«Être cinéaste, c’est être magicien, c’est faire des miracles », croit Francis Binet. Pour son deuxième court métrage, qui aborde le thème de la danse, le cinéaste a collaboré avec la chorégraphe Chloé Bourdages-Roy. Déracinement est d’ailleurs l’adaptation d’un spectacle de danse de cette dernière : Relocation. « Le film s’est imposé de lui-même, inspiré de l’histoire de Chloé, affirme Francis. Elle venait de quitter la maison familiale dans laquelle elle a passé toute son enfance et elle avait peur de perdre ses racines. »
Le cinéaste montréalais de 24 ans s’initie à l’analyse filmique pendant ses études en communication au Collège Montmorency. Sa nouvelle passion le pousse ensuite vers des études cinématographiques à l’UdeM. L’excitation de réaliser lui-même ses films l’a alors propulsé derrière la caméra. « Sans sa détermination, Francis se serait fait écraser par le poids de ses responsabilités », estime son ami et étudiant en études du jeu vidéo Alex Ferraz.
La professeure adjointe au Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques de l’UdeM Elene Tremblay félicite le travail du jeune cinéaste.« Que ce film ait été sélectionné par le Festival du nouveau cinéma est déjà un accomplissement en soi, assure-t-elle. Le public du festival saura en apprécier toute la finesse et l’originalité, et il est tout à fait possible que ce film soit primé. »
Filmer le langage de la danse
Pour réaliser son court métrage, Francis Binet a d’abord tourné les scènes d’intérieur dans un appartement à Montréal, puis a posé sa caméra en plein milieu d’une érablière. Dans chacun de ces univers, on observe des corps déambulant sur une musique concrète.« Des danseurs exécutent une chorégraphie à l’intérieur d’une structure en bois évoquant celle d’une maison aux murs ouverts, explique Chloé . L’une des interprètes quitte le confort de cette structure et les autres l’accompagnent dans son cheminement. »
Il s’agit de la deuxième collaboration entre la chorégraphe et le cinéaste, qui s’étaient déjà retrouvés sur le projet d’Analepses, court métrage qui explore deux univers liés par l’histoire de sept femmes. « Ce tandem interdisciplinaire danse-cinéma est garant de l’originalité de ce film, où le rapport à l’espace et au cadre est réfléchi de façon très créative, estime Elene Tremblay. Déracinement donne à réfléchir sur les limites et les définitions de ce que sont l’intérieur et l’extérieur. »
Diriger des danseurs a été un véritable défi pour le cinéaste, qui a fini par se prendre au jeu. « La danse est un langage particulier, indique Francis. C’est raconter une histoire avec des mouvements. Faire un film sur la danse nécessite beaucoup de préparation, et faire les raccords dans le mouvement est un exercice très difficile. Pour passer d’un espace à un autre, chaque plan est réfléchi, calibré. » Selon Chloé, la vidéo est un moyen de combattre l’aspect éphémère de la danse. « Réaliser permet aussi de diriger précisément le regard du spectateur, que ce soit vers une partie du corps du danseur ou vers un mouvement précis dans la chorégraphie », assure-t-elle.
Francis aimerait un jour voyager avec son travail et pouvoir vivre des films qu’il réalise. Avec Déracinement, il signe une métaphore de l’expérience humaine en société, qui laisse le spectateur libre de toute interprétation, le corps exprimant ce sur quoi les mots demeurent muets.
Déracinement
Projection dans le cadre du FNC
Salle J.A. DeSève
1453, rue MacKay
17 octobre à 13 heures