Contrer les rechutes de leucémie infantile

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Par Guillaume Mazoyer
lundi 27 février 2017
Contrer les rechutes de leucémie infantile
Crédit: Flickr.com | Qimono
Crédit: Flickr.com | Qimono
Quartier Libre met en lumière une découverte scientifique étudiante dans le cadre de la série « Vulgarisation ». Dans ce numéro, l’étudiante au baccalauréat honor en sciences médicales de l’UdeM, Dominique Geoffrion, membre de l’IRIC dirigé par Dre Trang Hoang, a contribué à la découverte d’un composé capable de cibler les cellules responsables des rechutes du cancer infantile le plus répandu au Canada, la leucémie aiguë lymphoblastique (LAL).

Quartier Libre : Qu’avez-vous découvert ?

Dominique Geoffrion : Nous avons trouvé un composé – des molécules – qui affecte les cellules à la base des rechutes de la LAL. Avec la chimiothérapie conventionnelle, on cible une population de cellules sans traiter les racines du problème, soit un petit réservoir de cellules qui est la source de tous les maux puisqu’il est responsable des rechutes. Cela impliquait qu’on atteigne les bonnes cellules sans attaquer celles normalement tuées par la chimiothérapie et sans affecter les cellules saines.

Q.L. : Quelle est la prochaine étape ?

D.G. : Le composé fonctionne sur les souris et les modèles in vitro. La prochaine étape serait, bien sûr, de faire des études cliniques avec des patients, mais nous ne sommes pas encore rendus là. Nous avions une bibliothèque de composés déjà approuvés, ce qui a fait en sorte que nous n’avions pas besoin de passer par un ensemble de réglementations pour de nouveaux éléments dont on ne connait pas les effets sur la santé humaine. On est parti de cette bibliothèque dont les composés sont bien connus par les autorités canadiennes. Celui qu’on a trouvé est décrété sain pour l’humain, ce qui accélère les processus pour les études cliniques.

Q.L. : Comment avez-vous trouvé ce composé, et quel est-il ?

D.G. : Partons du début. Une cellule humaine possède une architecture intérieure. C’est comme si la Tour Eiffel était entourée d’une bulle de plastique. La cellule serait la bulle et la Tour Eiffel serait l’architecture. Cette dernière est composée de plusieurs éléments, les microtubules, essentiels dans le processus de divisions de petites cellules. Quand les cellules cancéreuses apparaissent, elles se sont déjà divisées à de nombreuses reprises. La recherche contre le cancer vise ainsi les microtubules, dans la mesure où plusieurs composés empêchent que cette Tour Eiffel ne grandisse. C’est le cas de notre composé, le 2ME2, qui empêche le processus de division. Pour le trouver, nous avons utilisé ce qui s’apparente à un jeu d’échec. Chaque case, au lieu de pions, contient des composés issus de la bibliothèque approuvée par les normes canadiennes, ainsi que des cellules leucémiques de souris. Nous avons obtenu ensuite beaucoup de résultats pour un grand nombre de composés, nous avons analysé ce qui se passe dans chacune de ces cases, puis nous avons découvert que le 2ME2 diminue la viabilité des cellules cancéreuses responsables des conditions de rechute.

Q.L. : Y a-t-il d’autres applications à votre recherche ?

D.G. : Nous avons aussi mis au jour une façon très novatrice d’étudier les composés et la résistance à la chimiothérapie. Nous avions la technique de l’échiquier, mais si l’on met une cellule cancéreuse toute seule dans une case, celle-ci meurt. Il faut donc faire croire à la cellule qu’elle est encore dans le corps de la souris. C’est là où nous avons fait une percée. Nous la mettions dans un bain de cellules ressemblant à l’environnement de la souris, auquel nous rajoutions le composé, en respectant la « niche ». Nous avons réussi à étudier les cellules tirées directement des souris et à mimer ce qui se passe dans un organisme vivant. Nous avons donc trouvé un composé spécifique mais également une technique qui peut être réutilisée pour d’autres recherches.

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