Breton, Rimbaud et Rivard

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Par Etienne Galarneau
jeudi 14 décembre 2017
Breton, Rimbaud et Rivard
(Crédits: Flickr.com | photographymontreal)
(Crédits: Flickr.com | photographymontreal)
J’aime parfois penser que le recteur, Guy Breton, est un grand amateur du groupe Beau Dommage. Lorsque la session d’hiver se termine, qu’il dise « On se reverra le 7 janvier » et qu’il aille écouter l’album Où est passée la noce ? sur sa table tournante. L’aiguille touche le disque et on entend la voix de Michel Rivard chanter « En ’67, tout était beau, c’était l’année de l’amour, c’était l’année de l’Expo… » C’était l’année de la charte, c’était l’année de la rampe.

Dans cette fiction, M. Breton serait tombé lors des dernières vacances des Fêtes sur un recueil de Rimbaud. Ses yeux auraient glissé sur le texte Adieu. « Il faut être absolument moderne », aurait lu le recteur.

Exit la nostalgie, il faut regarder vers l’avenir. En janvier 2017, l’Assemblée universitaire s’est rapidement acharnée sur un nouveau projet de charte. Peut-être trop rapidement, souligna d’ailleurs le Syndicat général des professeurs de l’UdeM (SGPUM). Sauf qu’il faut avancer. Le 6 décembre, le recteur, le secrétaire général et la chancelière de l’Université ont été en commission parlementaire pour défendre le projet monté durant l’année. Il faut être absolument moderne.

Au début du mois de décembre, le tunnel de la rampe n’est plus, il est remplacé par le « tunnel de la montagne ». Escaliers roulants, écrans d’information, bornes interactives, lumières DEL. Les travaux ont pris un an de plus que prévu et la communauté universitaire est passée par les cinq phases du deuil. Mais l’UdeM devait être absolument moderne.

Pour en finir avec l’obsolescence programmée

Saluons la modernité. Certainement que le souffle de renouveau trouve ses origines ailleurs que dans ma petite histoire de fiction. Ces projets prennent du temps à concervoir et s’échelonnent sur des années. Mais on se demande, par contre, si les lunettes roses avec lesquelles Michel Rivard regarde les années 1960 ne sont pas les mêmes que les anciennes administrations ont trop longtemps portées. Elles ont dû se dire : « En 1967, tout était beau, donc a-t-on réellement besoin de faire une mise à jour de nos décisions prises à l’époque ? »

Et finalement, oui. On doit parfois faire des mises à jour. C’est ce genre de réflexions qui entraînent de grands chantiers. La rampe, la charte, le pont Champlain même ! Une fois que la décision de changer est prise, l’opinion publique est ravie. « Il faut être absolument moderne, dit-on. Merci de changer ce qui est vieux et défraîchi. »

Puis, viennent les répercussions des chantiers. En ligne, l’UdeM devient la risée de ses étudiants avec la prolongation d’un an des travaux de la rampe, qui sont perçus comme une éternité. Le SGPUM a maille à partir avec le projet précipité de charte et les débats accaparent l’essentiel des activités de l’Assemblée universitaire entre janvier et mai. La circulation sur le pont Champlain fait faire des cauchemars à des gens qui ne sont même jamais venus à Montréal de leur vie.

Tout un tracas qui aurait pu être évité si la mise à jour était continuelle. Plutôt que d’entreprendre des projets avec une date de péremption inhérente, il vaudrait mieux en préparer des durables avec un entretien régulier. Les nouveaux escaliers mécaniques du tunnel de la montagne en sont un bon exemple.

C’est très facile pour moi de dire, une fois que le mal est fait, qu’on aurait dû faire les choses autrement. Gardons en tête les avancées de l’année pour les années futures. Maintenant qu’on sait, en tant que communauté, les torts que peuvent causer des désirs de modernité trop expressifs, on peut avancer avec des initiatives plus flexibles, qui peuvent évoluer avec la société. Dans un futur proche, on pourra penser à ce qu’on a entrepris cette année en se disant : « En 2017, tout était beau… »

Etienne Galarneau