Firs entre en scène, nul bruit, seul le son des violons. Il ouvre une armoire avec une extrême délicatesse; un halo de lumière dorée illumine alors l’hôte. Dans ce meuble, tout peut se trouver, des trésors de galions aux souvenirs perdus de l’enfance en passant par l’amour. Pour vous donner une idée ouvrez l’attaché-case de Pulp Fiction. Sur un grand onirisme commence la pièce de théâtre La Cerisaie.
La première partie de la pièce consiste en l’arrivée de la famille dans la Datcha après de nombreuses années d’absence et s’avère très poussive. La scénographie est aride, le jeu des acteurs légèrement surfait, il est difficile d’accrocher. Heureusement, Gérard Poirier, qui livre une très belle interprétation de Firs, nous délivre de cette atmosphère pesante le temps de quelques dialogues.
C’est avec la second acte, qui se déroule dans la cerisaie, que la pièce trouve sa dynamique. Les acteurs semblent plus en phase avec la fiction et le jeu en devient plus fluide. L’action entraine, et génère la détente nécessaire à l’appréciation de la pièce. Les deux musiciens apportent un réel gain à l’ensemble.
C’est dans la deuxième partie que La Cerisaie prend toute son ampleur. Normand D’Amour se révèle dans le monologue du Moujik devenu propriétaire terrien. C’est une scène d’une belle violence, dans laquelle le monde semble s’arrêter pour commencer à tourner en sens inverse. La prestation du comédien est puissante, il incarne complètement son rôle, c’est impressionnant.
La mise en scène fait des miracles et l’on assiste à un véritable ballet des comédiens. Le plus fort que puisse nous offrir la fin de la pièce est la nouvelle utilisation du pauvre décor. Un tapis à moitié enroulé marque la séparation entre deux mondes, entre deux réalités.
L’armoire ne s’ouvre plus, c’est la fin de la pioche. On ne peut plus y prendre ni ses rêves ni ses souvenirs, il faut tourner la page. Dans la salle, les larmes s’échappent face au tragique destin du beau Firs.
La Cerisaie est présentée au Théâtre Jean-Duceppe du 27 octobre au 4 décembre
Mise en scène de Yves Desgagnés