Changer le ton de la littérature scientifique

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Par Etienne Galarneau
lundi 16 avril 2018
Changer le ton de la  littérature scientifique
Pascale Lehoux explique que le palindrome est un mot ou un groupe de mots que l’on peut lire indifféremment de gauche à droite et de droite à gauche, tout comme le magazine qui propose des allers-retours de la littérature à la santé et de la santé à la littérature. À sa droite, Frédérique Dubé. (Crédit photo Romeo Mocafico)
Pascale Lehoux explique que le palindrome est un mot ou un groupe de mots que l’on peut lire indifféremment de gauche à droite et de droite à gauche, tout comme le magazine qui propose des allers-retours de la littérature à la santé et de la santé à la littérature. À sa droite, Frédérique Dubé. (Crédit photo Romeo Mocafico)
Palindrome, un magazine alliant la littérature et les sciences médicales, lance son premier numéro le 11 avril. Derrière cette publication semestrielle se cache une équipe de chercheurs basés à l’UdeM qui souhaitent explorer les modes de transfert de l’information.

Le projet, initié par la professeure à l’École de santé publique (ESPUM) Pascale Lehoux, a pour objectif de transmettre l’information issue de recherches scientifiques d’une manière nouvelle. « Pour les chercheurs, c’est comme un autre exercice de traduction, explique-t-elle. Ce n’est pas juste simplifier, ce n’est pas juste vulgariser, ce n’est pas juste expliquer. C’est utiliser un véhicule qui frappe, qui touche, qui fait rouler l’imaginaire. »

En faisant rimer l’exercice littéraire avec les avancées dans le domaine de la santé, l’équipe de Palindrome vise à susciter des discussions ainsi qu’à toucher la sensibilité des lecteurs et leurs différentes dimensions humaines. « La première idée, c’est que les individus ne sont jamais une seule chose, soulève Mme Lehoux. On peut découvrir des plombiers qui sont passionnés d’opéra, on peut découvrir des dentistes qui font des arts martiaux et on peut avoir des secrétaires qui sont des passionnés de musique. »

Défis de création

Afin de parvenir à ce mariage entre les formes littéraires et le contenu scientifique, les rédacteurs doivent s’approprier le matériel issu des recherches. « Les écrivains ont reçu des articles scientifiques et de la littérature grise [NDLR : documentation provenant d’institutions extérieures du monde de l’édition commerciale] pour se faire une tête sur les thématiques qui ont été choisies, met en relief l’agente de recherche à l’ESPUM et coordonnatrice de la revue, Frédérique Dubé. Après, on leur donne quand même pas mal carte blanche. Les écrivains ont toute la place qu’il faut pour créer, mais ils savent que leurs textes doivent rester courts. »

L’approche littéraire peut toutefois constituer un défi pour le lecteur, soulève le chercheur au Petrie-Flom Center for Health Law Policy, Biotechnology and Bioethics de Harvard et membre du comité scientifique de Palindrome, Jean-Christophe Bélisle-Pipon. « Quand j’ai révisé le premier numéro, je me suis mis dans la posture de ma tante Gertrude, illustre-t-il. Je me suis dit : “Est-ce qu’elle va comprendre ? est-ce qu’elle va trouver ça pertinent ? est-ce que ça pourrait même la repousser, que ce soit littérature et sciences ?” Ce n’est pas La Voix. La littérature, ce n’est pas nécessairement toujours sexy. Elle peut même être vue de façon connotée ou péjorative. » Ce dernier soutient néanmoins que les auteurs de la revue parviennent à trouver un équilibre dans leur démarche entre l’information et le style.

Pour Jean-Christophe, l’exercice de la revue diffère de celui d’autres publications scientifiques, mais demeure intéressant pour le public. « Si je reste dans un monde traditionnel, je dirais que ça peut avoir l’air moins sérieux ou crédible, mais le monde de la recherche doit réussir à intéresser différents publics, remarque-t-il. Donc, il faut moduler le niveau de langage, le vocabulaire, la précision et le degré de nuance dans lequel on peut rentrer. »

Le premier numéro du magazine est disponible dans des points de distribution localisés à Montréal, à Trois-Rivières et à Québec. Mme Lehoux souhaite cependant que son projet soit pérenne et puisse, éventuellement, rejoindre les gens de la francophonie canadienne et internationale.


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