L’entrepreneur Édouard Reinach « veut permettre aux gens qui travaillent et qui n’ont pas la possibilité d’aller manifester de se mobiliser contre la hausse des frais de scolarité ». Sur le site Internet Fondrouge.org qu’il a conçu, on échange un dollar contre chaque pixel d’un carré blanc qui se remplit lentement de points rouges. Les dons seront intégralement reversés au financement de la campagne de publicité contre la hausse des frais de scolarité.
Avec 4 415 $ en un peu moins d’un mois, la récolte est moins généreuse que ce qu’avait espéré Édouard Reinach, 27 ans, qui prévoyait au minimum 6000 $. Mais le défi est en partie relevé puisque la majorité des 263 donateurs ne sont pas des étudiants. Les dons vont de 1 à 100 $ pour une moyenne de 17 $ environ. Ils sont accompagnés du nom et d’un message des acheteurs de pixels : « je suis fière de cette jeunesse qui s’implique socialement », « Parce qu’avec 1625 $ de hausse, je ne serais pas allé l’université. Le Québec a besoin de diplômés, pas d’endettés », peut-on lire dans la rubrique Donateurs du site.
Édouard Reinach n’en est pas à son premier coup en matière de militantisme étudiant. En 2005, il était président de l’Association des étudiants du Collège de Rosemont et menait ses troupes en grève pour une première dans l’histoire du collège. L’année suivante il gérait l’après-grève à la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) en qualité de coordonnateur aux relations et communications. Aujourd’hui entrepreneur, il n’oublie pas la cause étudiante.
« Je pense qu’on avancerait plus vite si les entreprises prenaient part au débat, plaide Édouard Reinach. Le gouvernement néolibéral pense uniquement en termes économiques, et tant que les acteurs majeurs de l’économie ne s’impliqueront pas, on n’aura rien.» Il a donc pris les armes en mettant à la disposition du projet Fond Rouge son agence de communication interactive, Hypractif, qu’il a lancée en 2010.
Au-delà des étudiants
«On veut montrer ce que l’éducation représente comme investissement économique et social, résume Édouard Reinach, dont l’équipe tourne actuellement le spot publicitaire. On veut montrer que la meilleure manière de modifier le régime des prêts et bourses est que les étudiants n’en aient pas besoin.» Plus les contributions seront importantes, plus la diffusion du film sera large, explique M. Reinach, alors que la date de lancement n’est pas encore fixée. Sur LaPresse.ca et Tou.tv, les plates-formes que Fond rouge a choisies comme supports de la future campagne de pub, 1000 visionnements coûtent entre 30 et 60 dollars.
«On va toucher les lecteurs d’actualités et la population des plus de 35 ans. On veut aussi toucher les gens qui vivent en région, qui sont généralement moins pro-étudiants qu’à Montréal», explique M. Reinach. Une vidéo plus longue sera également disponible sur Youtube, prête à être partagée sur les réseaux sociaux.
Après la manifestation du 22 mars, le gouvernement est plus enclin à négocier, selon M. Reinach. Pour l’équipe bénévole de Fond Rouge, c’est le moment de frapper : «La période des négociations, c’est là qu’il faut rallier l’opinion publique à ta cause.»
le rouge passe au vert
Le projet Fond Rouge a déjà fait un petit. Sur la toile, le site carrevert.ca propose, non sans ironie, d’acheter un « prestigieux carré vert en feutre» en soutien à la hausse des frais de scolarité, pour la modique somme de 1625 $ ou par cinq paiements faciles de 325 $ en référence à l’augmentation prévue par le gouvernement Charest.