Culture

Dans l’antre de la bête : métallurgie de Géorgie

Athens, Géorgie, aux états-Unis : la scène émergente s’active et fait place à toute une génération de groupes qui redéfinissent les conventions de la musique lourde. Que reste-t-il des cendres de Out of Time, succès planétaire du groupe R.e.m. ? Un Phénix en colère prêt à tout détruire sur son passage. Regard sur ses nouveaux monstres sacrés du heavy.

Le 24 janvier, Kylesa, quintette de Savannah en Géorgie, visitait la salle de concert Il Motore de la rue Jean- Talon, à Montréal, pour décharger son rock psychédélique et son sludge* fort en décibels et en basses fréquences prêtes à crever les eaux de n’importe quelle femme enceinte.

Depuis 1991, alors que R.E.M., quatuor de la ville d’Athens, chantait Losing My Religion et se hissait en tête du palmarès Billboard pour marquer au fer rouge la Géorgie sur la mappemonde musicale, peu de groupes issus de la région ont connu un succès aussi fulgurant. Pourtant, sur place, la scène frétille de groupes qui amènent le metal, le sludge* et le rock psychédélique aux confins d’un univers musical intransigeant et impénitent et qui savent réinventer un genre qui souffre trop souvent de son manque d’originalité. Ces troupes s’articulent en dehors des systèmes de mise en marché commerciale, mais vendent quand même des disques et attirent les foules.

Mastodon, Torche, Baroness, Kylesa

En provenance d’Atlanta, Mastodon demeure probablement le plus connu de tous ces nouveaux groupes de « métalleux » de Géorgie. Formée en 1999, la troupe a fait paraître quatre albums sous l’importante étiquette de disques Relapse. Quatre albums qui explorent le concept des quatre éléments : la terre, l’eau, le feu et l’air. Mais aussi, quatre albums qui mettent de l’avant quatre genres de musiques extrêmes assaisonnés à la sauce Mastodon : trash metal, sludge, rock psychédélique et hard rock. Se renouvelant sans cesse, Mastodon étend son emprise dans l’univers du metal comme le Kraken déploie ses tentacules pour saisir la coque d’un navire viking.

Moins mystique, Torche pérégrine entre Miami et Atlanta. Plus accessible, le groupe, par l’entremise de son chanteur Steve Brooks, se défend d’être metal. «On essaie de combiner toutes nos influences et tout ce qu’on écoute », explique-t-il en entrevue. Montée comme un centaure, la musique du trio est résolument pop et accrocheuse. Torche carbure au rock nerveux et spasmodique, tout en incorporant une efficace dose de stoner et une énergie punk survoltée. Son deuxième album, Meanderthal, est paru sous l’étiquette de disques Hydra Head et a reçu nombreux éloges provenant de la critique. Son troisième album se fait toujours attendre.

Baroness, tel un monstre à deux têtes, dompte le post rock atmosphérique et le sludge bien senti. Capable d’envolées atmosphériques, comme de rugir comme la bête, le quatuor de Savannah repique de mélodiques solos de guitares qui rappellent un certain groupe culte britannique influencé par la dame de fer.

Avec ses percussions et ses deux batteries, Kylesa possède la force de frappe du Minotaure. La rythmique foudroie des couches de guitares lourdes englouties dans une mer de distorsion. Les mélodies vocales féminines détonnent dans c e chaos . Av e c Spi ral Shadow, leur cinquième album paru l’an dernier, le quintette de Savannah se montre nuancé avec des influences d’indie rock des années 1990 et de psychédélisme halluciné. Ceux qui étaient au Il Motore le 24 janvier dernier l’auront bien compris.

* Le sludge metal est un style musical underground (fusion entre le doom metal et le hardcore) qui se caractérise par le son de ses guitares électriques, à la distorsion très «grasse».

** Le stoner rock est un style de rock et de metal caractérisé par des rythmiques hypnotiques, une basse très lourde et un esprit rock.

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