Mises en scène caricaturales pour caméra cachée, personnages costumés tout droit sortis d’un film, incartades élaborées, le tout visant à dévoiler la «Vérité ». Pour l’activiste conservateur américain de 26 ans, James O’Keefe, la fin justifie les moyens. Portrait de ce jeune radical.
La directrice générale de la National Public Radio (NPR) aux États-Unis, Vivian Schiller, a démissionné le 9 mars à la suite de la parution d’une vidéo compromettante publiée en ligne par James O’Keefe. Deux membres de la direction, Betsy Lily et Ronald Schiller (aucun lien de parenté), ont été piégés lors d’un dîner avec deux acolytes de l’activiste conservateur James O’Keefe.
Se faisant passer pour de futurs donateurs appartenant à l’organisation des Frères musulmans, les deux hommes d’O’Keefe ont filmé la rencontre avec une caméra cachée. Sur la vidéo, on peut entendre M. Schiller dire que le Tea Party «croit en une Amérique blanche, de classe moyenne, armée jusqu’aux dents ». « Ce sont des gens sérieusement racistes», a ajouté Ronald Schiller.
James O’Keefe n’en est pas à son premier coup fumeux. Travaillant souvent à l’aide d’une caméra cachée, il est reconnu pour avoir piégé en 2009 l’Association of Community Organizations for Reform Now (ACORN), financée par le Congrès américain.
Il s’est fait passer pour le copain d’une prostituée mineure voulant obtenir des informations pour déjouer le fisc. Habillé en proxénète, lunettes fumées et manteau de fourrure, il a posé ses questions et obtenu des réponses à son avantage. La vidéo a fait le tour du monde. Le Congrès a retiré son financement
Lors d’un débat concernant l’assurance ma – ladie en janvier 2010, James O’Keefe et trois autres activistes ont tenté d’infiltrer les bureaux de la sénatrice conservatrice démo – crate Mary Landrieu pour savoir si elle ignorait les appels des électeurs. Habillés en réparateurs de téléphone, deux activistes ont prétexté avoir eu des plaintes concernant la ligne téléphonique pour avoir accès aux bureaux de la sénatrice.
Les quatre hommes ont été jugés coupables et contraints de payer une amende en plus d’avoir à exécuter des travaux communautaires pour être entrés dans les bureaux fédéraux sous de fausses raisons.
Coup manqué à CNN
En août 2010, James O’Keefe s’est attaqué à une journaliste d’enquête de CNN, Abbie Boudreau, en lui donnant rendez-vous pour lui faire des avances sexuelles. Pour mettre son plan à exécution, il l’a invitée dans son bateau personnel, bourré de caméras cachées et rempli de jouets sexuels (dildo, bocal plein de préservatifs, etc.).
La journaliste a flairé l’attrape et ne s’est pas présentée. En entrevue à CNN, O’Keefe s’est défendu en expliquant qu’il voulait lui signifier que «les médias ne font pas leur travail ». Abbie Boudreau voulait faire un reportage sur James O’Keefe. « Ils [les médias] devraient faire des reportages sur la malfaisance dans la société. À la place, ils font un reportage sur moi», a commenté O’Keefe très sérieusement.
Andrew Breitbart, membre du Tea Party et mentor de James O’Keefe, a condamné ce plan. Sur le site Big Journalism, M. Breitbart écrit que la mise en scène était «manifestement vulgaire et insultante».
L’an dernier, James O’Keefe a lancé un projet nommé Project Veritas. Sur la page du site du même nom, on peut lire qu’en plus de vouloir déterrer des scandales de corruption, de fraude et de délits d’initiés, sa mission est de former des jeunes radicaux et de «promouvoir le journalisme d’investigation» (promoting modern-day muckrakers).
Pour lui, tous les moyens sont bons pour que lumière se fasse : caméra cachée, infiltration, fourberie. L’éthique journalistique n’est donc qu’un artifice. « La fin justifie les moyens. Après, c’est à la démocratie de décider du verdict», a-t-il écrit sur le blogue biggovernment.com.