Dans un courriel adressé au quotidien québécois, l’attaché de presse de la ministre, Simon Savignac, a avancé qu’accepter ou non une candidature pour siéger au conseil d’établissement relève de la prérogative de Mme Déry. « Nous avions certaines réserves quant aux liens qu’a entretenus Mme Helly avec le prédicateur controversé Adil Charkaoui, nous avons donc demandé à l’établissement de nous soumettre une autre candidature », a écrit M. Savignac au Devoir.
Au cours d’une entrevue avec la journaliste Marie-Michèle Sioui, Mme Helly s’est dite visée par une campagne de « salissage ». Elle suspectait initialement que sa nomination ait été bloquée en raison de ses travaux de recherche, qu’elle décrivait comme « des sujets un peu fâcheux pour les gens de la CAQ ».
Explication
À titre de représentant du Collectif québécois contre l’islamophobie (CQCI), M. Charkaoui a participé en 2015 à un colloque international à l’INRS, organisé par Mme Helly.
La même année, le CQCI a décerné à la chercheuse un prix de reconnaissance pour ses « efforts dans la lutte contre l’islamophobie ». Le Collectif a aussi octroyé ce prix à l’ancien maire de Huntingdon, Stéphane Gendron, ainsi qu’au président du Conseil musulman de Montréal, Salam al-Minyawi.
Le Devoir cite que c’est cette reconnaissance qui a le plus dérangé le cabinet de la ministre de l’Éducation supérieure, selon les explications de l’attaché de presse de Mme Déry.
« Le processus par lequel la professeure Denise Helly a été désignée par ses pairs lui confère les compétences et la légitimité nécessaires afin de pouvoir contribuer à la gouvernance de l’INRS », a déclaré l’Institut national au Devoir. L’établissement a également ajouté que les explications de la ministre « ne changent pas la situation ».
Objet d’une enquête
Si le cabinet de Mme Déry évoque les liens avec M. Charkaoui pour justifier sa décision, c’est que ce dernier est une figure controversée.
Il est en effet visé par une enquête de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour des propos tenus durant une manifestation en appui à la Palestine, le 28 octobre dernier. Son discours aurait constitué des appels à la haine et à la violence.
Le premier ministre du Québec, François Legault, a martelé la semaine suivante que M. Charkaoui avait fait « de l’incitation à la haine et à la violence » lors d’une mêlée de presse. Il a ainsi suggéré qu’une intervention policière était nécessaire.
M. Charkaoui n’en est pas à sa première controverse. En 2015, le collège de Maisonneuve ne lui avait plus permis de louer des salles de classe et des plateaux sportifs pour y tenir les activités de l’École des compagnons, organisme affilié au Centre communautaire islamique de l’est de Montréal.
La direction du collège avait alors suspendu temporairement le contrat de location après la révélation selon laquelle deux de six jeunes parti·e·s en Syrie en janvier 2015 suivaient les cours que donnait M. Charkaoui.
L’établissement avait aussi trouvé sur le site Internet du centre islamique « une vidéo qui faisait la promotion de valeurs différentes des [siennes] et dans laquelle on tenait des propos inappropriés », avait rapporté La Presse.
M. Charkaoui a de nouveau obtenu l’autorisation d’utiliser les espaces du collège, mais un observateur arabophone est assigné aux séances pour s’assurer « qu’aucun propos haineux, discriminatoire ou incitant à la violence [n’est] tenu dans ces locaux. »