Controverses à l’Université d’Ottawa : le recteur de l’UdeM brise le silence

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Par Edouard Ampuy
jeudi 22 octobre 2020
Controverses à l’Université d’Ottawa : le recteur de l’UdeM brise le silence
« Je considère la parole universitaire comme libre. Aucun mot n’est interdit dans le contexte d’une recherche de la vérité et du juste […] Personne ne peut m’en priver. », affirme le recteur de l'UdeM, Daniel Jutras. Crédit : Roméo Mocafico
« Je considère la parole universitaire comme libre. Aucun mot n’est interdit dans le contexte d’une recherche de la vérité et du juste […] Personne ne peut m’en priver. », affirme le recteur de l'UdeM, Daniel Jutras. Crédit : Roméo Mocafico

Dans un courriel intitulé « Liberté d’expression : une réflexion collective à mener », le recteur de l’UdeM, Daniel Jutras, s’exprime, à la première personne, sur les récentes controverses qui secouent l’Université d’Ottawa. Le recteur y défend l’idée d’une parole universitaire libre et invite la communauté udemienne à participer à une réflexion collective.

 Depuis la suspension d’une professeure de l’Université d’Ottawa pour avoir prononcé « le mot en n » lors d’un cours, le débat s’enflamme autour de la liberté de la parole universitaire.

« Ces derniers jours, j’ai été invité à prendre position dans le débat actuel à différentes reprises, explique le recteur. J’hésite à le faire. J’ai des convictions, bien entendu. Elles m’appartiennent. En les énonçant, je ne parle pas au nom de l’Université. » Il ajoute être conscient que son statut lui confère une portée dépassant sa personne.

Une parole universitaire libre

Dans son courriel, M. Jutras aborde le problème en faisant référence à son ancienne expérience de professeur*. Prenant particulièrement soin d’expliquer aux lecteurs qu’il s’agit de son propre point de vue, il expose deux conditions qui prévalent dans sa salle de cours : le pluralisme idéologique et le respect de la dignité des uns et des autres.

Le recteur se porte à la défense d’une parole universitaire libre. « Je considère la parole universitaire comme libre, affirme-t-il. Aucun mot n’est interdit dans le contexte d’une recherche de la vérité et du juste […] Personne ne peut m’en priver. » Il nuance néanmoins ses propos dans la phrase suivante : « Mais elle ne doit pas occulter ma responsabilité individuelle, comme acteur du monde de l’enseignement supérieur, de réfléchir à mes pratiques pédagogiques. »

Engagé une conversation collective

M. Jutras observe que les récents évènements compliquent la tenue d’un dialogue serein. « Le débat sur la liberté d’expression à l’université et sur le respect de la dignité des individus et des collectivités qui la composent s’est enlisé dans des affrontements sans nuances », précise-t-il.

S’il explique avoir lui-même engagé une réflexion sur le sujet, il fait part de son souhait de voir la démarche devenir collective. « Le temps est venu pour l’Université de Montréal d’engager une conversation libre, ouverte, respectueuse et pluraliste sur le sens de ses valeurs fondamentales de liberté d’expression, de libre discours, de pensée critique, d’accueil de l’altérité et de respect de la dignité. », poursuit-il.

M. Jutras compte, au cours des prochains mois, inviter la communauté universitaire à réfléchir à ces enjeux. « Je compte amorcer cette conversation dès la séance de l’Assemblée universitaire du 2 novembre », annonce-t-il.

Le courriel du recteur fait suite au débat sur la suspension de la professeure Verushka Lieutenant-Duval de l’Université d’Ottawa, après qu’elle a prononcé le « mot en n » lors d’un cours sur les représentations des identités sexuelles. Mme Lieutenant-Duval a depuis été autorisée à reprendre son cours.

*Daniel Jutras a enseigné le droit à l’Université McGill de 1985 à 2020.