À la croisée des beats

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Par Justin D. Freeman
mardi 22 février 2011
À la croisée des beats

Le dubstep, ça vous dit quelque chose ? Ce genre musical tout droit sorti des bas-fonds londoniens combine électro, tempo lent et décoiffage. Si le style s’impose peu à peu sur la scène musicale internationale, le dubstep vit peut-être sa crise d’adolescence. Entre la médiatisation et la volonté de rester une contre-culture, les acteurs se déchirent.

Le dubstep semble être une espèce de point de rencontre pour les boulimiques de musiques contemporaines. Un genre de chaînon qui manquait jusqu’alors entre les nombreux styles électroniques. La culture dubstep, à l’image de sa génération numérique (« née » avec Internet) est encore jeune : elle a du mal à figer son identité. De sa crise de conscience, le genre musical fait des petits, brostep et UK Funky en tête. Le premier est un style bâtard, plus agressif et plus puissant. Le second, au contraire, se nourrit d’influences latines pour un résultat teinté de dance, de Soca et de RnB. L’écossais Kode9, par exemple, grand artisan du dubstep plutôt drum and bass des premières années, s’y est d’ailleurs rallié.

Les nombreuses mutations du genre se distinguent à l’oreille. En 2009 apparaît l’influence du purple sound, des bruits issus de vieilles consoles de jeux vidéo et d’ambiances aux courbes galactiques. En 2010, les sons fracassés influencés par l’électro se sont imposés. L’an 2011 signera le retour du grime selon Construct. Autant de sonorités qui laissent les adeptes des soirées rythmés plutôt intrigués.

Construct, l’architecte montréalais

Construct, c’est Marc, un Acadien de 28ans quiporte—il faut le dire — plutôt bien son pseudonyme. Il a participé à l’établissement de la contre-culture dubstep à Montréal. Nourri au hip-hop et au métal, il s’est tourné vers l’électro. Parcours typique, banal et insignifiant ? Pas si sûr. La culture dubstep, c’est avant tout ça : des gens de tous les horizons qui se réunissent sous une même bannière novatrice.

Construct débarque dans la métropole il y a deux ans. Il commençait tout juste à s’intéresser au dubstep. Aujourd’hui, son nom est omniprésent dans la sphère dubstepienne et se manifeste particulièrement sur Internet. Son site jaimeledubstep.com et la webradio dubstep.fm, où il coréalise une émission avec Vilify, sont ses interfaces principales. Cette partenaire, il la retrouve aussi derrière les platines, lors des soirées Bass Drive Wednesdays, au bar Le Belmont sur Saint-Laurent. Seule soirée hebdomadaire montréalaise entièrement consacrée au genre, un plateau d’artistes dubstep s’affichent chaque mercredi sur l’avant-scène.

Si Construct s’affiche aujourd’hui comme un pionnier du milieu, c’est grâce au fruit de longues heures à fouiller le net et à faire son apprentissage sur une culture à une époque où la scène dubstep était encore inexistante en Amérique du Nord. Aujourd’hui, force est de constater que ce genre musical gagne du terrain : en novembre der- nier, l’Étasunien Skrillex, grande vedette signée sous le label Sony BMG remplissait le Club Soda, une première à Montréal pour un artiste dubstep.

Dub-quoi ?

Le dubstep est à la musique ce que la fondue chinoise est à la cuisine. comprenez qu’il y a quelques principes de base, mais qu’on peut y ajouter à peu près n’importe quoi. né dans la banlieue Londonienne il y a tout juste dix ans, le bouillon du dubstep tient à peu de choses : un tempo entre 130 et 140 battements par minute et un rythme de batterie simple sur le modèle kick-snare: une alternance de grosse caisse et de caisse claire. À l’intérieur de ce squelette syncopé, vous pouvez retrouver des saxophones modulés par des artifices électroniques, mais aussi des accords de synthétiseurs électro-funk, ou encore des nappes mélodiques saccadées à l’emporte-pièce… il n’y a pas de standard !

Historiquement, le dubstep est le descendant du speed garage et de la house, mais les rythmes sont plus proches de la black music : hip-hop pour les percussions et reggae- dub pour ses lignes de basse. Et si d’aventure un rappeur s’essaye sur une production dubstep, ça devient du grime.

En bref, le dubstep c’est fait pour ceux qui n’arrivent pas à choisir entre l’électro FM jugée pas assez virile et la techno hardcore qui l’est trop.

Quelques définitions

SOCA : étymologiquement il s’agit d’une contraction des mots soul et calypso dont le soca descend. c’est un genre musical caribéen, très porté sur la danse et extrê- mement populaire à trinidad-et-tobago.

SPEED GARAGE: aussi appelé uk Garage. c’est un genre de musique électronique d’origine anglaise. son tempo est proche de celui de la house (entre 120 et 135 bPM), mais les bases rythmiques chaloupées se rapprochent plutôt de celles du reggae-dub et de ses contre- temps.

GRIME : L’aventure d’un rappeur sur une production dubstep.