Volume 20

La confiance peut être mauvaise conseillère

Nous avons de la difficulté à estimer nos chances de réussite dans nos études, selon le professeur d’économie à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Louis Lévy-Garboua. Il a présenté, le 15 novembre dernier, les résultats d’un jeu éducatif  qu’il a conçu.

Quartier Libre : Qu’avez-vous découvert à propos de la confiance des élèves ?
Louis Lévy-Garboua : Nous avons pu évaluer la confiance en soi des élèves pendant le jeu. On ne naît pas confiant, on le devient en fonction de ce qu’on arrive à faire. Nous avons observé que les gens tendent à sous-estimer leur capacité à réussir une tâche facile. Par contre, les élèves vont surestimer leurs performances pour les tâches plus difficiles.
De plus, nous nous sommes rendu compte que les gens ne connaissaient pas ou connaissaient mal leur capacité à accomplir
une tâche. Le résultat est donc paradoxal : plus de choix peut être pire que moins de choix.

Louis Lévy-Garboua (Crédit : Cirano)

Q. L. : Devrait-on enlever le choix de carrière aux étudiants ?
L. L.-G. : C’est envisagé dans certains pays. En Belgique, à cause du manque de place, on assigne les gens aux études supérieures en partie au hasard. Je ne suis pas certain de vouloir que le destin de mon fils ou de ma fille soit déterminé par le simple hasard. Je n’en tire pas de conclusion politique. Le système que je préconiserais après cette étude serait un système avec des ruptures moins brutales dans le niveau d’enseignement. Cela donne de meilleurs résultats qu’un système
avec des choix très clairs.

 

Q. L. : Croyez-vous que s’il y avait moins de compétition, plus de gens réussiraient à votre jeu ?
L. L.-G. : Il faut observer ces résultats avec beaucoup de prudence. Nous espérons avoir bien décrit un système d’enseignement. La compétition précoce qui conduit à l’élimination hâtive de plusieurs participants est un peu dangereuse. La compétition engendre de moins bons résultats qu’un système qui laisse un plus de place aux individus pour s’affirmer
et démontrer leurs véritables aptitudes. On se rend compte que certains élèves deviennent motivés et se mettent à fournir des efforts à partir du moment où ils ont trouvé leur voie. Il me semble qu’en France et dans d’autres pays, on se sert de la compétition précoce un peu trop souvent. De plus, les femmes n’aiment pas la compétition. Les femmes réussissent
aussi bien que les hommes dans un système non compétitif.

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