Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a confirmé travailler actuellement sur un nouveau projet de loi qui verra le jour d’ici l’été 2025, visant à renforcer la Loi sur l’instruction publique, selon un reportage de Radio-Canada diffusé le 28 février dernier. Le ministre entend présenter des modifications à la loi afin de faire respecter davantage les principes de laïcité dans les écoles du Québec.
Depuis le dévoilement du rapport d’enquête de l’école Bedford le 11 octobre dernier, le gouvernement a réitéré son désir d’un contrôle plus accru dans les écoles en matière de laïcité. Des vérificateur·rice·s du ministère se sont ainsi déplacé·e·s à l’automne dernier dans 17 écoles ciblées de la province dans le cadre d’une enquête, à la demande du ministère de l’Éducation.
Parmi les manquements que les vérificateur·rice·s ont constatés et mentionnés dans leur rapport de vérification rendu public en janvier dernier, les écoles appliquent l’interdiction du port de signes religieux différemment et de manière inégale, et accordent des accommodements religieux au personnel enseignant sans en vérifier les motifs au préalable. Ils ont également remarqué que des élèves portent des signes religieux couvrant presque l’entièreté de leur visage, ce qui contrevient à la Loi sur la laïcité de l’État*, communément surnommée la « loi 21 ». Enfin, ils recommandent au gouvernement de revoir la liste des personnes visées par l’interdiction de porter un signe religieux et énumérées dans la loi.
Des changements à prévoir
Si l’interdiction de porter des signes religieux, enjeu au cœur de la Loi sur la laïcité de l’État, ne s’étend actuellement qu’aux enseignant·e·s dans les écoles, le gouvernement réfléchit à étendre cette interdiction au personnel de soutien, comme les éducateur·rice·s et les aides à la classe. Ce n’est toutefois pas le seul changement dans la ligne de mire du gouvernement.
Le modèle français au Québec
Déjà, au printemps 2024, le gouvernement disait vouloir s’inspirer de la France pour faire respecter ses lois en matière de laïcité. À cet effet, le ministre responsable de la laïcité, Jean-François Roberge, avait alors rencontré le ministre de l’Intérieur français de l’époque, Gérald Darmanin, afin d’obtenir des conseils.
En France, la laïcité ne s’applique pas qu’au personnel enseignant, mais également aux élèves, pour qui tout vêtement à connotation religieuse est interdit dans les écoles.
En outre, la France s’est dotée d’un « conseil des sages de la laïcité et des valeurs de la république », dont la principale mission est de formuler des recommandations pour faire respecter la loi, en plus d’en faire la veille sur le plan juridique.
À la suite de ces rencontres, M. Roberge n’a pas fermé la porte à l’adoption de ce type de loi ni à la création de telles institutions pour le Québec.
Compétences provinciales ou fédérales ?
Depuis l’adoption de la Loi sur laïcité de l’État en juin 2019, cette dernière continue de faire l’objet de plusieurs contestations. Cette année encore, certains groupes, parmi lesquels la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) et la Commission scolaire English-Montréal, ont individuellement déposé des demandes d’injonction. Cette fois-ci, la FAE fait appel à la Cour suprême du Canada dans le but d’invalider la loi 21.
Bien que l’éducation relève normalement du gouvernement provincial, l’enjeu de la laïcité dans les écoles soulève des questions et des débats qui relèvent à la fois des compétences provinciales et fédérales. En janvier dernier, la Cour suprême a en effet accepté de se pencher sur la constitutionnalité de la Loi sur la laïcité de l’État.
* Au Québec, les élèves ont le droit de porter des signes religieux, à l’exception de ceux qui couvrent la quasi-entièreté ou l’entièreté de leur visage, tels que le niqab ou la burqa, pour des raisons de sécurité, selon le gouvernement.