Manger à sa faim à l’heure pandémique

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Par Alexis Drapeau-Bordage
dimanche 5 décembre 2021
Manger à sa faim à l'heure pandémique
La Banque alimentaire a dû revoir son mode de fonctionnement à cause de la pandémie. Crédit photo : Anaïs Amoros
La Banque alimentaire a dû revoir son mode de fonctionnement à cause de la pandémie. Crédit photo : Anaïs Amoros
La Banque alimentaire de l’UdeM offre de l’aide alimentaire aux étudiants et aux étudiantes de l’Université depuis 2014. Elle fait face à un nouveau défi ces derniers mois: continuer d’offrir le meilleur service possible en tenant compte des restrictions sanitaires liées à la pandémie
« Désormais, les bénéficiaires rentrent au compte-gouttes, prennent leurs deux bacs, les vident, donc ils ne peuvent plus vraiment choisir de prendre ou de ne pas prendre un produit.»
Arielle Acosta Perelman, coresponsable des communications de la Banque alimentaire

Quand manger à sa faim est encore un enjeu de taille… La Banque alimentaire vise à contrer l’insécurité alimentaire de la communauté étudiante de l’Université de Montréal, de Polytechnique Montréal et de HEC Montréal, en offrant de la nourriture chaque semaine. L’organisation indique avoir distribué 155 tonnes de nourriture au cours de l’année universitaire 2019-2020.

Les aliments proviennent de Moisson Montréal, un organisme qui s’occupe de redistribuer la nourriture que les supermarchés n’ont pas vendue à différentes banques alimentaires. « C’est le plus gros distributeur pour les banques alimentaires de Montréal », déclare la coresponsable des communications de la Banque alimentaire, Arielle Acosta Perelman. La quantité et la qualité des produits peuvent donc être inégales, puisqu’elles dépendent des récoltes de Moisson Montréal.

Les étudiants et étudiantes qui souhaitent bénéficier de ce service doivent déposer deux documents en ligne pour s’inscrire : une preuve d’inscription à la session en cours à l’UdeM, à HEC Montréal ou à Polytechnique Montréal, ainsi qu’une preuve de revenus. Cette dernière doit démontrer que la personne vit avec un montant inférieur à 21 132 $ par an (pour un ménage composé d’une personne seule) afin d’être admissible. Ce montant peut fluctuer en fonction du taux d’inscriptions et de l’inflation.

Des paniers bien remplis

Une fois que la Banque alimentaire a approuvé les demandes, les bénéficiaires sont invités à se rendre à l’aire de collecte dans la cafétéria du pavillon Jean-Brillant. Sur place, ils récupèrent leurs denrées et repartent généralement avec un panier qui totalise, selon Mme Acosta Perelman, entre 18 et 20 kg d’aliments par semaine.

L’étudiant à la maîtrise en informatique Nihal Banday s’amuse à découvrir de nouveaux produits dans son panier. « Je connais environ 95 % des aliments qu’ils servent, mais il y a certains légumes verts que je vois pour la première fois, témoigne-t-il. En utilisant Google Lens [NDLR : un programme de reconnaissance d’images développé par Google] pour les identifier, je peux trouver des recettes. »

Un modèle revisité

Lorsque la pandémie a frappé, la Banque alimentaire a dû revoir son mode de fonctionnement. Mme Acosta Perelman explique qu’à la suite d’un bref arrêt des distributions après l’annonce du premier confinement, l’organisation a repris du service quelques semaines plus tard, puisque celui-ci a été considéré comme essentiel.

La Banque alimentaire a toutefois dû adapter les consignes procédurales afin de tenir compte des risques de contamination à la COVID-19. D’abord, les bénéficiaires n’ont plus eu la possibilité d’un « libre accès » aux produits. « Avant, les étudiants faisaient le tour d’une table à une autre et ils prenaient ce dont ils avaient besoin, détaille Mme Acosta Perelman. Avec la pandémie, on ne pouvait plus laisser les gens circuler librement comme ça. Désormais, les bénéficiaires rentrent au compte-gouttes, prennent leurs deux bacs, les vident, donc ils ne peuvent plus vraiment choisir de prendre ou de ne pas prendre un produit. »

De plus, les étudiantes et étudiants qui profitent du service sont actuellement répartis en « groupes de passage ». La Banque alimentaire explique que l’objectif est de limiter à 12 le nombre de personnes présentes en même temps dans la salle de collecte.

La Banque alimentaire de l’UdeM offre de l’aide à un nombre de bénéficiaires variant entre 65 et 95 par semaine. Crédit photo : Anaïs Amoros

Ainsi, à la suite des inscriptions, qui se font en ligne chaque dimanche de 14 heures à 17 heures, les candidates et candidats retenus se voient attribuer une heure précise à laquelle se présenter le lundi pour faire la collecte des denrées alimentaires. Ils y récupèrent l’entièreté du contenu de deux boîtes de nourriture préparées à l’avance par les bénévoles. Lorsque Quartier Libre s’est rendu sur les lieux le lundi 8 novembre dernier, tous les groupes ont récupéré leurs denrées en moins d’une heure.

La pandémie n’a pas seulement changé la vie de la communauté étudiante, elle a aussi changé celle des bénévoles. Mme Acosta Perelman explique que leur nombre a été réduit presque de moitié. « On n’a pas besoin de plus de bénévoles avec la nouvelle méthode, assure-t-elle. Avant, nous étions une vingtaine, contre 13 aujourd’hui. La charge de travail qui est demandée est sensiblement la même. »

Inscriptions en baisse

Actuellement, les bénévoles de la Banque alimentaire de l’UdeM admettent offrir de l’aide à un nombre de bénéficiaires variant entre 65 et 95 par semaine, alors qu’ils en aidaient le double avant la pandémie. Ce changement ne vient cependant pas d’un refus des demandes de la part de l’organisation. Cette réduction du nombre de bénéficiaires viendrait, selon la coresponsable des communications du service, d’une baisse d’inscriptions à celui-ci, laquelle s’expliquerait, d’après elle, par le fait qu’un bon nombre des bénéficiaires étaient des étudiantes et étudiants étrangers retournés dans leur pays. Pour elle, le défi du moment est de faire augmenter le nombre d’inscriptions, même si les publicités semblent ne pas suffire. L’étudiant Nihal Banday estime pourtant que l’inscription est très facile.

L’étudiante à la maîtrise en études internationales Marcela Busnardo dos Santos a pour sa part commencé à bénéficier de ce service en septembre 2021. Elle trouve le contenu des boîtes suffisant et se réjouit du fait qu’en général, les produits soient variés. Le panier typique contient en effet de grandes quantités de fruits et légumes, de riz, de fèves, de lait, de pain et de fromage.

Malgré tout, la Banque alimentaire attend un retour de son ancien mode de fonctionnement. Mme Acosta Perelman estime que celui-ci était beaucoup plus efficace en ce qui a trait au gaspillage alimentaire. À l’heure actuelle, les bénéficiaires sont obligés de prendre des produits qu’ils ne consommeront pas forcément, tels que des pintes de lait, ce qu’elle déplore.

D’autres formes d’aide alimentaire

La Banque alimentaire n’est pas le seul service visant à aider les étudiants et les étudiantes qui vivent une situation d’insécurité alimentaire. D’autres services, comme la campagne des paniers de Noël de l’Action humanitaire et communautaire (AHC) de l’UdeM, ont le même objectif. Cette année, l’AHC a pour but de récolter suffisamment de dons pour offrir l’équivalent de 500 paniers de Noël, soit 100 000 $ sous forme de cartes-cadeaux valables en épicerie. « En moyenne, 50 % des demandes proviennent de parents étudiants », souligne le conseiller à l’AHC, Martin Rioux, également responsable de la campagne des paniers de Noël. La boutique En Vrac, une initiative étudiante, située au pavillon Marguerite-d’Youville, cherche de son côté à offrir une solution écologique et abordable pour la communauté étudiante, en lui offrant une quarantaine de produits en vrac.

 

 

En collaboration avec David Fillion.