Le premier film québécois sur les gangs de rue à Montréal, Sortie 67, est un drame de crime sans nouveauté et légèrement brouillon dans son scénario. Cependant, ce film panse légèrement ses défauts par son ton honnête.
Ronald (Henri Pardo), un mulâtre de l’arrondissement montréalais de St-Michel, a quitté sa famille avant son adolescence. En effet, son père blanc (Sylvio Archambault) est en prison pour avoir tué sa mère sur soupçon d’adultère. De plus, après un passage chez treize familles d’accueil qu’il honnit, Ronald se laisse recruter par une nouvelle famille : un gang de rue dirigé par Brooklyn (Benz Antoine). En plus de commettre toute une panoplie de crimes, Ronald attend le jour où son père sera libéré afin de le tuer. Par contre, puisqu’il a une fille et une femme qui lui reproche de ne pas être un homme, Ronald procède à un examen de conscience. Restera-t-il un criminel ou deviendra-t-il un homme honnête?
Ce premier film par le réalisateur québécois Jephté Bastien est légèrement prévisible puisqu’il emprunte les trucs du manuel de la scénarisation d’un drame de crime. Inutile de voir The Killer, l’œuvre majeure du réalisateur John Woo qui a élevé les standards de qualité du cinéma d’Hong Kong en 1989, pour savoir comment une histoire sur un criminel faisant un examen de conscience se termine. En d’autres mots, on croit voir en Sortie 67 une histoire qu’on a déjà vue. Par contre, malgré un scénario très conventionnel, Bastien montre son souci pour les détails. Par l’usage des arrondissements de St-Michel et Montréal-Nord ainsi que l’argot des gangs de rue, le réalisateur québécois essaye de nous plonger dans le milieu des gangs de rue sans aucune glorification. Ajoutons aussi à cela cette tentative de Bastien pour comprendre la frustration qui amène de jeunes Québécois de descendance haïtienne innocents à l’origine à se joindre à un gang de rue. Malgré des limites dans l’élaboration des personnages, Bastien s’attaque, avec beaucoup de perspicacité, à cette tendance qu’ont certains Québécois de descendance haïtienne à croire 1) que les noirs doivent toujours faire un deuxième effort face à un blanc pour gagner sa vie; et 2) qu’il n’y a pas de « modèles » de réussite professionnelle chez les Québécois (ou même Occidentaux) noirs.
Finalement, attendez-vous à voir un film un tantinet cousu de fil blanc et qui perd légèrement son souffle vers la fin avec des tours de manche développés à la hâte. Par contre, sans pour autant être un chef-d’œuvre du cinéma québécois en raison de l’impression de « déjà vu », Sortie 67 mérite d’être loué pour sa tentative d’analyser d’une façon très hypothétique et en toute honnêteté cette envie de bien des jeunes Québécois de descendance haïtienne à vouloir se joindre à un gang de rue.
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Sortie 67
Canada (2010), drame de crime, 103 minutes
Réalisateur : Jephté Bastien
Distribution : Henri Pardo et Benz Antoine