Volume 20

Université et patrimoine religieux : Les Soeurs grises cèdent la place

Alors que l’UdeM éprouve encore de la difficulté à se départir de l’ancien couvent du 1420, Mont-Royal, l’Université Concordia a acquis en 2007 la maison mère des Soeurs grises, voisine de son campus du centre-ville. Les soeurs quitteront prochainement les lieux pour laisser place aux étudiants. Retour sur un partenariat qui a permis la conclusion de la vente de ce joyau patrimonial.

Début 2013, les 140 soeurs quitteront la maison mère des Soeurs grises. Le couvent sera alors sous la gouverne exclusive de l’université. «C’est émouvant.Quand je suis entrée chez les soeurs en 1959, je n’aurais jamais pensé qu’un jour je ferais partie de l’équipe qui a vendu la maison mère », relate la secrétaire de la congrégation des Soeurs grises, soeur Nicole Fournier. Un départ motivé par le transfert, vers l’État et les laïcs, des activités de solidarité sociale du couvent ainsi que par la baisse du nombre de religieuses. Les soeurs n’ont pas voulu truffer le contrat de clauses contraignantes. «Nous avons voulu nous libérer, et non nous accrocher des boulets. La confiance est là», explique soeur Fournier.

Depuis 2007, les étudiants de Concordia fréquentent déjà les lieux, où 227 lits de résidence universitaire y ont été aménagés. L’édifice devrait par la suite accueillir la faculté des arts de Concordia. Le couvent a été sauvé de la démolition en 1974 par l’émoi populaire lors «d’une des grandes batailles patrimoniales au Québec», rappelle le directeur des politiques chez Héritage Montréal, Dinu Bumbaru.

Une chapelle classée monument historique figure au centre du couvent qui, lui-même, est protégée par l’appellation de site historique national et provincial. Désormais, « il est possible d’envisager un partenariat entre une communauté religieuse et une institution d’enseignement qui assure la sauvegarde et la reconversion d’un grand site patrimonial», affirme-t-il.

Incertitudes

Un concours architectural devrait bientôt voir le jour afin d’imaginer sa transformation. Une perspective qui n’est pas sans soulever des inquiétudes. « La crainte de voir les besoins d’espace de l’uni versité engendrer des constructions dans le jardin de la maison mère demeure », indique M. Bumbaru. Cela mettrait en péril son intégrité et sa valeur patrimoniale. Pour lui, l’achat du couvent relève surtout «d’un voisinage opportun et de la volonté de Concordia de maintenir un campus en centre-ville plutôt que d’un grand principe de mission publique». Il qualifie de «vorace» l’appétit d’espace des universités.

« Intégrer le patrimoine dans le développement du site de Concordia nous tient à coeur. Nous allons inclure ces considérations dans notre stratégie de développement », répond le directeur des projets spéciaux et affaires culturelles de Concordia, Clarence Epstein.

«On aime bien voir que ce que nous avons bâti reste au service du public », se félicite soeur Fournier. Un nouveau complexe d’hébergement dans les Appartements du Square Angus, à l’est de Montréal, accueillera les soeurs qui pourront toujours revenir visiter la crypte située dans le sous-sol de leur ancien couvent. «C’était une décision difficile à prendre, mais nous en sommes heureuses », résume-t-elle.

Partager cet article