Le thème de la charrette de cette année était « Au-delà du toit » et invitait les participant·e·s à se pencher sur les possibilités offertes par cette cinquième façade.
Ces dernier·ère·s, qui devaient se baser sur un édifice existant, ont eu quatre jours pour soumettre une proposition de projet à un jury composé de chercheur·euse·s et d’architectes professionnel·le·s. En tout, 48 propositions d’étudiant·e·s inscrit·e·s au baccalauréat, à la maîtrise ou récemment diplômé·e·s ont été soumises.
Verdir les paysages urbains
L’enseignante retraitée de l’École d’architecture de l’Université de Montréal et membre de la Chaire de recherche du Canada en patrimoine urbain de l’UQAM Alena Prochazka a fait partie du jury de la charrette 2024. Elle estime que les toitures possèdent un énorme potentiel écologique. « Il y a beaucoup de possibilités en termes d’espace inutilisé, mais aussi dû au fait que, faisant face au ciel, les toits peuvent aller collecter plein d’éléments naturels : l’énergie solaire, la pluie, le vent, il y a de l’espace pour cultiver, pour vivre », explique-t-elle.
Ces enjeux se sont retrouvés au centre des créations étudiantes de la nouvelle édition de la Charrette interuniversitaire. Le projet des lauréats du premier prix, Julien Rozon et Mathias Madelein, intitulé Elevating Montreal’s Horizon : A Watertower Renaissance, s’attaque au problème de la gestion des eaux usées à Montréal, une ville où la désuétude des égouts amplifie les dégâts causés lors des pluies abondantes. Ce phénomène s’intensifie année après année à cause du réchauffement climatique.
Le projet des deux étudiants consiste en une ingénieuse combinaison de tours d’eau récoltant l’eau de pluie et de parcs éponges — parcs aménagés de façon à ralentir le déversement de l’eau dans les égouts — placés sur les toits des bâtiments situés dans les zones les plus à risque de débordement en cas de fortes précipitations. En plus d’être accessibles au public, ces nouvelles zones vertes atténueraient les risques d’inondation et redistribueraient efficacement l’eau de pluie.
Les villes québécoises auraient avantage à construire plus de dispositifs de ce genre, qui convertissent les éléments naturels en ressources utiles au sein de systèmes circulaires, avance Mme Prochazka. « Le Canada est un pays privilégié en espace et en ressources disponibles, le tout sur un territoire peu densément peuplé, précise-t-elle. Cela est un avantage, certes, mais l’urgence d’une transition écologique peut y sembler moins immédiate. » Elle ajoute que les impacts environnementaux sont tout aussi graves au Canada que dans le reste du monde, mais qu’il y a un certain retard dans la façon d’aménager ce vaste territoire.
Des solutions novatrices
L’importance des concours comme les charrettes interuniversitaires relève de la contribution de ceux-ci à la culture architecturale. Souvent, les travaux qui y sont présentés sortent des sentiers battus et font réfléchir. « Cette culture architecturale n’est pas détachée de la réalité du tout, mentionne Mme Prochazka. La spécificité de la profession, c’est d’apprendre à réfléchir autrement, à trouver des solutions meilleures à des problèmes actuels. »
Mme Prochazka se souvient avec enthousiasme de moments où les membres d’un jury ont admiré les travaux d’étudiant·e·s, au point de souhaiter qu’ils voient le jour, « parce que ce sont de véritables apports à la culture architecturale ». « Les étudiants trouvent souvent des solutions novatrices qui peuvent avoir un impact réel si elles sont construites et réalisées », souligne-t-elle.
Elle affirme d’ailleurs que les nouvelles générations « portent sur leurs épaules la possibilité de faire autrement ».