Quarante-trois ans après leur séparation, les Beatles sont toujours prétendants au titre de groupe de musique le plus important de l’histoire. Le professeur d’histoire et de musicologie des musiques populaires à l’Université Paris-Sorbonne Olivier Julien sera à l’UdeM pour donner deux conférences le 30 avril et le 2 mai prochains dans le cadre des Belles Soirées. Ce sera l’occasion de discuter de l’influence toujours aussi marquée du Fab Four.
« Ce que j’espère faire, c’est de donner au public des clés qui lui permettront d’évaluer la contribution des Beatles à l’histoire des musiques populaires du XXe siècle », affirme Olivier Julien, qui est d’ailleurs l’auteur d’une thèse de doctorat sur les Beatles. « Je veux replacer leur carrière dans une perspective historique, en la contextualisant, mais aussi en entrant dans le détail de certaines des pratiques musicales qu’ils ont inaugurées », ajoute-t-il.
M. Julien souligne l’innovation, mais aussi le succès durable des Beatles. « Il va sans dire qu’un demi-siècle après qu’ils se sont fait connaître du grand public, bien peu de musiciens populaires peuvent se targuer d’une telle constance dans le succès, lance-t-il. Dans cette catégorie, je ne vois que Frank Sinatra et Elvis Presley. »
L’une des causes de la grande notoriété des Beatles est leur capacité à innover et à se réinventer, croit le spécialiste. « Il est certain que la capacité des Beatles à se renouveler, année après année, parfois même d’album en album, a contribué à entretenir l’intérêt du public tout au long de leur carrière », affirme M. Julien.
Selon le professeur de sociologie de la musique à l’UdeM Danick Trottier, les Beatles ont aussi été propulsés par une stratégie commerciale redoutable de leur impresario, Brian Epstein, et de leur producteur, George Martin. « Dès leurs débuts, les Beatles lancent un disque 45 tours par trimestre et deux albums par année, explique-t-il. Le duo s’organise aussi pour que le groupe soit sans cesse en tournée. » À titre d’exemple, les Beatles ont donné 227 concerts en 1963. Cette intensité va demeurer jusqu’au 29 août 1966, date à laquelle les Beatles concluront, à San Francisco, leur dernière tournée.
La phase studio
À partir de ce moment, le groupe se consacre au studio afin de s’attaquer à la production de sons expérimentaux. « Dès Help!, en 1965, ils commencent à délaisser les paroles simples et les chansons d’amour, et ils décident d’innover de chanson en chanson, affirme M. Trottier. Ceci se poursuit sur Rubber Soul (1965) et Revolver (1966) pour arriver au point culminant de Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band (1967). » Selon le musicologue, cet album incarne « l’esthétique du rock psychédélique ».
L’étudiant de troisième année en musicologie à l’UdeM Étienne Galarneau a réalisé un travail dirigé de plusieurs mois qui touchait notamment à l’album Sgt. Pepper’s. « Cet album représente le début de la période studio, mais aussi le dernier effort de collégialité du groupe, explique Étienne. Le fait que les paroles se trouvent dans la pochette est aussi signe qu’elles étaient devenues beaucoup plus complexes. »
Pour M. Julien, le fait que les Beatles aient connu une première période rock and roll suivie d’une seconde période d’expérimentation témoigne de leur créativité et de leur impact. « Il est d’ailleurs probable que, s’ils n’avaient jamais pris la décision d’expérimenter en studio, ils n’occuperaient pas la place qui est aujourd’hui la leur au panthéon de la musique populaire », affirme le spécialiste. Outre Sgt. Pepper’s, le travail en studio des Beatles a permis de créer les albums Magical Mystery Tour, The Beatles ou « l’album blanc », Abbey Road et Let it Be.
Les Beatles ont profité de la prospérité économique de l’après-guerre, de la présence des baby-boomers et d’une société occidentale en mutation. « La musique des Beatles canalisait une énergie sociale au début des années 1960, affirme Danick Trottier. C’est l’arrivée des médias de masse, et les jeunes ont un pouvoir financier qui leur permet de profiter d’une société de loisirs en allant dans les drive-in et en écoutant les juke-box. »
Enfin, Olivier Julien remarque la popularité durable de John, Paul, George et Ringo. « Je me souviens qu’en 2000, la parution de la compilation 1 a fait des Beatles les plus gros vendeurs de disques de l’année, rappelle M. Julien. Je constate, d’année en année, que les jeunes générations continuent d’apprécier leur musique. » Tous ceux qui désirent encore nourrir leur intérêt pour les Beatles pourront d’ailleurs se rendre au Musée Pointe-à-Callière pour assister à l’exposition Les Beatles à Montréal jusqu’au 30 mars 2014.
Les Beatles et la révolution des musiques populaires dans les années 1960
Belles Soirées de l’UdeM
30 avril et 2 mai 19 h 30
Pavillon 3200, rue Jean-Brillant