Avant de se lancer dans le monde de l’opéra avec des chefs-d’œuvre comme Thaïs (1894) ou encore Don Quichotte (1910), le compositeur français de renom Jules Massenet s’est aussi aventuré dans l’univers de l’opérette durant ses années formatrices. L’Adorable Belboul n’est que l’une de celles que Massenet a créées avant de la laisser sombrer dans le néant.
Difficile de savoir pour quelles raisons Massenet a voulu oublier, voire interdire les représentations de L’Adorable Belboul. Peut-être voulait-il abandonner l’opérette en faveur d’un genre considéré comme plus prestigieux ? Ou encore, cette œuvre était-elle plutôt vouée à son cercle privé ? Ces questions n’auront peut-être jamais de réponses. Néanmoins, la redécouverte du manuscrit perdu, ainsi que sa représentation en public en première mondiale au Québec, ne sont pas insignifiantes pour le monde de l’opéra.
En amour comme à la guerre
L’Adorable Belboul transporte le public à Samarcande, en Ouzbékistan, pour suivre les mésaventures de Zaï-Za, fille cadette du grand marchand Ali-Bazar. Emportée par la danse fulgurante du derviche tourneur Sidi-Toupi lors de sa visite à la mosquée, Zaï-Za voit son voile happé par ce tourbillon festif, et son visage est alors dévoilé à un auditoire ébahi. Heureusement pour elle, le charmant confiseur Hassan réussit à l’extirper de cette situation pour le moins chaotique.
En plus d’un amour qui semble bourgeonner entre Zaï-Za et son sauveur, le derviche tourneur Sidi-Toupi tente lui aussi péniblement de retrouver le ravissant visage qu’il a aperçu à la mosquée. Un triangle amoureux se dessine alors. Pour résoudre ce dilemme, Fatime, la suivante de Zaï-Za, a la brillante idée de faire croire à Sidi-Toupi que la belle jeune femme qu’il a rencontrée plus tôt était en fait Belboul, la sœur aînée de Zaï-Za, dont, selon les dires de son propre père, l’apparence est moins que plaisante.
Grâce à cette tromperie astucieuse, Sidi-Toupi, contractuellement obligé de verser 1?000 sequins à Ali-Bazar en cas de refus de se marier à Belboul, est harponné par la ruse. Ali-Bazar doit donc payer la dot au père de Belboul, et Zaï-Za et Hassan ont ainsi le champ libre pour se marier.
L’histoire de L’Adorable Belboul est hautement divertissante par sa valeur comique, la qualité de l’écriture dans les dialogues et les interactions entre les divers personnages. De plus, la grandeur et la profondeur des pièces musicales interprétées par les musiciens et les choristes viennent rehausser l’expérience à un tout autre niveau.
En passant par le rejet du mariage et des déclarations d’amour d’une tendresse inouïe, les pièces, couplées aux harmonies pures et limpides soigneusement jouées par la distribution, parviennent à toucher le public en plein cœur. L’ensemble, mis en scène dans des décors virtuels inspirés par les carrelages multicolores de l’architecture ouzbèke, crée une expérience enchantée pour les cinq sens.