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Des cours qui auraient lieu en ligne et en présentiel simultanément : une option viable pour l'avenir des universités ?

S’accommoder du comodal ?

La professeure donne son cours de droit administratif général. La salle de classe n’est qu’à moitié pleine. Tout le monde est à l’écoute, sauf peut-être deux ou trois étudiantes et étudiants davantage passionnés par le droit des affaires ou le droit pénal. Il va falloir capter à nouveau leur attention. Bien en évidence, à droite, un écran connecté en direct sur Zoom expose une palette de visages : certains suivent assidûment l’enseignement donné, alors que d’autres ont éteint leur caméra ou que d’autres encore consultent furtivement leur cellulaire. Il va aussi falloir éveiller leur intérêt. L’exercice se corse. Attention à l’heure qui file. Ce matin, chacune et chacun a en effet choisi, selon ses obligations ou selon son envie, de venir en personne ou de suivre ses cours en ligne.

Certains membres de la communauté étudiante espèrent aujourd’hui, à l’image de ce scénario, pouvoir suivre leurs cours comme ils le souhaitent. Le tout après presque deux années de pandémie, dans une université qui a proposé à ses membres un enseignement à distance, lorsque celui-ci était possible, chaque fois que la crise sanitaire l’a imposé — dont le mois dernier. Et qui a permis la reprise des activités d’enseignement et de recherche sur le campus depuis le 31 janvier.

Des demandes et des débats

Des pétitions lancées en ligne au cours du mois de janvier, sur la plateforme change.org, mettent ainsi en avant l’idée de proposer à toutes et à tous, à l’UdeM, des cours comodaux ou multimodaux, c’est-à-dire donnés simultanément en ligne et en présentiel. Parmi les arguments avancés : le fait que certaines et certains se sentent plus à l’aise avec l’enseignement à distance dans la situation actuelle, parfois en raison d’une santé fragile. Autre élément relevé : le fait qu’aujourd’hui, boire ou manger pendant les cours est impossible. Le cas des parents aux études est également évoqué, puisque ceux-ci sont plus à même de devoir s’isoler — cas avéré de COVID-19 chez les enfants, par exemple — et de manquer des cours. Des étudiantes et étudiants reprochent aussi à d’autres le fait de ne pas toujours bien respecter les consignes sanitaires sur le campus.

La pétition de l’étudiante au baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire Zoé Pronovost, intitulée « Offrez-nous un mode comodale (sic) jusqu’à la fin de la session d’hiver 2022 », avait presque atteint les 2 300 signatures lorsque Quartier Libre a bouclé son dernier magazine. Celle de l’étudiante au baccalauréat en philosophie Alexandra Messier, baptisée : « UdeM — En faveur de l’enseignement à distance », en recueillait près de 1 800. Ces deux étudiantes affirment ne pas se positionner contre le retour en présentiel, mais demandent à l’Université de s’appuyer sur ses nouveaux acquis : puisque l’enseignement à distance peut être déployé quand il s’avère nécessaire, pourquoi ne pas le proposer en tout temps et laisser à chacun le choix de se déplacer ou non sur le campus ?

Sur des groupes Facebook tels que « Spotted UdeM » et « UdeM+1 2021-2022 », les discussions se sont animées sur le sujet, avant la date fatidique du 31 janvier. Certains membres de
la communauté étudiante disaient pour leur part avoir hâte au retour en présentiel et ne pas comprendre les propositions des pétitions.

Répondre avec souplesse

Questionnée sur le sujet, la porte-parole de l’UdeM, Geneviève O’Meara, a répondu que le personnel enseignant est sensibilisé sur le fait que le taux d’absence pourrait être plus élevé dû aux périodes d’isolement. « Nous (lui) demandons de faire preuve de souplesse, que ce soit en rendant disponible sur StudiUM une présentation PowerPoint, un enregistrement du cours, de planifier un rendez-vous virtuel avec un étudiant absent pour répondre à ses questions, ou toute autre mesure qui pourra aider un étudiant en isolement à poursuivre son apprentissage », a-t-elle ajouté. Mme O’Meara a également mis en avant l’offre de cours hybrides déjà présente à l’UdeM (les cours hybrides, à la différence des cours comodaux ou multimodaux, combinent des cours en mode présentiel et d’autres à distance — mais un même cours n’est pas donné simultanément en ligne et en personne).

Le directeur des Services de soutien à l’enseignement et professeur au Département de psychopédagogie et d’andragogie de l’Université de Montréal Bruno Poellhuber estime, pour sa part, que si la formation multimodale est appelée à s’accroître, « l’expérience acquise durant la pandémie montre que ce n’est pas un mode d’enseignement si facile à faire fonctionner ».

À l’heure actuelle, force est de constater que le retour à la normale n’est qu’une illusion. Les universités en ont déjà conscience et devront s’y résoudre : les écrans interposés ne vivent
pas une simple heure de gloire. Espérons malgré tout que nous ne serons pas, à l’avenir, de plus en plus gênés, intimidés, à l’idée de nousrencontrer en personne… À l’idée d’être humain.

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