Chronique d’un malaise annoncé

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Par Thomas Martin
jeudi 29 novembre 2018
Chronique d’un malaise annoncé
Dans la vie, tout est une question de choix. (Crédit photo : pxhere.com I Creative Commons CC0)
Dans la vie, tout est une question de choix. (Crédit photo : pxhere.com I Creative Commons CC0)

Tout est une question de choix.

Ils guident nos vies et nous font avancer. Parfois on se trompe, parfois non, mais le sentiment que ces choix nous appartiennent est toujours là. On a évoqué cette idée avec la légalisation du cannabis. Quelques années avant, le mariage homosexuel. L’impression d’avancer dans le bons sens. Puis tu reçois une lettre un beau matin. Et cette impression s’efface…

Alors qu’est-ce qui est le plus dérangeant dans cette histoire ? L’évènement en lui-même et le sentiment que le choix n’existe plus ou cette culture qui consiste à faire passer le groupe avant les intérêts de chacun ?

Une culture enracinée

À entendre certains témoignages, on se croirait dans un film américain. Le groupe et l’institution au dessus de tout. Une attitude assez contradictoire avec les valeurs prônées en Amérique du Nord, à bien y regarder. Ici, où la liberté individuelle est sacralisée, l’intérêt du groupe passe avant le reste. Quitte à faire des déçus.

L’absence de choix n’est jamais clairement formulée, mais c’est tout comme. Une façon de faire quasiment plus malsaine. La psychologie sociale définit cela comme de la soumission librement consentie. Une pression mentale sans obligation formelle.

Dans notre cas, la mécanique consiste à culpabiliser la personne pour les besoins de l’équipe. « C’est organisé par vos coéquipiers, donc s’il vous plaît, ayez un peu de respect envers eux », indique l’un des messages. Que vient faire le respect ici ? Respecter le choix de chacun de participer ou non me semble autrement plus important. Probablement une question de point de vue…

Il est écrit dans le code d’éthique des Carabins* que l’entraîneur-chef s’engage à « respecter l’autonomie, les opinions et les désirs des autres lors de prises de décisions qui les affectent ». La même injonction est faite aux étudiants qui intègrent l’équipe. Des dispositions louables, encore faut-il les mettre en pratique.

Changer les choses

Il faut changer la culture qui entoure la pratique du cheerleading. Ce sont des athlètes, et l’affiliation automatique au monde du football doit cesser. Pour la petite histoire, l’équipe de cheerleading est entrée dans le giron des Carabins en 2010. À l’époque, l’entraîneure-chef disait la chose suivante** : « […] le réseau universitaire offrira assurément de la visibilité et contribuera à changer la perception des gens face à notre sport qui gagne à être connu. » Huit ans plus tard, les mentalités n’ont pas évolué et l’association au football reste tenace, malgré les résultats de l’équipe***.

Les mentalités, justement. Les associations de l’UdeM travaillent à les changer, en récompensant les activités d’accueil les plus respectueuses et inclusives. Oui d’ailleurs, on dit activités d’accueil et non plus initiations. La sémantique est importante pour changer les mentalités. Alors pourquoi ne pas commencer à parler d’athlète plutôt que de cheerleader ? Les étudiantes s’inscrivent pour la pratique sportive. Pas pour agiter des pompons sur le bord de la pelouse.

En Formule 1, les grid girls**** ont disparu des paddocks. Il serait peut-être temps d’en faire autant pendant les matchs de football. C’est aussi ça, changer les mentalités.


 

* Code d’éthique des entraîneurs des Carabins de l’Université de Montréal, Site Éducation et Enseignement supérieur.

** Site officiel des Carabins, le 2 mars 2010, « Le cheerleading fait son entrée officielle chez les Carabins ».

*** L’équipe de cheerleading des Carabins a remporté le championnat provincial l’an dernier. Vidéo explicative à voir sur notre site, « Mieux comprendre le cheerleading ».

**** Jeunes femmes présentes sur la grille de départ pour tenir l’ombrelle des pilotes.