Le mouvement Youth & Students for Independence, non relié à un parti politique, a été le groupe militant le plus actif au cours de la campagne référendaire. Le groupe a mobilisé des associations locales des quatre coins du pays à partir de leur quartier général situé à Glasgow, la seconde région ayant voté le plus favorablement pour le oui (55 %).
Les Youth & Students vont même jusqu’à s’autoproclamer la « Génération Oui ». « Aucun historien n’oserait parler au nom des jeunes, dont les réalités sont très variées, explique l’historien et ancien professeur au cégep du Vieux-Montréal Émile Grenier-Robillard. Oui, les jeunes étaient majoritairement favorables à l’indépendance, mais il y avait des jeunes dans le camp du non aussi. »
Sur le terrain, la présidente du Mouvement des étudiants souverainistes de l’UdeM (MÉSUM), Catherine Fournier, a remarqué surtout une forte implication des étudiants. « Les jeunes étaient extrêmement dynamiques au cours de cette campagne, soutient l’étudiante en sciences économiques qui s’est rendue en Écosse dans le cadre d’une mission d’observation avec 47 autres membres du Réseau Québec-Monde. Plusieurs débats et conférences étaient organisés dans les universités. » Elle souligne aussi que la participation des plus jeunes a été remarquable puisque le droit de vote a été réduit de 18 à 16 ans pour l’occasion.
Toutefois, une des principales associations étudiantes, la National Student Union (NUS) [NDLR : un peu l’équivalent de la FEUQ au Québec] ne s’est pas positionnée et a seulement incité les étudiants écossais à voter, peu importe leur allégeance. « Même si nous sommes restés neutres sur la question de l’indépendance, cela ne veut pas dire que nous étions neutres sur le type de société que nous voulons voir , raisonne le président de la NUS, Gordon Maloney. Quel que soit le résultat, nous voulions voir une Écosse plus juste, qui a à cœur ses étudiants et sa jeunesse. »
Au Québec, le dernier référendum sur l’indépendance, tenu en 1995, avait pourtant amené les principales associations étudiantes à se positionner pour le camp du Oui. La FEUQ avait notamment obtenu l’appui de 70 % de ses membres pour promouvoir la souveraineté dans le cadre du référendum. Du côté de l’UdeM, un sondage interne avait aussi permis à la Fédération des associations étudiantes du campus de l’UdeM (FAÉCUM), de s’engager dans la campagne en faveur du Oui.
Si une campagne référendaire était déclenchée au Québec, la FAÉCUM procéderait probablement de la même façon qu’en 1995 pour déterminer sa position.« Nous consulterions nos membres démocratiquement, affirme le coordonnateur aux affaires externes, Nicolas Lavallé. Ce serait aux associations de déterminer quelle forme prendrait cette consultation. » Avec un mandat majoritaire accordé au parti Libéral, il doute toutefois qu’un référendum soit pour bientôt.
Priorités discordantes
Au Québec comme en Écosse, l’implication des jeunes dans la campagne a contribué à alimenter le débat social, selon Émile Grenier-Robillard. « Ce qui est certain, c’est que leur mobilisation a offert une expérience démocratique intéressante pour tout le pays », précise l’historien.
En Écosse, le référendum a, par exemple, accentué les différences intergénérationnelles sur le plan social. Selon les arguments du mouvement Youth & Students for Independence, la garantie de conserver une accessibilité aux études universitaires passait par l’indépendance du pays. L’éducation supérieure gratuite en Écosse résiste toujours à la hausse imposée par l’Angleterre en 2012-2013. Une année scolaire y coûte en moyenne 8 500 livres, soit environ 13 500 $ CAN.
Les Écossais âgés de 60 ans et plus étaient les plus réfractaires à la séparation du Royaume-Uni. 63 % d’entre eux auraient voté pour le non, selon un sondage YouGov au lendemain du scrutin. L’argument le plus répété du côté de cette génération était celui de l’instabilité financière et du risque pour l’octroi des pensions de vieillesse.
Malgré la défaite, Catherine Fournier n’hésite pas à parler des leçons que peuvent tirer les jeunes souverainistes québécois de l’organisation du Oui en Écosse. « Il faut absolument aller rejoindre toutes les couches de la société civile », affirme la présidente du MÉSUM. Selon elle, l’idéal souverainiste doit s’élever au-dessus des partis politiques.