Aux confins du Mile-End et du centre-ville, dans le demi-soussol d’un petit centre d’achat de quartier, le Cinéma du Parc est une caverne qui regorge de bijoux cinématographiques. Des perles rares de répertoire côtoient une variété de trophées commerciaux. Visite.
Trois salles de projection. Une mezzanine faisant office de galerie d’art. Un coin snack, face au à un mur recouvert de critiques de films. Nulle décoration superflue ne vient encombrer cet espace entièrement voué au cinéma. La raison d’être du Cinéma du Parc : présenter des films variés et inaccessibles ailleurs. C’est aussi sa marque de distinction auprès des circuits standards, qui boudent bon nombre d’oeuvres qu’il propose. Le cinéma a une astuce : son statut de festival permanent. «Le Cinéma du Parc n’est pas obligé de passer par les distributeurs québécois, comme doivent le faire les autres salles à Montréal», explique Stéphane Burelle, attaché de presse de l’établissement au moment de l’entrevue. C’est un privilège que se partagent de rares salles au Québec, dont le Cinéma Parallèle sur le boulevard Saint-Laurent.
L’originalité de la démarche de l’équipe du Cinéma du Parc est de proposer des films accessibles à tous, en français et en anglais (sous-titres dans les deux langues). Tout ça pour l’amour et la poésie des films, dont tout le monde devrait profiter sur un pied d’égalité. « Il y a encore 4 ans, le cinéma était unilingue anglophone », explique Roland Smith, actuel propriétaire et programmateur du cinéma, grand défenseur – depuis 40 ans ! – du cinéma de répertoire. Si l’idée est belle en théorie, en pratique, ça se corse. « Les gros distributeurs sont difficiles à convaincre, dit Roland Smith. Ils ne sont pas tentés d’exporter leurs films vers des milieux francophones. Ils savent que les sous-titres en français déplaisent à leur public anglophone. » Pour lui, le cinéma bilingue, à l’image de la société montréalaise, est un combat quotidien.
Pas étonnant que le petit lobby attire une faune de cinéphiles cosmopolite : les étudiants de l’Université McGill, située à deux pas du cinéma, côtoient les retraités vivant dans les tours de La Cité. On entend parler le français et l’anglais, mais parfois aussi l’espagnol, le grec ou l’arabe. L’effervescence est avivée grâce à la présence régulière de la presse et d’artistes célèbres ou underground.
Le cinéma siège aujourd’hui au sommet d’une longue histoire, parfois laborieuse, souvent fastidieuse. «En quarante ans, le cinéma a connu quatre administrations principales. Chacune y a laissé un peu de sa personnalité », explique Stéphane Burelle. D’abord sous l’emprise des grandes compagnies commerciales que sont United, ancêtre de Famous Player, et Cinéplex Odéon, le cinéma prend vie au début des années 1970. Festivals, rétrospectives et ciné-clubs attirent une clientèle plus nombreuse et variée. Au début des années 2000, le cinéma prend son envol grâce à d’importantes rénovations : 500 000 $ sont consacrés aux salles, à l’équipement et aux films.
Pour ceux qui bâillent à l’idée de voir un film d’auteur, plongés pendant des heures durant dans une salle obscure, il existe des solutions de rechange. Les amateurs de psychologie peuvent se retrouver au ciné-club Psycho, en compagnie d’une bande d’experts en psychothérapie, et discuter d’une oeuvre qui aborde l’exploration de l’inconscient. Pendant les soirées Sing- A-Long, on peut chanter gaiement devant une comédie musicale agrémentée de sous-titres, comme au karaoké.
À voir au Cinéma du Parc :
• 2010 Cannes Lions, les meilleures publicités du monde. Du 19 au 25 nov.
• The Heart of Auschwitz, présenté au Festival du nouveau cinéma 2010, version originale anglaise, français, portuguaise, polonaise et hébreu, soustitrée en français et en anglais. Du 23 au 25 nov.
• You Will Meet a Dark Tall Stranger, film de Woody Allen, version originale anglaise sous-titrée en français. Du 23 au 25 nov. • Le 4e festival du Cinéma Brésilien de Montréal. Du 26 nov. au 2 déc.
• Enter the Void, de Gaspar Noé, film d’auteur célébré tout au long de son étonnant parcours festivalier. Dès le 26 nov.
• Oncle Boonmee Who Can Recall His Past Lives, la palme d’or 2010, dans sa version originale thaï sous-titrée en anglais ou en français. Dès le 26 nov.