Volume 18

Combattons pour la paix

Aux concepteurs de jeux vidéo,

Éviscérer/émasculer/énucléer son prochain n’est pas la vocation de tous. Le marché est inondé de titres ne cherchant à se démarquer des autres que par la quantité d’hémoglobine qui éclabousse gratuitement (les portefeuilles ne partagent pas cet avis) à l’écran. Une telle stratégie marketing peut amener certains à penser : «Je n’aime pas les jeux vidéo parce qu’ils sont violents» (autant dire «je n’aime pas le cinéma parce que le jeu d’acteur du gouverneur de Californie n’a jamais atteint la profondeur d’une flaque d’eau»). Certains OVNI (Objets Vidéoludiques Non Identifiés) offrent pourtant bien mieux. Nous avons donc mené une opération choc: enlèvement et séquestration de la Violence elle-même. Celle-ci restera détenue dans un cadre horriblement pacifique jusqu’à ce que nos exigences soient prises en compte. Ces revendications sont simples:

Nous voulons des OVNI créatifs. Little Big Planet, par exemple, revêt la forme d’un jeu de plateformes au design unique. L’intérêt majeur du titre est de proposer un incroyable outil d’édition de niveaux (un peu de créativité !). Les possibilités sont presque infinies et les créations sont 100 % partageables gratuitement sur Playstation Network, ce qui confère en plus au jeu une durée de vie uniquement limitée par l’imagination des autres joueurs (Little Big Planet 2 sort le 16 novembre prochain). Nous souhaitons également des OVNI intelligents, comme Portal 2, un FPS (jeu de tir à la première personne) qui propose tout sauf l’essence habituelle de ce genre. Le personnage n’aura pour but que de sortir des étranges salles aseptisées dans lesquelles il évoluera en altérant les lois de la physique: gravité inversée, téléportation et autres paradoxes seront en effet les outils appropriés pour sortir des casse-tête corsés que propose le titre. Le véritable défi ne sera pas de trucider des péniches entières de soldats russes, mais bien de mobiliser vos neurones sans vous arracher les cheveux devant la complexité du jeu (Portal 2 sort le 2 février prochain).

Nous revendiquons le droit à l’esthétisme et à la pédagogie. Regardez Hakuna Matata, OVNI qui nous emmène en terre africaine armés d’un… appareil photo. Oui, nous parlons bien d’un safari-photo. Impossible ici de blesser ou d’abîmer quoi que ce soit (même en roulant avec un véhicule, nous avons essayé). Le jeu, développé en collaboration avec le National Geographic, présente une faune superbement animée et des paysages qui laissent sans voix (Hakuna Matata est déjà disponible).

Enfin, nous aspirons à la liberté d’être matures. C’est ce que nous offre Deus Ex : Human Revolution. Au-delà d’un scénario futuriste profond et d’un graphisme léché, le jeu offre un choix rarement vu dans la manière d’aborder les situations rencontrées. Tirer sur tout ce qui bouge (ou ne bouge pas), s’introduire n’importe où sans laisser la moindre trace ou user de psychologie, armé de son seul bagou, l’approche est totalement libre. En vous laissant le choix d’agresser ou non, le jeu offre la maturité de tracer votre propre voie. Gandhi aurait apprécié (Deus Ex: Human Revolution sort en mars 2011).

Nous pensons que les jeux ont bel et bien plus à offrir que les clichés sanglants et stupides auxquels ils sont généralement associés. Le plaisir de détruire reste la tendance (discutable) dans le monde vidéoludique, mais vous ne pourrez plus dire que vous ne pouvez rien concevoir d’autre que les «schwarzies» habituels. Accédez à ces requêtes avec diligence si vous souhaitez revoir la Violence en un seul morceau. Il vous reste 24 heures avant que nous commencions à lui couper les orteils.

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