En circulant dans les couloirs de l’UdeM, les répercussions de la pandémie de COVID-19 au sein de la communauté estudiantine sont presque imperceptibles. Les masques procéduraux toujours portés par une partie des étudiant·e·s rappellent toutefois la période où le respect de plusieurs mesures sanitaires était imposé.
À la suite d’une déclaration émise par la Santé publique en mai 2022 sur l’arrêt des mesures sanitaires en milieu universitaire, l’UdeM a levé l’obligation du port du masque. Depuis, celui-ci est, comme le mentionne l’Université, « un choix personnel ».
Masqué·e·s dans un monde démasqué
Pour l’étudiant en première année au certificat en publicité et communication créative Bob James Rushatsi, continuer de porter le masque est une question de prudence. «On dit qu’il y a de moins en moins de cas et que la situation s’améliore, mais moi, j’ai l’impression que ce n’est pas fini, estime-t-il. Je préfère juste le garder jusqu’à ce que j’aie l’impression d’une atténuation totale [des cas].»
L’étudiant en troisième année au baccalauréat en études hispaniques Patrick Noué partage le même avis. «Je vis avec une colocataire qui a une santé un peu fragile, donc je veux éviter de ramener quelque chose [à la maison]», témoigne-t-il.
De son côté, l’étudiant en deuxième année au baccalauréat en économie et politique Chris Habib est heureux que «tout revienne à la normale», même s’il décide aussi, pour sa part, de toujours porter le masque. «J’aime mieux que chacun soit libre de faire ce qu’il veut», déclare-t-il.
Augmentation de l’anxiété?
L’étudiante en quatrième année au doctorat en psychologie clinique Marie-Lou Ouellette, actuellement en internat à l’Hôpital Rivière-des-Prairies, juge pour sa part que chez certaines personnes, la fin des mesures sanitaires est venue diminuer l’anxiété, mais qu’en fonction «des prédispositions, des tempéraments ou des problématiques des individus», une hausse de celle-ci est vécue par d’autres.
Elle explique que le masque a servi «en quelque sorte de récompense» aux personnes atteintes notamment d’anxiété sociale. La fin des mesures sanitaires pourrait ainsi, selon l’étudiante, accroître le stress chez certaines d’entre elles, car elle implique le retrait d’un objet qui leur donnait l’impression d’être protégées. «Si les mesures sont venues aider certaines personnes au niveau psychologique, c’est comme si on leur enlevait quelque chose de crucial», précise Mme Ouellette.
Mme Ouellette aborde également le revers de la médaille. «Les réactions négatives à la fin des mesures sanitaires sont moins mentionnées, souligne-t-elle. Ça fait en sorte qu’il y a beaucoup de patients qui viennent consulter des cliniciens et qui ont l’impression d’être les seuls au monde à ne pas être contents.»
Bob James aurait d’ailleurs préféré reprendre ses cours sur un campus toujours masqué, du moins en partie. «Je ne dis pas que je me sens moins en sécurité […] nécessairement, mais j’aurais préféré que plus de gens soient vigilants comme moi, même si la décision [de porter le masque] appartient à chacun», précise-t-il.
Syndrome du visage vide
La psychologue espagnole spécialisée en psychologie des enfants et des adolescent·e·s au Centre hospitalier Dexeus de Barcelone, Georgina del Valle, évoque ainsi pour sa part un phénomène lié au retrait du port du masque dans une entrevue accordée au quotidien El Periodico, baptisé le «syndrome du visage vide»*. Selon elle, ce syndrome se manifeste notamment par la peur d’exposer son visage. Retirer son masque constituerait pour certaines personnes la mise à nu de complexes qui peuvent les mettre mal à l’aise dans des contextes sociaux, explique la psychologue.
C’est d’ailleurs le ressenti d’un étudiant de l’UdeM, qui continue de couvrir son visage par crainte du regard critique des autres. «Je n’aime pas montrer mon visage, car je reçois plusieurs remarques que je n’apprécie pas», révèle-t-il, sous couvert d’anonymat.
* ¿Que es el sindrome de la cara vacia ?, elperiodico.com, consulte? le 3 octobre 2022.