est brûlés », déclare-t-il.

Louis Couillard (à gauche) et Léa Illardo (à droite), sont les porte-paroles de la nouvelle coalition aux côtés de l’étudiant à la maîtrise en science politique à l’UdeM Marouane Joundi, et de l’étudiante à l’Université de Concordia, Ashley Torres.  Photos : Archives Quartier Libre | Zacharie Routhier
Louis Couillard (à gauche) et Léa Illardo (à droite), sont les porte-paroles de la nouvelle coalition aux côtés de l’étudiant à la maîtrise en science politique à l’UdeM Marouane Joundi, et de l’étudiante à l’Université de Concordia, Ashley Torres.
Photos : Archives Quartier Libre | Zacharie Routhier

Un manque d’écoute

Selon la candidate à la maîtrise en études politiques appliquées à l’Université de Sherbrooke, Léa Ilardo, le manque d’écoute et d’empathie au sein de l’organisme n’a pas rendu la tâche facile lors des prises de décision importantes, comme lorsqu’il a fallu décider s’il fallait ou non rencontrer le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charette, au printemps dernier. « Il y a eu des réunions horribles, il faut le dire », confie celle qui est egalement porte-parole de la coalition. Elle soutient qu’il est impossible de militer sur la durée si les gens ne prennent pas soin d’eux-mêmes et des autres.

« Le mouvement a vraiment commencé vite, tout a déboulé l’an passé », raconte l’étudiant au baccalauréat en anthropologie Émile Moreault, qui fait partie des membres fondateurs du collectif LPSUdeM. «  Il y a du monde qui se sont brûlés », confie-t-il. Il ajoute que la dimension bien-être n’avait pas été prise en considération. « Il y avait clairement un besoin de s’épauler, d’être ensemble et de se parler », affirme-t-il.

Prendre soin de soi et des autres

La professeure titulaire au Département de science politique de l’UdeM et experte sur les mouvements sociaux et l’action collective en perspective comparée, Pascale Dufour, estime que « la notion de care est répandue depuis longtemps dans les mouvements féministes. »

« Je vois la mission du comité Care comme un comité de support et de cohérence à l’égard de nos principes », explique l’étudiant au baccalauréat en philosophie de l’UdeM et membre de Care, Henri Herman Vézina. Il soutient que le comité bien-être en est au stade embryonnaire, mais qu’il est déjà porteur des valeurs d’inclusion et de respect du mouvement. « D’un point de vue pragmatique, c’est nécessaire pour permettre au mouvement de respirer », ajoute-t-il en insistant sur l’importance d’un climat inclusif au sein du mouvement.

La manifestation du 27 septembre ne sera plus qu’étudiante, mais intégrera l’ensemble de la société civile. Photos : Archives Quartier Libre | Zacharie Routhier
La manifestation du 27 septembre ne sera plus qu’étudiante, mais intégrera l’ensemble de la société civile.
Photos : Archives Quartier Libre | Zacharie Routhier

Risques de surmenage

« Lorsqu’on parle de militants, on fait souvent référence au fait qu’on doit se donner corps et âme pour faire avancer la lutte, précise Mme Dufour. La surcharge et la souffrance militante font partie de la mobilisation et elles sont très difficiles à contenir. »

Léa confie avoir connu un état d’épuisement sans pareil au lendemain de la grande manifestation du 15 mars 2019. « J’appréhende un peu le mois », avoue-t-elle, alors que le prochain coup d’éclat est prévu pour le 27 septembre.

« J’ai beaucoup travaillé ces derniers mois, je n’ai pas eu de break », raconte Louis, qui a hésité avant de briguer le poste de co-porte-parole de la nouvelle coalition. Léa et lui se disent toutefois encouragés par les nouvelles recrues et s’entendent pour dire que le nombre de personnes impliquées a augmenté depuis l’an dernier.

Partir du bon pied

« J’ai été agréablement surpris de voir qu’on prenait le temps de se regarder dans les yeux, de se présenter et de juste être ensemble », confie Émile. « On essaye de faire en sorte que ça s’imprègne partout », soutient Léa, qui a donné une formation sur le bien-être militant au congrès jeunesse de LPSU juste avant la rentrée scolaire. Pour elle, la dimension de la notion care est indispensable à la réussite du mouvement.

Louis pense même que ce sont les jeunes qui vont montrer l’exemple aux autres groupes de citoyens unis pour l’environnement. « Nous, les étudiants et étudiantes, allons pousser les autres à avoir des pratiques de bien-être dans le mouvement », affirme-t-il.

Mme Dufour ajoute que « beaucoup de luttes ont été menées sans prendre en compte cet élément ». Elle donne pour exemple le mouvement ouvrier. « Ça pose toutefois la question de la continuité du mouvement, du fait que celui-ci puisse se renouveler, ne pas disparaître », nuance-t-elle. Selon la professeure, c’est le gage d’une plus longue survie.

« On a beaucoup de pain sur la planche d’ici le 27 septembre, mais si on instaure un climat où on se sent bien, ça change tout », soutient Léa. C’est comme ça que les gens vont revenir à la prochaine réunion. »

L’appel à une manifestation nationale a notamment été entendu par la jeune militante suédoise Greta Thunberg, qui sera présente à Montréal le 27 septembre prochain.

* Les autres porte-paroles de la coalition sont : l’ancienne étudiante de l’UdeM et candidate à la maîtrise en études politiques appliquées à l’Université de Sherbrooke Léa Ilardo, l’étudiant à la maîtrise en science politique à l’UdeM Marouane Joundi, et de l’étudiante à l’Université Concordia Ashley Torres,.

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