Opinions

Brisons le silence sur ce qui se passe dans notre université

Nous réagissons à la suite des évènements du 12 janvier dernier qui ont eu lieu au HEC de Montréal, alors que des dizaines de policiers du SPVM assuraient “la sécurité” dans le cadre d’une conférence du président du Conseil du trésor Martin Coiteux. Dans pareille situation, l’appel aux forces de l’ordre constitue une décision inacceptable. Une situation qui, loin d’être isolée, semble maintenant tendance, notamment quand nous pensons à la présence démesurée du SPVM lors de la conférence de Pierre-Karl Péladeau à l’UdeM, le 27 novembre 2014. En effet, depuis la grève étudiante de 2012, les visites de policiers ou la présence d’agents de sécurité se font de plus en plus régulières et insistantes et majoritairement dirigées vers les pavillons des sciences humaines.

La présence policière sur notre campus est non seulement une entrave à la liberté d’expression politique des étudiants, mais aussi un manquement grave à la mission de l’université qui est d’être un lieu de débat et de confrontation des idées. Comment peut-on organiser une conférence d’un député ayant pour thème « L’avenir de l’éducation supérieure au Québec » et ne voir aucun problème à ce qu’il y ait une cordée de policiers pour filtrer ceux qui peuvent ou non y assister ? Et en vertu de quoi au juste la sécurité juge-t-elle qui est admissible ou non ? D’un costar et d’une cravate ? Parce que lors de la conférence de Coiteux, des étudiants du HEC qui, même en présentant leur carte étudiante, se sont vu refuser l’accès à l’établissement de façon préventive : s’ils ne présentaient pas de manière visible des signes de distinction par rapport aux étudiants et syndiqués qui manifestaient devant, les policiers ne les laissaient pas entrer. Profilage certes, et ça ne s’arrête pas là. La présence policière sur nos campus universitaires se termine habituellement avec des interventions musclées et arbitraires, mais aussi ciblées.

Conférence privée donc ? Police privée donc ? Est-ce parce qu’on se situe dans une position revendicative ou inférieure au sein des relations hiérarchiques de l’Université, soit syndical soit étudiante, que l’on est d’autant plus exclu de ses instances de légitimation et de consécration ? – Mr. [sic] Breton, on se souvient encore des fouilles isolées lors de notre collation des grades –. La visibilité choquante de la coopération entre l’administration et le service de police ne fait qu’entretenir un climat de méfiance au sein de la communauté universitaire. La présence policière ne fait qu’envenimer l’indignation et comme nous l’avons vécu lors des dernières semaines, c’est-à-dire dans une atmosphère d’indifférence générale, c’est d’autant plus violent !

Voilà pourquoi nous demandons à l’administration de cesser de recourir à la présence policière et sécuritaire contre les actions politiques sur le campus. Voilà pourquoi nous proposerons lors de notre prochaine assemblée générale un mandat similaire à celui déjà adopté par le passé par l’Association des étudiants en musique : « Considérant la dérive autoritaire de nos institutions d’enseignement, que l’AEDLLM tombe automatiquement en grève dès qu’une intervention policière a lieu au sein d’un établissement d’enseignement quel qu’il soit pour une durée de 24 heures, renouvelable, aussi longtemps que nécessaire pour se réapproprier nos lieux ». Nous osons espérer qu’un tel mandat saura faire boule de neige.

Alexandra Croze-Harvey et Anaïs Gagnon
Étudiantes au baccalauréat en littératures et langues modernes

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