Sans attendre la manifestation prévue pour le 10 novembre, l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE) appelle les étudiants à se mobiliser et à boycotter les bancs de l’université à la session d’hiver. Elle consacre à la grève générale illimitée (GGI) un numéro entier dans son journal L’Ultimatum. Est-ce prématuré ?
Pour le porte-parole de l’ASSE, Gabriel Nadeau-Dubois, la mise en place d’une telle mesure nécessite de « commencer dès maintenant les réflexions et les débats pour que les étudiants ne soient pas pris par surprise ». Selon lui, la manifestation du 10 novembre ne suffira pas à faire plier le premier ministre Jean Charest. La menace d’une GGI sera un poids supplémentaire dans la balance, explique-t-il, tout en espérant que le gouvernement recule sur la hausse de 1625 $ sur cinq ans des frais de scolarité.
Pour réussir une telle grève, la mobilisation doit être importante. « Il est certain que l’ASSE ne pourra pas gagner cette lutte seule », déclare Gabriel Nadeau-Dubois, avant d’ajouter que l’Association n’a pas non plus l’intention d’attendre l’appel à la grève des autres fédérations.
Gabriel Nadeau-Dubois explique qu’une coalition, la CLASSE, sera mise en place afin de permettre aux associations étudiantes non affiliées à l’ASSE d’avoir un droit de vote aux assemblées générales. Même recette donc que pour la grève de 2005, où la coalition était cette fois-ci la CASSEE.
Gabriel Nadeau-Dubois espère réunir au moins sept associations étudiantes, réparties sur trois campus et regroupant 20000 étudiants.
En dessous de ce seuil, la GGI devra être abandonnée, explique-t-il. Le même plancher avait été fixé, et atteint, par l’association en 2005.
L’association regroupant à elle seule plus de 40000 étudiants, il est donc probable qu’en l’absence d’une volte-face du gouvernement, la GGI soit lancée.
Stéfanie Tougas et Martine desjardins s’opposent à la grève pour l’instant
La grève générale illimitée n’est pas à l’ordre du jour des autres grandes associations étudiantes québécoises.
« Il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs », déclare la présidente de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ), Martine Desjardins.
Selon elle, le recours à ce genre de grève est un moyen ultime qui pourrait décourager les étudiants les plus modérés.
La priorité de Martine Desjardins est d’informer les étudiants des actions qui ont déjà été mises en place, d’expliquer les enjeux et de continuer à mettre la pression sur le gouvernement, par le biais des députés notamment.
Un avis partagé par la secrétaire générale de la Fédération des associations étudiantes du campus de l’UdeM (FAECUM), Stéfanie Tougas. Selon elle, le mouvement commence à provoquer des réactions chez les députés libéraux. « Ils ne savent plus quoi nous répondre, explique-t-elle. Ça commence à faire mal au Parti libéral.» Pour Martine Desjardins et Stéfanie Tougas, ce n’est pas le rôle de leur fédération respective d’appeler à la GGI.
C’est aux étudiants de faire leur choix dans les assemblées générales de leur association.
Pour Martine Desjardins autant que pour Gabriel Nadeau-Dubois, la grève est un sacrifice pour les générations à venir. Si Martine Desjardins estime que le temps n’est pas venu pour une mesure si radicale, Gabriel Nadeau-Dubois considère plutôt que le jeu en vaut la chandelle. « Si au Québec les frais de scolarité sont aussi bas, c’est parce que par le passé des gens ont fait ce sacrifice, explique-t-il. Va-t-on être la génération qui va rompre cette tradition de lutte ? »