L’UdeM s’est constitué un solide patrimoine artistique au fil des ans. De nouvelles œuvres s’ajouteront à sa collection avec l’ouverture prochaine du campus Outremont, qui sera soumis à la Politique d’intégration des arts à l’architecture et à l’environnement (politique du 1 %).
Instaurée officiellement en 1981, cette politique est imposée aux projets de construction de lieux publics. Elle exige qu’environ 1 % des budgets de plus de 150 000 $ alloués par le gouvernement soit destiné à l’incorporation d’œuvres artistiques de tous genres. L’objectif visé par le ministère est de soutenir la création artistique au Québec et d’enrichir le quotidien de la population grâce à la participation des artistes.
À ce jour, sept œuvres intégrées au campus de la Montagne de l’UdeM ont été créées dans le cadre de cette politique. On compte parmi les travaux récents le Parallélépipède d’Yves Gendreau qui a accompagné la construction du pavillon J.-Armand-Bombardier en 2004. L’immense muraille de bois qui occupe l’atrium du pavillon Jean-Coutu fait également partie du lot. Il s’agit de l’œuvre Osmose, de l’artiste Yéchel Gagnon.
Avec le projet de construction du futur campus Outremont, plusieurs avenues sont envisageables pour cette intégration artistique. Certains projets récents font preuve d’audace et d’originalité.
Selon le professeur au Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques de l’UdeM Peter Krausz, l’Université pourrait décider d’intégrer de nouvelles technologies dans le paysage artistique du campus Outremont. « Au Québec, les œuvres du 1 % évoluent avec le temps et s’adaptent aux nouvelles technologies, précise-t-il. Je suis convaincu que des œuvres issues de l’art numérique, des vidéos ou des installations interactives seront intégrées au campus Outremont. »
La professeure en histoire de l’art Suzanne Paquet, qui travaille notamment sur l’art public, croit que le campus Outremont pourrait opter pour de l’art relationnel et communautaire. Ce type d’art consiste à impliquer directement les usagers des lieux à la création de l’œuvre. « L’artiste agit à titre de médiateur culturel, explique-t-elle. Par exemple, les étudiants participeraient à son élaboration avant même qu’elle ne soit installée. » Elle évoque les plantes en métal de l’œuvre L’Étreinte exposée aux habitations Jeanne-Mance et pour laquelle l’artiste Luce Pelletier a consulté les résidants.
L’art performatif est aussi un choix à considérer. En décembre dernier, la première œuvre performative de l’histoire de la politique du 1 % était présentée dans l’édifice 2-22, au centre-ville de Montréal. L’artiste Thierry Marceau a séjourné durant trois jours dans les vitrines du bâtiment accompagné d’un comédien déguisé en coyote. D’autres apparitions sont prévues dans les cinq prochaines années.
L’Université sera-t-elle ouverte à accueillir une œuvre aussi avant-gardiste? « Une œuvre performative pourrait avoir sa place, croit Suzanne Paquet. Mais il faudra d’abord voir l’intérêt que ça suscite, car c’est encore très frais comme concept. » L’étudiante à la maîtrise en histoire de l’art Gabrielle Mathieu partage aussi cet intérêt. « L’intégration d’une œuvre performative mettrait en valeur le côté innovateur de l’Université, et pourrait permettre aux étudiants de participer au projet comme médiateurs de l’œuvre », suggère-t-elle.
Une sélection minutieuse
Peter Krausz a lui-même participé à la réalisation de diverses œuvres dans le cadre de la politique du 1 %, notamment pour le Musée Pointe-à-Callières et pour l’Hôpital général juif de Montréal. Il affirme que, selon son expérience, la sélection de l’œuvre est démocratique et bien organisée. « Le processus est long et minutieux, explique-t-il. On retient habituellement deux artistes qui présentent leur maquette, et la meilleure l’emporte. »
Le ministère de la Culture et des Communications forme le comité de sélection de l’œuvre, qui comprend l’architecte du projet, un membre du ministère, un spécialiste désigné par le ministère, un représentant des usagers (étudiant ou personnel, par exemple) et un représentant de l’Université.
Si la politique du 1 % permet d’enrichir le paysage artistique de l’UdeM, la collection actuelle constitue un patrimoine à préserver. La professeure agréée à l’École d’architecture Claudine Déom déplore qu’à l’exception des sept œuvres subventionnées, plusieurs créations ont un besoin criant d’entretien.
« Un mur de béton derrière le pavillon Roger-Gaudry a été construit en collaboration avec l’artiste Jean Noël Poliquin, souligne-t-elle. Ce travail monumental est très peu connu, et le mur tombe en ruine. » Coauteure du livre Le campus, le patrimoine architectural et paysager de l’Université de Montréal, Mme Déom a exploré l’UdeM dans ses moindres détails. Selon elle, la protection des œuvres existantes doit être une priorité.
Le campus de Laval
Le campus de Laval n’est pas soumis à la politique du 1 % puisque l’immeuble est en réalité une location. Depuis son inauguration en septembre 2011, aucune œuvre artistique n’y a été intégrée par l’UdeM. Les vitrines du pavillon offrent toutefois une vue directe sur la place Claude-Léveillé où se trouve un carillon de 5 mètres, contenant 25 cloches, installé par la Ville de Laval.